Tu veux de la coke ?

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Cela fait maintenant plusieurs semaines que je suis immergé dans le quotidien pourri d'un pauvre mec paumé dans les mauvais quartiers de la ville. Après quelques jours d'observation j'ai accosté un dealer, que j'ai réussi à convaincre de me filer une partie de sa marchandise pour que je la vende pour lui. Me voilà donc revendeur de cocaïne pour un gars qui se fait appeler J. Je ne suis pas ce que l'on pourrait qualifier de très bon dealer de drogue. Au début j'arpentais les rues et interpellais de temps en temps quelqu'un avec une phrase débile genre : "Tu veux de la coke?" Je recevais des regards choqués, parfois même des rires ! Comme si dealer était drôle !

Depuis une semaine j'ai amélioré mes méthodes, et je parviens à refourguer toutes les doses que J. me file. Je suis dégoûté par ce que je dois faire pour gagner la confiance de la rue. Je sais pertinemment que je fournis des pauvres gens comme ma mère, et que l'argent de la drogue nourrit des criminels, paie des armes, alimente différents trafic ignobles. Mais je dois en passer par là pour mener à bien ma mission, et ce n'est que le début. Je vais sûrement devoir fermer les yeux sur bien pire pour faire tomber un maximum de ces salauds !

Alors que j'approche un nouveau secteur, que je sais être le début du territoire des Gorilles, je m'approche d'un couple qui semble être des junkies : maigres, cheveux longs et sales, vêtements miteux, yeux cernés et rouges.

"Vous avez besoin de quelque chose ?" je leur demande en leur montrant l'intérieur de ma poche de blouson.

La fille d'une trentaine d'années, bien que ce soit difficile de lui donner un âge tant son visage est marqué par la fatigue et l'abus de substances, regarde ma veste et ses yeux s'illuminent.

" Carrément, hein Max ? répond-elle en se tournant vers le type qui est resté assis, le regard dans le vague

- J'ai plus un radis, tire-toi mec, grogne le dénommé Max.

- Allez bébé s'il te plaît, j'en ai trop besoin.

Elle insiste mais le gars se contente de faire non de la tête sans même la regarder.

- Je fais pas crédit, je me casse".

J'ai à peine le temps de finir ma phrase et de faire quelques pas que je me sens violemment tiré en arrière par deux hommes qui m'ont tout l'air d'être des malfrats payés pour faire régner la terreur dans les rues. Ils m'entraînent dans une ruelle avant que le premier, tatoué sur toutes les parties visibles de son corps, crâne rasé compris, me donne un violent coup de poing dans le ventre.

Je grimace, grogne mais ne dis rien.

"Alors le guignol, me dit le deuxième loubard, un grand blond, costaud, le regard noir et mauvais, qui tient un couteau dans sa main droite, pointé dans ma direction, tu t'es trompé de quartier pour vendre ta merde, ici c'est le territoire des Gorilles. Et les Gorilles ne plaisantent pas avec leur territoire.

Ça y est, je suis repéré, c'est le moment où je ne dois pas foirer si je veux espérer rejoindre le gang.

- Eh les mecs doucement, je réponds en feignant d'être perdu, les mains levées, je suis nouveau en ville, je connais pas encore bien le fonctionnement. Je ne veux pas empiéter sur le territoire de quiconque.

- T'as intérêt à te souvenir qu'à partir d'ici et jusqu'à la pointe nord de la ville, tu rases les murs et tu fermes ta gueule, me répond le mec au couteau. Non mieux, tu remets jamais les pieds dans le secteur. Et avec Ernie on va t'aider à bien te mettre ça en tête."

Il échange un coup d'œil et une sourire qui ne dit rien qui vaille avec Ernie, et je sens que je vais dérouiller. Normal, je m'attendais à ces méthodes. Je les laisse se déchaîner 30 secondes, en prenant seulement garde à ne pas avoir de blessure importante. Heureusement, ils sont simplement des brutes qui prennent leur pied en tabassant des pauvres types dans mon genre dès qu'ils en ont l'occasion. Je constate qu'ils kiffent me taper, mais qu'ils sont désordonnés et portent peu de coups impactants. Ils frappent fort mais sans réfléchir. Je compte : 28, 29 et 30. J'esquive le coup suivant et donne un coup de coude dans le ventre d'Ernie qui me ceinture. Deux secondes supplémentaires et je suis à distance de leurs poings. Les deux sont ahuris, me regardent, puis se regardent.

"Bon les gars je pense que vous vous êtes assez défoulé, le message est passé. On n'empiète pas sur vos plates-bandes.

J'utilise un ton très décidé, en les regardant bien en face.

- Le truc, je reprends, c'est que j'ai envie d'intégrer votre club. Depuis que je suis arrivé à Sacramento j'entends parler de vous, que les Gorilles sont les rois de la ville, que tout le monde les craint et qu'ils ont tous les pouvoirs. Je veux faire partie de tout ça ! J'en ai ai assez de vendre de la came de merde pour gagner à peine de quoi payer mon loyer.

- J'ai déjà entendu parler de toi, me réponds le mec au couteau, et à ce qu'on m'a dit t'es en revendeur de merde, tu crois que la coke ça se deale comme on refourgue du poisson sur un étal de marché. Et puis t'as carrément pas la dégaine d'un dealer de gang, t'as juste l'air d'un mec paumé, et pas assez coriace pour nous rejoindre.

- Laisse-moi une chance, vous devez bien avoir besoin de gars pour autre chose que le deal.

- Pas pour toi, je te sens pas. Dégage avant qu'on t'achève, avec ça cette fois."

Il me montre son couteau avec un air menaçant. Je change de tactique, je hausse dédaigneusement un sourcil pour lui montrer que ses menaces me font ni chaud ni froid. Il grogne, et Ernie, qui pense m'attraper par surprise, bondit par derrière. Je bloque son bras avant qu'il ne s'enroule autour de mon buste, et en utilisant son élan je le fais facilement basculer et tomber au sol. Je le bloque, mon genou contre sa gorge, maintenant ses bras le long de son corps. Avec ma jambe gauche, je fauche le deuxième Gorille qui tombe sur le cul. Je peine à retenir de rire devant leur mine abasourdie, et je continue à avancer mes pions.

"Toujours pas intéressés ? Je dois pourtant avoir un peu de talent pour arriver à rétamer en aussi peu de temps deux Gorilles de votre trempe...

- Toi tu vas voir, réponds le mec au couteau en se relevant, profondément vexé par mes paroles et sa situation.

- Arrête Fox, lui dit alors Ernie, encore sous mon emprise. Il n'a pas tort, il vaut mieux que Gor le voit et décide s'il le met à l'épreuve ou s'il dégage.

- T'es dingue, on va pas faire perdre son temps au boss pour cet enflure. Il ne résistera jamais au test de toute façon.

- Réfléchis, si Gor décide de lui faire passer, tu le verras échouer, et donc crever, et s'il décide qu'il n'en vaut pas la peine, je suis sûr qu'il te laissera le tuer toi-même ! T'es gagnant dans les deux cas.

- Ouais, pas faux.

- Sauf si je réussi le test....

- Aucune chance, ricane Fox, tu seras un homme mort d'ici demain !

- Je prends le risque, amenez-moi à votre patron.

- Je sens que cette journée va devenir très intéressante," conclut Fox, avant de repartir vers la rue où ils m'ont coincé.

Je les suis jusqu'à leur voiture, un SUV noir aux vitres teintées. Tiens, ils sont peut-être plus importants que je le pensais dans l'organisation. Sans ajouter un mot, nous montons à bord, Ernie au volant. Ils ne prennent même pas la peine de me bander les yeux, le quartier général des Gorilles n'est peut-être pas un lieu tenu secret. Ou alors ils sont tellement persuadés que je ne vais pas survivre que peu importe que je connaisse son emplacement. Oui, ce doit être sûrement ça, mais ils se trompent, je compte bien rester vivant et intégrer leur clan de dégénérés, pour mieux les envoyer tous en prison.

Moins de 10 minutes plus tard, nous arrivons devant un large bâtiment de quatre étages, qui pue le luxe. Eh bah il se fait pas chier le Gor, il s'est offert un sacré immeuble pour gérer ses affaires. Je ne suis jamais venu dans cette partie de la ville, c'est d'ailleurs pour ça aussi que j'ai été choisi pour cette mission, je n'avais jamais approché les membres du gang de près ou de loin. Mais j'ai mémorisé sans problème le trajet que nous venons de faire et je saurai très facilement expliquer où se trouve le QG.

Étape suivante : rencontrer le grand boss et faire bonne impression, j'espère que mon plan va fonctionner.

Sous couvertureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant