Je ne pensais pas revoir un jour Aurora. Lorsque Sylvène l'avait bannie, j'avais dû accepter de la perdre pour espérer qu'elle puisse vivre. Sa survie était à ce prix. Il fallait que je reste forte pour mes autres enfants, il fallait que je vive dans le mensonge auprès des autres qui croyaient que ma fille aînée était morte. Puis je suis arrivée à Amelin et Yasuël m'a promis l'impossible. Au début, j'ai refusé de croire à cette chimère. Mais Aurora est pourtant bien revenue. Ma fille. Mon amour. Malgré mon statut d'otage, malgré les Créatures qui avaient droit de vie et de mort sur moi, je me suis de nouveau mise à espérer : mes trois enfants m'avaient été rendus.
Dame Lyliane de Trémel, Humaine
La chambre qu'on avait attribuée à Sylvène se situait au second étage de la tour, juste à côté de celle que partageaient sa mère et Faéline. Lorsqu'il en sortit au matin, il n'avait dormi qu'une poignée d'heures d'un sommeil bref et agité, mais se sentait déjà incapable de rester en place malgré sa fatigue à peine apaisée. Des seaux d'eau encore tiède ainsi que des vêtements propres avaient été déposés dans un minuscule cabinet de toilettes attenant aux chambres. Le Général se lava et se changea avec plaisir, heureux de se débarrasser de la crasse du voyage, avant de descendre à l'étage inférieur. En arrivant dans la bibliothèque, il découvrit Aurora, recroquevillée dans un des fauteuils encadrant la cheminée. Elle ne semblait guère plus reposée que lui.
« Mère et Faéline ne se sont pas encore réveillées, déclara-t-il en guise de préambule.
-Je sais. »
Ne sachant trop que faire, Sylvène remua les braises de l'âtre avec un tisonnier pour raviver les flammes.
« Démos et Gredan sont passés, il y a une heure, pour nous apporter à manger, l'informa la Loup-garou. Ils ont aussi laissé de quoi soigner ton bras.
-C'est bien aimable à eux... » grommela le Général sans se retourner.
Aurora se leva enfin de son fauteuil et étira son corps courbaturé.
« Il faut qu'on parle. »
Sylvène lui fit face.
« Tiens donc, tu as envie de me parler maintenant ?
-Ce n'est pas le moment de me provoquer ! Je n'ai pas la tête à ça aujourd'hui. »
Maussade, Sylvène ne chercha pas plus loin et s'assit lourdement. Il remarqua que de la nourriture avait été déposée sur la table basse, ainsi qu'un plateau chargé de matériel de soins. Sa sœur lui apporta ce dernier. Une écuelle d'eau, plusieurs fioles et des linges et des bandages propres y avaient été disposés. D'un geste sec, elle souleva la manche de sa nouvelle chemise. Sylvène tressaillit, mais ne dit rien. Il avait observé son bras dans la salle d'eau et était soulagé de voir que le coup de griffe qu'il avait reçu guérissait vite : la cicatrisation était en bonne voie. Son poignet, par contre, même s'il n'était pas cassé, restait encore gonflé. Aurora l'examina à son tour, versa un onguent sur sa peau et commença à le masser. Très vite, une agréable fraîcheur l'envahit.
« Il faut que tu m'aides à protéger notre famille », annonça la Loup-garou.
Sylvène, qui avait commencé à se détendre, se redressa, soupçonneux.
« Ne suis-je pas ici pour cela ?
-Alors ne les encourage surtout pas à me poser des questions.
-Ne crois-tu pas que c'est toi que tu cherches à protéger en agissant ainsi ? »
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AMBRÛME : Le sang des Trémel
FantasyÀ Ambrûme, il faut tuer pour ne pas être tué. La guerre entre Humains et Créatures fait rage depuis des siècles et chaque clan, chaque ville, tente désespérément de survivre. Sylvène de Trémel, général Protecteur, a fait don de sa vie pour protéger...