68. Dernière touche

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La nuit venait à peine de tomber sur l'île d'Estellar et le navire amiral de la grande flotte de Barbe Blanche, le Mobydick.
Et sur ce bâteau à la célèbre proue de baleine blanche, éclairée par l'une de ces familières lampes à huile qu'elle aimait tant, isolée dans la salle de cartographie se trouvait une jeune femme.

Ses cheveux bruns attachés en un lâche chignon retenus par une simple broche couraient sur ses épaules en traçant la courbe de son corps, se mouvant au rythme de ses lourdes respirations.
Elle travaillait avec hâte à sa tâche, les yeux clairs plissés par la concentration alors que, changeant sans cesse de position elle marquait de sa plume des indications sur une carte qui paraissait des plus précises, à un rien d'être complète.

La cartographe se mordit rapidement la lèvre, essuyant à la va vite son outil sur le chiffon déjà couvert d'encre noir à ses côtés, prévu à cet effet.
Ses pupilles étaient dilatées par la concentration, une goutte de sueur coulant lentement du haut de sa tempe pour venir se perdre dans le bas de son cou.

Il s'agissait de Seïri.
Prise par sa tâche comme rarement elle l'avait déjà été, se frottant parfois par réflexe le haut de la poitrine sans qu'elle ne puisse le contrôler.

Car il y avait une raison à tout cela.
À cette tâche de cartographie qu'elle accomplissait avec encore plus d'hargne qu'à l'habituel, le monde n'existant désormais plus autour d'elle.

Cela faisait quelques heures qu'elle avait été agressée par des membres inconnus de la 3ème flotte, dans l'un des énièmes couloirs sombres que comptait ce navire labyrinthique.
Et elle avait eu le temps de redescendre, réalisant lentement ce qui lui était arrivé... ainsi que le pire. Qu'elle avait évité in extremis, sauvée de justesse par le commandant Joz.

Car l'ancienne membre des Spades avait bien failli se faire violer.
Et alors que cette pensée traversait son esprit tel un langoureux serpent dont le seul objectif était de lui tordre le cou en traitre, elle frappa rageusement la table de son point libre.

Au début elle avait été dégoutée. Dégoutée d'eux.

Dégoutée de sa faiblesse.
Dégoutée d'elle.

Car bien qu'elle ait sentie contre elle la crosse de son pistolet, la brune s'était tellement figée sous la violence de l'action qu'il ne lui était jamais venu à l'esprit de se saisir de son arme et de se défendre.
L'auraient ils même laissés faire ?... tout cela aurait finis par se retourner contre elle, elle en était certaine.

Sa parole valait en effet tellement peu contre celles de membres déjà expérimentés de cet équipage... Elle remercia une nouvelle fois le destin d'avoir mis le commandant de la 3ème flotte sur sa route.
Honnêtement elle ne connaissait pas vraiment l'utilisateur de ce Paramecia qui donnait le pouvoir du diamant à son détenteur, sa carrure et aura impressionnante ne lui ayant jamais vraiment donné envie d'aller vers lui.
Pas qu'on le lui demande cependant.

Mais les apparences étaient bien trompeuses.
Car derrière ce visage de dur pirate, l'homme s'était en fait révélé très gentil et attentif. Grâce à lui elle avait rapidement repris ses esprits, et il l'avait suffisemment rassurée pour enlever une bonne partie de sa culpabilité dans cette histoire ; alors qu'il l'avait laissée devant les quartiers des femmes, lui garantissant que ses agresseurs seraient sévèrement punis.

Elle ignorait si c'était la vérité mais cela avait au moins eu le don de la faire passer à autre chose.
Alors quand elle était arrivée dans son dortoir la brune s'était précipitée dans les douches communes, complètement désertes à cette heure là.

Et heureusement pour elle.
Car elle s'était récurée comme jamais elle ne l'avait encore fait, mettant tout en œuvre pour effacer de sa peau et de son esprit les traces qu'avaient laissés ses ordures.
La brune était ainsi sortie de l'eau, la poitrine douloureusement rouge pour ensuite se vêtir d'une nouvelle chemise et d'un autre bas, fixant avec hargne le tas de vêtements sale qu'elle avait laissée sur le côté. Le commandant Joz lui avait grandement conseillé de les garder pour l'instant, lui affirmant que dans le pire des cas cela servirait de preuves suffisantes pour accuser les trois membres de sa flotte de ce geste.

La mémoire de papierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant