Shitty transmigration

Chapitre 53 - Éclairer sa lanterne

Après plusieurs minutes de silence de la part du père d'Alexander, je me décide à quitter la pièce. Après tout... Il semble avoir matière à réfléchir. C'est là que je tombe sur Duncan, qui n'a pas bougé de l'endroit où il se trouvait et qui a les yeux perdus dans le vide, comme quelqu'un qui est là, sans être là.

« Alors, on espionne ? » je lance à ce dernier, qui est toujours derrière la porte.

Il sursaute presque, comme se rendant compte seulement maintenant que je suis là. Il semble tellement troublé par quelque chose qu'il ne relève même pas le ton moqueur que j'ai employé avec lui. Il est exactement comme le père d'Alexander il y a quelques secondes, comme s'il était en train d'avoir une révélation divine ou je ne sais trop quoi....

Je ne savais pas que faire la morale à quelqu'un pouvait provoquer ce genre de réactions.

C'est pas comme si j'étais un foutu oracle en plus.

Car contrairement à mes pairs catapultés dans des romans d'amour, je n'ai été missionnée par aucun espèce de dieu. Je n'ai pas vu la lumière avant mon passage ici, je n'ai reçu aucun pouvoir et aucun message d'une quelconque entité supérieure... C'est à croire que j'ai été envoyée ici juste comme ça.

Et c'est peut-être le cas.

Peut-être que les gouverneurs de ce monde ont voulu le sauver en transportant un envoyé divin jusqu'ici, mais qu'ils se sont foirés ?

Et tout ça serait tombé sur moi et ma chance légendaire.

Au début, je me suis dis que j'avais peut-être une sorte de mission dans ce monde, qu'on m'avait envoyé ici pour une raison et que j'allais finir par la trouver, mais même après plusieurs mois, rien ne m'est parvenu. J'ai bien essayé de hurler « Heal » ou « Fire Ball » en tenant la main tendue devant moi, mais rien ne s'est produit.

J'ai juste eu l'air stupide.

Et me voilà maintenant là, dans la maison du héros de l'histoire, à être le foutu standard téléphonique des gens sans amis et à régler les problèmes des autres.

C'était pas tout à fait ce que j'imaginais...

J'ai pensé plusieurs fois en lisant mes récits préférés à ce que je ferais si ce genre de choses m'arrivaient, mais maintenant que j'y suis... Ce n'est plus si incroyable.

Mes yeux glissent sur Duncan qui fixe quelque part dans le vide et sur Harry qui marmonne en se frottant le visage derrière la porte.

Je suis devenue une foutue baby-sitter.

Je soupire profondément, avant de passer la main dans mes cheveux légèrement en bataille et de secouer la tête.

« Ca va pas ? » je lance à l'homme qui se tient à côté de moi en silence, un peu à contre cœur.

Il relève les yeux sur moi, bien plus sérieux que d'habitude.

« Si ça va. »

Menteur, ai-je envie de rétorquer, sans le pouvoir.

Après tout, je ne vais pas le forcer à parler, s'il n'en a pas envie. Ce n'est pas mon truc de tirer les vers du nez de ceux qui refusent catégoriquement de se livrer. Alors je hausse les épaules, avant de passer à côté de lui pour retourner dans le salon, où Alexander, Damon et Ally sont maintenant tombés dans le silence, se contentant de scruter leur téléphone.

« Vous en avez mis du temps. » note Alexander, qui semble visiblement grognon, comme un enfant à qui on aurait refusé une sucette.

Je souffle du nez.