J'ai horreur des Indissociables. Ils sont petits, extrêmement vicieux et agressifs, et en plus ils ont un goût épouvantable ! S'il y avait une race de Créatures que j'aimerais un jour voir disparaître, ce serait bien celle-ci. En plus, comme si on n'avait pas assez d'ennuis avec eux, ils se débrouillent bien souvent pour accompagner les Spectres dans leurs errances, dans l'espoir d'obtenir les restes de leurs chasses. Franchement, ce n'est pas un cadeau non plus...
Aurora de Trémel, Loup-garou
Il était agréable de laisser la Plaine derrière soi. Neuf jours après avoir quitté le territoire des Pierres Silencieuses, Sylvène avait enfin l'impression de toucher au but. Il ne lui restait plus qu'un sous-bois à traverser avant d'atteindre les montagnes. Dans son esprit embrumé de fatigue, il n'avait hâte que d'une chose : arriver à destination et en finir avec cet interminable voyage. Les dangers d'Amelin lui semblaient pour le moment dérisoires face à ce qu'il venait de vivre. Aurora l'attendait auprès des premiers arbres. La jeune femme semblait épuisée. De grands cernes marquaient ses yeux et ses vêtements déchirés laissaient entrevoir un corps marbré d'hématomes. Des morsures guérissaient sur ses bras. Du coin de l'œil Sylvène en aperçut une autre, beaucoup plus importante, sur son ventre. Devant son regard interrogateur, Aurora haussa les épaules.
« Je ne pense pas que tu aurais envie que je te raconte. »
Elle s'ébroua tel un animal, secouant ses longs cheveux gorgés de pluie.
« C'est une bonne chose que tu aies survécu à cette nuit. Au moins Yasuël sera content.
-Combien de jours avons-nous encore ?
-Deux ou trois, je pense. On se rapproche. Je vais rester avec toi aujourd'hui : beaucoup de Loups rôdent encore dans le coin et leurs intentions ne sont pas des plus amicales.»
Le sous-bois était composé de résineux. Les aiguilles des pins et des sapins capturaient la pluie et la faisaient retomber en fines gouttelettes glacées sur les deux voyageurs. Par deux fois Sylvène et Aurora passèrent près de cadavres de Loups en piteux état, lacérés et à moitié démembrés. La pleine lune faisait aussi de nombreuses victimes parmi les Créatures, ce qui était au moins une consolation pour le Général. Il profita d'une courte pause pour vérifier que son équipement était à l'abri de l'humidité. Il ne lui restait qu'une poignée de balles d'argent, cinq carreaux d'arbalète et un de ses pistolets donnait des signes de fatigue. Repensant au Loup qu'il avait achevé un peu plus tôt dans la journée, il se maudit intérieurement d'avoir gâché une de ses munitions pour cela. Son impulsivité finirait par lui coûter la vie !
« J'espère que tu n'as pas prévu d'autres mauvaises rencontres avant notre arrivée chez Yasuël ! » grommela-t-il à l'attention de sa sœur.
Aurora le toisa sans parvenir à dissimuler son agacement.
« Je ne peux pas prévoir tous les rebondissements de ce voyage, Sylvène. Toutefois, je pense avoir trouvé une solution à ton problème. »
Elle se remit en marche et il la suivit, rendu légèrement inquiet par ses paroles. Quelques minutes plus tard, il découvrait un troisième cadavre de Créature. Cette fois-ci le grand Loup s'était effondré contre le tronc d'un pin et était couvert d'aiguilles et de sève. Ses yeux jaunes fixaient encore Sylvène avec férocité dans la mort. Sa gueule était ouverte et du sang gouttait lentement de ses crocs. Pendant un instant, le Général se demanda pourquoi il trouvait la dépouille étrange, puis il vit les impacts de balles d'argent qui avaient transpercé sa peau. Un profond malaise l'envahit tandis que les cris des Humains agonisants lui revenaient aux oreilles. Il recula d'un pas et son pied buta contre une pierre. Machinalement il baissa le regard. Ce n'était pas une pierre.
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AMBRÛME : Le sang des Trémel
FantasyÀ Ambrûme, il faut tuer pour ne pas être tué. La guerre entre Humains et Créatures fait rage depuis des siècles et chaque clan, chaque ville, tente désespérément de survivre. Sylvène de Trémel, général Protecteur, a fait don de sa vie pour protéger...