58. Jalousie

362 32 26
                                    

Seul les sons de grattement des plumes sur le papier et des respirations concentrés des pirates de Barbe Blanche brisait le silence presque parfait qui régnait en ce début d'après midi dans la salle de cartographie du Mobydick.

Le vent tiède de la zone climatique qu'ils étaient en train de parcourir dansait dans les mèches brunes de la jeune femme, l'un des hublots entrouvert juste à côté d'elle lui permettait de gouter à l'atmosphère extérieure.
Mais aussi et surtout cela apaisait sa nausée qui commençait à n'être plus qu'un lointain souvenir, le chatoiement léger des tissus et cartes sonnant tel la plus douce des mélodies à ses oreilles.

Seïri car c'était elle, poussa un léger soupir apaisé.
Tout cela n'était pas pour lui déplaire. Le calme.

Même si elle avait suivit avec attention les conseils d'Hélène, buvant elle ne savait plus combien de verres d'eau pour faire passer sa gueule de bois héritée de la fête de la veille elle restait quand même dans un état loin de la fraicheur.
Enfin cela n'avait rien d'étonnant.

L'infirmière rousse l'avait bien prévenue qu'il n'y avait pas de miracle.
Quand on buvait trop il n'existait qu'une seule solution, attendre que ça passe. Ou plus spécifiquement, en tout cas si on prenait les définitions plus scientifiques du phénomène, il fallait laisser le temps aux cellules éliminant les molécules d'éthanol de faire leur boulot ; la sortant ainsi de son état influencé par l'alcool.

La jeune femme grimaça à cette pensée.
Elle avait encore mal à la tête.
Il n'y avait donc pas besoin d'occuper les dernières neurones fonctionnelles de son pauvre cerveau avec des réflexions aussi inutiles.

D'autant qu'elle avait quand même, du travail à faire... ce qui expliquait d'ailleurs sa présence à elle, Perez, Malo et Den dans la salle de cartographie du navire amiral de Shirohige en ce début d'après-midi.
À cette pensée, l'ancienne membre des Spades tourna rapidement la tête vers ses camarades qui faisaient désormais partis du même équipage qu'elle. Enfin il aurait été plus juste de dire qu'elle les avait rejoint par le biais de son capitaine, et pas l'inverse.

La brune ne retint pas une grimace amusée en voyant l'état des trois hommes.
Elle n'était pas la seule à avoir un peu abusée de la boisson hier soir. À la seule différence qu'elle n'avait pas l'habitude... ce qui changeait en fait beaucoup de choses.

Car malgré leurs teints un peu plus pâles, des cernes bien marquées sur le visage de Den qui semblait avoir fait nuit blanche et leurs pupilles un peu trop rouges et écarquillés pour que cela soit naturel, ils allaient parfaitement bien.
Ou du moins leurs états de santé n'influençait en rien la qualité de leur travail. Ce qui n'était pas son cas à elle.

Seïri l'avouait sans honte, elle était trois fois moins efficace qu'à son habitude.
En même temps était ce sa faute si à la moindre action qu'elle entreprenait, son esprit douloureux dérivait soit vers la sensation désagréable toujours présente dans son bas-ventre, son envie de dormir sans jamais se relever de son lit ou tout simplement de fixer pendant deux heures les mouvements légers et subtiles des cartes sous le vent qui traversait tranquillement la pièce.

Non, ça ne l'était définitivement pas.
Bon peut-être que quand elle dérivait inconsciemment vers le goût des lèvres de son commandant contre les siennes, sa satanée voix roulant les R quant il lui avait dit de l'appeler "juste" Marco ou tout simplement vers sa chemise violette dans laquelle elle avait dormi et qui l'attendait toujours sur son matelas ; là c'était sa faute.

Mais l'erreur n'était elle pas humaine après tout ?...
Surtout qu'elle regrettait vraiment que son action ait était influencée par la boisson... et son comportement qui en avait découlé.
Elle n'avait jamais voulu lui montrer cette facette honteuse d'elle-même, surtout qu'elle l'avait découverte en même temps que lui. Elle craignait le moment où elle allait revoir le blond... et si jamais il lui annonçait qu'il voulait mettre un terme à ce dérapage sans jamais y donner de suite ?...

La mémoire de papierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant