Déclaration

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Je sors de la chambre et j'entends Rachel qui pleure à chaudes larmes. Elle ne tente plus d'étouffer le bruit de ses pleurs, se pensant seule, et je la vois à la lueur des réverbères de la rue, prostrée sur le canapé. Elle est assise, les genoux repliés contre sa poitrine, ses bras enserrant ses jambes, son corps se balançant d'avant en arrière.

Alors que je me pensais au summum du chagrin, la voir ainsi me fait l'effet d'un coup de poing en pleine poitrine. Je suis un vrai connard, c'est par ma faute qu'elle est dans cet état. Avec ses sanglots, elle ne m'a pas entendu, et elle ne me voit pas non plus m'approcher, car elle a la tête baissée dans ses bras. Elle sursaute quand je m'assieds à côté d'elle, le sofa s'enfonçant sous mon poids lui faisant prendre conscience de ma présence.

" Tu viens pour me mettre à la porte parce que je fais trop de bruit ? me demande-t-elle sans lever le menton. Ou peut-être que tu as oublié de me dire quelque chose ? Vas-y, au point où on en est je vais encaisser.

- Non en réalité je suis venu te dire que je suis désolé, répondis-je doucement en la prenant dans mes bras. Je regrette ce que je viens de dire, c'était injuste.

Elle ne me repousse pas, se redresse et me regarde dans la pénombre, avec ses yeux de chien battu se demandant s'il va vraiment avoir droit à une caresse.

- Je m'en veux de t'avoir fait de la peine, poursuivis-je, mais je suis vraiment fatigué, et il y a aussi le fait que j'accuse le coup de plusieurs mois d'une infiltration vraiment difficile, sur le plan physique mais aussi émotionnel.

Je m'arrête un moment, tentant de rassembler mes pensées. J'hésite à tout lui expliquer, et étonnement elle laisse le silence se poursuivre, elle qui est tellement loquace habituellement. Et puis merde, c'est ma meilleure amie, je viens de l'envoyer chier de la pire manière, bien sûr qu'elle mérite de comprendre. Je dois tout lui raconter, c'est ce que j'ai décidé il y a une minute, même si ça signifie éteindre en elle tout espoir d'obtenir un amour romantique un jour avec moi. Je soupire un bon coup avant de me lancer.

- Voilà, je vais te dire tout ce que j'ai vécu durant ma mission secrète, et tu vas comprendre pourquoi j'ai autant changé. Mais avant tout je veux que tu saches que tu comptes beaucoup pour moi.

- Toi aussi, James, tu comptes beaucoup pour moi.

- Attends, je l'interromps, ne fais pas ça. Ben m'a fait comprendre que tu nourrissais sans doute des sentiments pour moi, mais s'il te plaît, ne dis rien. Pour moi tu seras toujours ma petite sœur de cœur et rien d'autre, je ne pourrais jamais envisager une autre relation avec toi, alors ne dis rien de plus.

- Pourtant il le faut, j'en ai besoin, me répond Rachel. Après j'écouterai ton histoire mais maintenant je te demande de toi m'écouter. Cela fait trop longtemps que je tais ce que j'éprouve, et j'ai besoin de te le dire, même si ce n'est pas réciproque.

Putain, je voulais éviter ça mais je ne peux pas me montrer égoïste et lui dire que je ne veux pas l'entendre. Alors je me tais, je fixe mon regard dans le sien, me cale confortablement contre le dossier du canapé, pose mon bras sur l'accoudoir et ajuste l'autre autour de ses épaules, je hoche la tête pour lui signifier qu'elle a toute mon attention et j'écoute sa déclaration. Rachel baisse le regard un instant, cherchant peut-être le courage d'affronter le mien, puis ses yeux me regardent de nouveau, avec une réelle détermination.

- Voilà James, nos chemins se sont croisés au pire moment de nos existences respectives. Dans ce pensionnat de merde, on était de pauvres enfants livrés à eux-mêmes, chacun faisant tout pour préserver ses maigres possessions et un minimum de dignité. Mais tout était humiliation, c'était l'horreur.

Sous couvertureOù les histoires vivent. Découvrez maintenant