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Malkia, vêtue d'une robe pull à col roulé et manches longues bleu roi, descendait les escaliers, les mains dans les cheveux, pour aller dans la salle à manger. Il était déjà dix-neuf heures et le dîner allait être servi.

Elle venait d'atteindre la dernière marche quand Sonia, venue de la cuisine, entra dans son champ de vision, un plat fumant entre les mains. La jeune femme huma avec exagération l'odeur délicieuse qui s'en dégageait.

- On va bien se régaler, on dirait.

- Vous êtes magnifique, signora, la complimenta Sonia en détaillant sa tenue.

Malkia sourit, flattée par l'éloge de la gouvernante.

- Donne, je vais le faire, dit-elle en lui prenant l'assiette des mains.

- Il est déjà là ?

- Non, il est encore dans son bureau, mais il ne va pas tarder. Je crois que je vais y aller. Vous passez une bonne fin de soirée.

Elle inclina la tête respectueusement et s'en alla.

Malkia baissa la poignée de la porte de la salle à manger en faisant attention pour ne pas verser l'assiette qu'elle avait dans la main, calée sur sa poitrine et qui commençait sérieusement à la brûler.

Elle courut presque jusqu'à la grande table en céramique où les couverts avaient déjà été posés par Sonia, et le chandelier allumé. Tout ce qu'elle avait à faire était de déposer le plat et d'attendre.

Elle tira la chaise qui grinça sur le sol marbré en damier noir et blanc, près de celle de son mari, et attendit sa venue.

Les minutes passèrent dans un silence de plomb rompu par les trottements secs des aiguilles de l'horloge au-dessus de la porte, qui lui tenait compagnie dans sa solitude.

Elle frotta ses mains entre elles et étouffa un bâillement, lassée d'attendre. Elle n'y tenait plus ; elle avait faim, et à cette allure, la nourriture deviendrait froide.

Elle jeta un coup d'œil sur l'horloge qui indiquait vingt heures. Déjà une heure à l'attendre, soixante minutes que ses fesses étaient posées sur cette chaise, et ça commençait déjà à faire effet.

Elle avait faim, et si elle ne mangeait pas maintenant, elle s'écroulerait la minute suivante. Elle guetta encore pendant de longues et interminables secondes la porte, espérant le voir la passer, mais comme les fois précédentes, rien ne se passa. Elle était toujours fermée, et il n'y avait pas l'ombre d'un bruit qui pouvait l'informer qu'il y avait quelqu'un d'autre dans la villa.

Elle avait assez attendu ; il n'allait pas venir, c'était indéniable. Il n'en avait rien à faire d'elle, et elle, comme une idiote, l'attendait.

Elle se pencha et se saisit de la louche pour se servir et commença immédiatement à manger. Il n'y avait plus rien à faire, et même si il venait maintenant, elle avait déjà dîné. Il était mieux pour lui de ne pas pointer le bout de son nez, car avec la boule de rage qu'elle avait dans la gorge, elle ne savait pas ce qu'elle pouvait lui faire.

Il n'avait aucune excuse ; ce n'était pas comme s'il était sorti et qu'il avait pu être bloqué par les bouchons ou autre. Même s'il y avait des téléphones, il aurait pu appeler pour la prévenir.

Non, il était là, à quelques mètres d'elle, et il ne daignait même pas se lever de sa chaise pour venir la prévenir qu'il ne pourrait pas manger avec elle. Juste dix minutes tout au plus lui aurait suffi, mais non. Monsieur n'avait pas que ça à faire ; monsieur avait des choses plus importantes qui requéraient son attention, et elle, elle n'était qu'une conne qui voulait faire des efforts, mais à quoi bon ? Ça ne marcherait jamais entre eux, jamais.

Perfect AddictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant