Ah vous les Humains ! Depuis le temps que dure notre guerre, je devrais être habitué à votre présence, mais je dois avouer qu'après plus de trois siècles d'existence, je suis toujours aussi perplexe en ce qui vous concerne. Vous êtes bornés, obstinés, mal organisés. Vous êtes plus lents, plus vulnérables et bien plus fragiles que nous. Vous êtes indubitablement la race la plus faible d'Ambrûme. Pourtant vous trouvez encore la force de nous résister et de survivre. C'est impressionnant ! Vous ne manquez pas de courage, je dois bien vous accorder cela. Pour le reste, vous êtes des sots. Vous nous craignez, vous tremblez devant nous ! Sanguinaire comme un Indissociable, fourbe comme un Vampire, affamé comme un Loup... Selon vous, nous ne sommes que des monstres, agissant pour calmer nos instincts carnassiers. Vous nous voyez comme des bêtes et c'est ce qui finira par vous perdre, car nous sommes tellement plus que cela ! Soyons réalistes un instant : vous n'êtes que des fétus de paille sous le vent et une bourrasque un peu plus forte que les autres finira par tous vous briser. Estimez-vous chanceux d'avoir encore l'argent pour nous repousser : sans ce métal nous aurions réussi à vous éradiquer depuis longtemps. Avez-vous seulement remarqué mes frères et mes sœurs qui déambulant librement dans les rues de votre cité cette nuit ? Si vous vous pensez à l'abri derrière vos hautes murailles, alors votre naïveté est affligeante. Dormez bien !
Démos, Vampire, général de Yasuël d'Amelin
Pour une fois que la nuit était calme, même s'il commençait à faire froid, on n'allait pas s'en plaindre ! Il n'y avait aucun nuage et la lune éclairait suffisamment les alentours pour pouvoir faciliter la surveillance. C'était une bonne chose : les Créatures attaquaient rarement dans ces conditions. Elles préféraient attendre le brouillard ou la pluie pour pouvoir se rapprocher des cités sans être vues. Rampant alors sournoisement jusqu'au pied des remparts, elles attaquaient, avides de violence et de sang. Cette nuit au moins, si l'une d'elle se risquait en terrain découvert, elle serait immédiatement repérée. Cette pensée rasséréna Dayle. Il rajusta autour de son cou la grosse écharpe en laine rouge que sa mère lui avait offerte pour l'hiver à venir. La bise était glaciale, mais si le temps restait aussi clément, les dernières nuits avant la prochaine pleine lune seraient tranquilles. Il pourrait même rentrer dormir chez lui au lieu de grappiller quelques heures de sommeil à la caserne entre ses tours de garde. Le jeune homme se détendit légèrement, plia et déplia ses doigts devenus raides à force de se crisper sur le bois de son arbalète. Il observa les alentours d'un œil attentif.
Malgré l'obscurité, il connaissait par cœur chaque détail, chaque relief du paysage qu'il côtoyait depuis sa naissance. Devant les murailles de la cité s'étendait un vaste périmètre de terre brûlée, vide de cultures et de bâtiments, destiné à anticiper l'approche des Créatures. Une cinquantaine de mètres plus loin, apparaissaient les premiers champs, que les fermiers préparaient depuis quelques jours pour les ultimes semailles de l'année. Au-delà, c'étaient les territoires sauvages, que seules des patrouilles de Protecteurs lourdement armées ou quelques chasseurs de primes un peu trop téméraires, osaient parcourir. Trois semaines plus tôt, le hasard des affectations avait amené Dayle et sa garnison au mur nord. Du chemin de ronde, il pouvait apercevoir une des quatre portes de la cité, ainsi que la route pavée qui serpentait entre les terres brûlées et les champs, pour disparaître à l'horizon. À six jours de cheval, plus loin encore au nord, se trouvait la cité de Valvère. Dayle n'y était allé que deux fois : la première pour assister au mariage d'un lointain cousin, la seconde quelques mois auparavant pour escorter un convoi de marchands avec d'autres Cadets. Il n'aimait pas quitter sa cité. Aurore était une des treize grandes villes du royaume humain qui résistaient encore aux Créatures. Le jeune soldat y était né, y avait grandi et n'imaginait pas un seul instant vivre dans un autre endroit. Contrairement à certains de sa promotion qui espéraient devenir dans moins d'un an des Protecteurs itinérants, en charge de la sécurité des routes et des fermes fortifiées, lui ne souhaitait qu'une chose : protéger jusqu'à son dernier souffle la ville qui l'avait vu naître.
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AMBRÛME : Le sang des Trémel
FantasíaÀ Ambrûme, il faut tuer pour ne pas être tué. La guerre entre Humains et Créatures fait rage depuis des siècles et chaque clan, chaque ville, tente désespérément de survivre. Sylvène de Trémel, général Protecteur, a fait don de sa vie pour protéger...