CHAP 7

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Ce vol fût une incroyable révélation car pour la première fois, je me sentis sûre de moi en prenant seule cette initiative.

L'Aigle battait l'air de ses ailes puissantes, me procurant une sensation de liberté absolue. Bien à l'abri dans son corps, nos cerveaux en connexion, je le laissai se diriger par lui-même dans un ciel sans nuage, où il n'y avait que le scintillement de petites lumières blanches pour le décorer.

Nous survolâmes des champs, des bois, des villages où seule la route principale était éclairée.

Puis nous aperçûmes au loin un petit point de lumière dans la noirceur de la nuit ; nous approchions de Thora.

Elle brillait de mille feux. Toutes les maisons accrochées au flan de la colline étaient pourvues de lumière, tout comme la collégiale, la rendant encore plus imposante que de jour.

Arrivée à celle-ci, nous prîmes le chemin du jour de ma première transformation, mais en sens inverse et lorsque nous pénétrâmes dans le petit bois jouxtant le terrain où il n'y avait pas si longtemps encore je faisais mes entraînements, je sentis la présence de Raoul. Il était proche. Il venait à ma rencontre. Nous nous posâmes au sol, et je repris le dessus sur l'animal.

Salut Pépé !

— Ne m'appelle pas comme ça, je te l'ai déjà dit ! pesta-t-il.

Tu parais pas surpris de me voir ?

Je t'ai sentie arriver, j'ai eu le temps de me remettre de ma surprise. Dis-moi plutôt pourquoi tu es là, il se passe quelque chose ?

Je lui appris les mauvaises nouvelles concernant la grand-mère et il ne vit aucun inconvénient à repousser notre week-end.

— Je te parlerai des graines la prochaine fois.

— Les graines ? Celles qui sont dans le sachet ?

— Oui, il faut que je te donne quelques explications en ce qui les concernent. Elles ne sont pas à utiliser n'importe comment mais nous verrons ça lorsque tu reviendras !

Les graines faisaient partie du lot d'objets qu'il m'avait remis le lendemain de ma première transformation. Elles ne devaient servir qu'en cas de grossesses car ces dernières s'avéraient être dangereuses pour l'enfant, comme pour la mère, à cause de notre satané gène.

— Tu auras d'autres choses à m'expliquer ?

Je voulais une réponse affirmative, mais à son air devenu subitement triste, je compris que je ne l'aurais pas.

— Tu seras à même de te débrouiller toute seule.

Aucun mot, aucune réaction ne me vint. Son départ à lui aussi était proche...

Ne sois pas amère, Lili. Je ne suis que de passage dans ta vie, je ne te l'ai jamais caché. Nos chemins doivent se séparer bientôt, mais je ne partirais pas tant que je ne serais pas certain que tu puisses continuer toute seule !

— De passage, relevai-je subitement irritée, comme ma mère ou comme mon frère ? Quand tu me disais de quitter les Dhoms, c'était une façon de me dire que eux aussi ne seront que de passage dans ma vie, c'est ça ? Dis-moi Raoul, c'est comment une vie avec que des gens de passage ? A quoi ça sert de s'attacher, de tisser des liens si forts, si c'est pour se retrouver seul au bout du compte ?

Ce fut au tour de Raoul d'être sans réaction. Il demeura interdit, mais son œil atrophié et à moitié fermé me fendit le cœur et me fit vite regretter la dureté de mes paroles. Je repris, mais la tristesse remplaça la véhémence :

LES AILES DE MA VIE 2  Au travers de l'autreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant