Chapitre 5 : Le chaperon rouge et le loup violacé

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Hermione dormit peu cette nuit là. Comme la plupart des filles dans son dortoir, et comme la plupart des grands enfants du monde. Chacun était pressé de recevoir ses cadeaux, chacun conjecturait à leurs propos. Les yeux posés sur ceux qu'elle allait offrir, la rouge et or entortillait machinalement le ruban de l'un d'eux autour de son doigt. Son esprit était ailleurs. pour la cinquième fois, elle repassa en revue les destinataires de ses cadeaux. Ses parents, Harry, Ron, Ginny, Molly et Arthur Weasley... Luna, Neville et Seamus, Remus... Hagrid ... Et il y en avait un autre, un dernier, sur lequel aucun nom n'était écrit. Elle le regarda longuement avant de soupirer, et en caressa distraitement l'emballage.

Se laissant tomber sur le dos, elle enfouit sa tête dans l'oreiller et ferma les yeux. Peut être aurait elle sa réponse aujourd'hui ? Et alors il ne serait pas trop tard...

Mais Hermione se voyait mal aller rendre visite à Severus Rogue aujourd'hui. Après ses derniers mots assassins, sa présence à la fête la veille tout de même, elle ne voulait pas ajouter à sa souffrance, même si elle serait un bon défouloir pour lui.

Elle posa son bras sur son visage, pour cacher ses yeux du soleil qui se levait. Dans quelques heures, elle devrait distribuer ses cadeaux, tout en se demandant encore si elle donnerait celui qui ne portait pas de nom. La jeune femme grogna. Elle sentait qu'elle allait être d'une humeur de chien aujourd'hui. Elle ne dormait pas beaucoup depuis quelques jours, et ne pas arriver à ses fins rajoutait à son irritation.

Lassée de toutes ses réflexions, et consciente que le sommeil ne viendrait pas, la jeune femme décida de se lever. Après s'être douchée, elle s'habilla très chaudement, attrapa son cadeau sans nom et sortit le plus silencieusement possible de la salle commune, souhaitant un joyeux noël à une grosse dame grognon.

Elle descendit les escaliers capricieux du château et se retrouva devant l'immense porte du château. Vérifiant qu'il n'y avait personne, elle l'entrouvrit juste assez pour passer, espérant que personne me l'entende grincer. Une fois dehors, elle poussa un profond soupir, fière d'avoir achevé son périple sans encombre. Enfouissant son menton dans son écharpe aux couleurs de sa maison, et après avoir lancé un sortilège d'imperméabilisation, elle se mit à déambuler dans le parc, les flocons s'amoncelant dans ses cheveux bruns. Mais elle s'en fichait. Elle n'enlevait que ceux qui ne la gênaient. Après tout, c'était la magie de Noël.

Recueillant quelques flocons qui tombaient dans sa main, et qui fondaient instantanément au contact de sa peau chaude, elle continuait à marcher, au hasard, contemplant le soleil qui se levait sur l'école. C'était la première fois qu'elle voyait cela et le spectacle était à couper le souffle, de ceux qui la feraient outrepasser toutes les règles de l'école. Elle poussa un long soupir, pas d'exaspération comme à son habitude, mais de... soulagement. Elle se sentait paisible. Elle était à Poudlard. Elle n'avait rien à craindre. Elle était entourée de gens qui l'aimaient et qui, elle le savait, la protégeraient en cas de problème.

Alors une seconde son esprit se perdit dans un souvenir, celui d'une nuit de pleine lune, de deux yeux qui deviennent sauvage, d'un HOMME qui devient sauvage, et d'un autre, un homme peu avenant, dans ses longues robes noires, qui prenait place devant elle, devant Ron et Harry, pour les protéger.

Des gens qui l'aimaient, vraiment ? ...

Sa réflexion prit fin lorsque son regard se posa sur une forme noire et blanche dans la neige. Elle aurait pu jurer qu'elle avait bougé. Sinon, son regard n'aurait pas été attiré dessus. Prudente et téméraire, la jeune femme sortit sa baguette et s'approcha. La silhouette se précisa. C'était un homme tout de noir vêtu, qui se laissait lentement recouvrir par la neige, sans bouger, sans trembler, sans essayer de se protéger du froid. Alors vint l'évidence. Hermione étouffa un cri de surprise, mais pas assez. D'un bond, la silhouette s'était levée, baguette en main, et lui faisait face. Il baissa néanmoins sa garde en voyant la jeune femme, mais à la place leva un sourcil.

- Combien de points en moins pour Gryffondor, professeur ? le devança-t-elle, la baguette rangée, sa main tapotant la poche de son manteau.

- 20, cingla Rogue. Que faites vous dehors à cette heure, Miss Granger ? Le confort et la chaleur de votre maison ne vous conviennent-ils pas ?

- La neige est une sorte de confort elle aussi. Elle tombe imperturbable. C'est... rassurant.

Elle garda le silence en regardant ailleurs et, fait étrange, lui aussi. Au moins quelques secondes. Avant de planter à nouveau ses yeux froids dans ceux d'Hermione.

- Rentrez, Miss Granger.

C'était un ordre mais il avait peine à sonner dur.

- Pourquoi ? répondit la jeune femme, engaillardie par ce qu'elle ressentait comme une faille, une faiblesse.

- Vous enfreignez les règles. Et vous n'avez pas à discuter mes ordres.

- Vous êtes vous aussi dehors.

- Je suis un professeur.

- Je suis en vacances.

- Vous êtes à Poudlard.

Un instant à court d'argument, elle se reprit :

- Monsieur, pour quelle raison cette règle existe-t-elle ?

- Pardon ?

- Je suis tout à fait CONSCIENTE – et elle insista sur ce mot, puisqu'après tout ce n'est pas ce qu'il pensait d'elle – qu'on puisse interdire l'accès au château ou au parc sans accompagnement, au beau milieu de la nuit par exemple, mais... pourquoi devrais-je rentrer puisque vous êtes là et que je ne risque rien ?

- Parce que vous me dérangez.

- Que faisiez-vous ?

- Cela ne vous regarde pas. Allez vous rentrer !

- Non, Monsieur.

Sa voix était beaucoup plus calme que celle du professeur Rogue.

- Je pensais au contraire m'asseoir, avec vous à mes côtés, et garder le silence qui vous est si cher. Quoi que vous puissiez penser, professeur, j'en suis capable.

- Voyons ça, répondit-il.

Oui il jouait avec son élève, mais il voulait réellement savoir si elle en était capable. Cette orgueilleuse de Miss Je-Sais-Tout ...

- Combien de points si vous perdez ? lui demanda-t-il en s'asseyant à distance.

La jeune femme, sans le regarder, haussa les épaules et se laissa tomber dans la neige. Étrangement, l'amas de flocons semblait plus confortable que son oreiller. Ou peut être était-ce parce qu'elle était .. en bonne compagnie ? Non, sûrement pas... enfin... peut être... et elle caresse son paquet dans sa poche.

Elle soupire très lentement, le plus silencieusement possible, ferme les yeux. Rien ne l'atteint. A peine le froid, surtout pas l'humidité. Par moment, elle enlève quelques flocons gênants de son visage, cependant que son corps s'en couvre sans qu'elle ne réagisse. Il n'y a aucun bruit. Elle entend à peine Severus Rogue respirer près d'elle. Elle se demande si elle l'entendrait si il partait. Après tout il n'est qu'une ombre...

Le Maitre des Potions est nerveux. Cette présence le dérange. Malgré son silence – elle s'y tient, elle n'a même pas répondu à sa question, comme si cela l'aurait fait « perdre » à leur petit jeu – il n'a plus la quiétude des instants précédents. Il était seul avec Lily, et elle essaie de prendre sa place, elle, l'étrangère, l'odieuse Miss Je-Sais-Tout.

Il ne sait quoi faire. Il ne veut pas rester et pourtant c'est ELLE qui a envahi son espace. Ce n'est pas à lui de fuir, c'est à elle. Mais elle est restée. Il ne peut la forcer à partir. Il n'a pas réagi assez vite, a passé sa chance. Il s'en veut. Alors il attend.

Et elle s'endort.

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