56. Opération décuvage

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Le monde tournait autour d'elle. Tout était flou et vaseux, comme si elle s'était perdue au fond de sables mouvants aussi profonds que les plus sombres des abysses elles-mêmes.

Elle ne ressentait plus rien. Hormis cette douleur diffuse et sourde qui résonnait dans son cerveau, tintant à ses oreilles tel les battements désordonnés d'un tambour mal accordé.
En clair, rien d'agréable. Et puis s'était sans parler de ses tripes complètement en désordre, son estomac souffrant le martyr pour elle ne savait qu'elle raison. C'était vraiment gênant, en plus d'être une sensation à laquelle elle était tout sauf habituée.

Sans le réaliser, la brune laissa un gémissement de douleur et de gêne sortir de ses lèvres entrouvertes, à la recherche de la moindre bouchée d'oxygène.
C'est à ce moment là qu'elle réalisa un peu plus l'environnement qui l'entourait alors que son esprit sortait avec une lenteur calculée de la brume épaisse dans laquelle il s'était enfoncée.

Elle avait chaud.
Une couette avait été posée jusqu'à la naissance de ses épaules, pour bien la couvrir comme un petit bébé à la recherche du moindre réconfort. Elle pouvait presque sentir l'odeur étrangement familière de papier et d'encre de toute évidence laissée par la personne qui l'avait mise au lit.

De plus dès que son corps effectuait un mouvement, la plupart d'entre eux complètement automatique sans qu'elle ne puisse se permettre de les contrôler, le matelas qu'elle commençait à connaitre par cœur bougeait de paire avec elle.
Sa tête lourde reposait de toute évidence sur un oreiller, l'odeur du linge frais et du papier venant caresser ses narines.

Elle était dans un lit.
Et elle était persuadée qu'il ne s'agissait pas de n'importe quelle couchette de l'immense Mobydick. C'était son lit, le grincement du si habituel support en bois après un mouvement plus brusque de sa part que les autres, le matelas d'Hélène sans aucun doute juste sous le sien ne faisant que lui confirmer ce qui n'était jusque là qu'une forte supposition.

Seïri se sentit foncer les sourcils alors que ses sensations revenaient au fur et à mesure, son inconfort augmentant proportionnellement à l'avancée de son réveil.
Elle agita difficilement sa langue dans sa bouche, un effet pâteux à l'étrange goût de cigarette mêlé à l'alcool la gênant. Ses lèvres étaient douloureuses et elle aurait été prête à parier une bouteille d'encre qu'elles étaient sans aucun doute gonflées par elle ne sait quel maléfice.

Et pire que tout, la douleur lancinante dans son cerveau ne faisait qu'augmenter alors que son estomac se tordait dans tous les sens ; la jeune femme découvrant ainsi de nouveaux points de son corps qu'elle n'aurait jamais pût soupçonner.

Mais putain.
Comment avait elle fini dans un tel état ?

Car elle était sûre d'une chose alors que la brume qui couvrait sa mémoire se levait de plus en plus, des bribes de souvenirs de la soirée de la veille lui revenant sous forme de flashs ; et c'était qu'elle n'avait jamais ressenti un tel inconfort, venant d'une source qu'elle ignorait. Après tout elle en était encore à découvrir la vie et ses petits problèmes, ayant quand même déjà l'expérience de la noyade à son palmarès ; ce qui n'était pas rien.

La cartographe grimaça pour elle-même, les rayons désagréables du soleil passant sur son visage pour mieux la déranger.
Bordel. Elle n'avait pas besoin qu'on tente de l'aveugler. Elle douillait déjà suffisamment avec sa tête écrasée par un troupeau d'éléphants et son envie de vomir qui commençait lentement mais sûrement à monter.

Et puis ça fit tilt.
Du soleil ?... cela voulait il donc dire que le jour s'était levé ?... mais c'était pas bon du tout ça, il fallait qu'elle bosse. Oui, il fallait qu'elle fasse quelque chose de sa vie... elle avait quand même quelques responsabilités et...

La mémoire de papierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant