CHAP 28

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Falco nous réveilla en frappant fort à la fenêtre de la caravane.

— Debout là-dedans ! Le père veut nous voir !

Gino, surpris, maugréa quelques paroles incompréhensibles et s'étira de tout son long.

— Qu'est-ce qui lui prend de gueuler comme ça ? Et pourquoi il veut nous voir l'oncle ? ajouta-t-il en baillant.

Avant de lui en expliquer la raison, je lui demandai :

— Est-ce que t'as déjà eu à faire aux Nuggets ?

Amusé par ma question, il se tourna vers moi avec son sourire à fossettes à me faire tomber à la renverse.

— Pourquoi tu me demandes ça ?

— Réponds, s'il te plaît.

— Qui n'a pas eu à faire à eux au moins une fois dans sa vie ?

— Est-ce qu'ils ont tes empreintes ? insistai-je gravement.

— Ben oui ! me répondit-il, comme si, tout à coup, j'étais devenue complètement demeurée.

— Guito veut nous voir, parce qu'hier, il y a eu deux morts à la foire.

— QUOI ? T'es sûre ?

Malheureusement, je l'étais.

— Viens, lève-toi ! me lança-t-il en sautant dans son pantalon de survêtement. Si ce que tu dis est vrai et, si c'est ceux d'hier, on est mal. Surtout les cousins !

Evidemment, lui aussi s'inquiétait plus pour Daven et Falco, que pour lui-même. Vif comme l'éclair, il sortit de la caravane, laissant la porte se refermer toute seule. Alors que je me levai pour m'habiller, il l'ouvrit à nouveau et passa la tête dans l'entrebâillement, me faisant sursauter. Le large sourire qui se dessina sur son visage lorsqu'il me vit dans le plus simple appareil en disait long sur ce qu'il pensait du spectacle. Il appréciait, ça ne faisait aucun doute. Nullement gêné, il me balança tout de go :

— C'était juste pour te dire, faudra que tu penses à mon oreiller. Ca fait juste un pour deux ! Et sors pas comme ça, mets quelque chose sur toi !

Quand il fut parti, je m'habillai rapidement, retapai le lit, puis me dirigeai vers la sortie. Mais en passant près de l'évier, quelque chose attira mon attention. Une grande et longue plume noire était posée dedans. Elle dépassait de chaque côté. Gino avait dû la ramasser, quand prise de panique je m'étais enfuie à son approche.

Je la glissai sous les coussins qui nous faisaient office de matelas, avec la ferme intention de la récupérer plus tard. Je ne devais laisser aucune trace de mon autre apparence.

Quand j'entrai dans la maison, tout le monde était déjà là. Les échanges verbaux allaient bon train, chacun y mettant son grain de sel. En m'apercevant, Kimy me fit signe de la tête et je m'installai près d'elle.

— Guito en a entendu parler, me dit-elle dans le creux de l'oreille.

— Aux infos ?

— Non, on les écoute à chaque fois qu'elles passent et y a rien qui ressort. C'est au bar qu'il l'a su. Il y est allé pour acheter le journal et voir si c'était marqué et il a entendu Amoi-amoi qui en parlait.

Amoi-amoi était l'alcoolique de Mesmina. On le surnommait ainsi car lorsqu'il était très imbibé, c'est-à-dire du premier janvier au trente et un décembre de chaque année, il avait la manie de crier : «A moi les murs, la terre m'abandonne ! A moi, à moi...» Et ce, en s'agrippant à tout ce qui se trouvait à portée de mains.

LES AILES DE MA VIE 2  Au travers de l'autreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant