Chapitre 16 : Dans les griffes de Narda PARTIE 1

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Je ne connais pas la nature exacte de la menace que vont devoir affronter Lune et son frère. Je n'ai jamais pu m'approcher suffisamment du château du Prince : ma loyauté envers Yasuël est malheureusement une information difficile à dissimuler... Une chose est sûre : je suis heureux de ne pas être à leur place !

                                           Gredan, Loup-garou, Général de Yasuël d'Amelin


« Finalement, cela aurait pu être pire... »

Sylvène releva brutalement la tête et regarda sa sœur d'un air furibond.

« Tu trouves ? »

Sa main dérapa et il se coupa sur la lame de son sabre. Un peu de sang se mêla à celui des Créatures qui maculait déjà le métal. Il jura et son arme glissa de ses genoux et tomba sur le sol. Il ne se donna pas la peine de la ramasser.

« Vas-y, explique-moi ! Dis-moi comment cela aurait pu être pire !

-Jusqu'ici tu n'étais pas blessé, alors je ne vois pas de quoi tu te plains », répondit Aurora d'un ton rogue.

La Loup-garou massait la peau de son épaule, fraîchement cicatrisée et encore sensible.

« Sang noir ! Ce n'est pas du tout ce qui était prévu ! Notre approche de Haufort ne devait pas se dérouler ainsi !

-Aurais-tu préféré que ces Créatures me tuent et t'amènent elles-mêmes au Prince ? Je ne pense pas que tu aurais aimé le résultat...

-Bien sûr que non ! Mais comment espères-tu convaincre les Créatures du Prince avec trois cadavres sur les bras maintenant ?

-Il nous suffit de gagner du temps. Nous allons dissimuler les corps. »

Le calme de sa sœur exaspérait Sylvène. Lui, au contraire, avait besoin d'évacuer la tension des dernières minutes. Ramassant son sabre d'un geste rageur, il se remit à fourbir sa lame avec fébrilité. Tout était allé trop vite.

Aurora et lui étaient arrivés la veille aux abords de la région de Narda. La traversée de la Plaine leur avait pris dix-sept jours. Dix-sept journées interminables qui avaient mis sa patience à rude épreuve tout le long du voyage. Sylvène n'aurait jamais cru dire cela un jour, mais leur périple était très vite devenu étrangement monotone. Il fallait dire que cheminer avec deux Loups-garous pour gardes du corps facilitait grandement la traversée des terres sauvages... 

Aurora l'avait laissé seul en journée, le rejoignant chaque soir à son campement. Elle avait par contre fait son apparition à chaque fois que des Créatures avaient rôdé un peu trop près de lui. Par trois fois ils avaient dû se battre ensemble pour repousser des ennemis et ceux-ci n'avaient pas fait le poids face aux armes du Général et à la force brute de la Loup-garou. Sylvène savait également que sa sœur protégeait ses arrières, dissuadant au maximum les Créatures de l'approcher pour lui permettre d'avancer sans encombre. 

Il ne savait pas si Meryl se joignait à elle dans ces cas de figure : il ne l'avait vu qu'en de rares occasions. Le compagnon d'Aurora se contentait de se montrer brièvement sous sa forme de Loup. Il n'était venu qu'une seule fois les rejoindre à la nuit tombée, pour leur annoncer qu'une bande de Vampires les avaient pris en chasse, et sinon restait discret, ce qui n'était pas pour déplaire à Sylvène. Le Général s'était presque senti en sécurité durant le voyage, ce qui était un sentiment des plus déroutants. Ce qui lui avait le plus manqué était une présence amicale à ses côtés.

Chaque jour avait été identique au précédent et la quasi-solitude que vivait Sylvène jusqu'au coucher du soleil avait lourdement pesé sur son moral. Seul, il ruminait sans fin les décisions de Yasuël et, quand Aurora lui faisait grâce de sa présence, les sujets de conversation n'étaient pas plus légers. La Loup-garou ne semblait pas vouloir profiter du voyage pour renouer avec lui. Si les reproches avaient cessé de pleuvoir, leurs conversations avaient essentiellement tourné autour de leur famille. Pour être honnête, c'était l'un des seuls sujets qui les avait réunis depuis leur départ d'Amelin. Ils avaient débattu durant des heures du meilleur moyen d'échapper à l'influence de Yasuël et de libérer leur mère et leur sœur, sans toutefois trouver de solution satisfaisante. Les deux Trémel échangeaient leurs idées pour tromper la vigilance de l'Hybride et de ses sbires. Si leurs discussions leur avaient permis de retenir plusieurs plans d'action, aucun ne semblait réellement satisfaisant pour quitter Amelin sans heurts. Pour le moment, ni Aurora ni Sylvène n'avaient été convaincus par les différentes solutions évoquées. C'était un problème épineux et sans fin. 

AMBRÛME : Le sang des TrémelOù les histoires vivent. Découvrez maintenant