51. Le diable

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Je me laissai glisser sur la porte. Mon arrivée au sol ne se fit pas discrète. Je l'entendais toujours sur le seuil de ma porte, il toquait, une fois puis dix fois. Je ne bougeai pas. Ma respiration s'était accélérée du fait de cette exaspération, il savait que j'attendais qu'il cesse de m'importuner.
Lorsqu'il fut enfin parti, mon rythme cardiaque redevint normal.

Le radio-réveil indiquait 8 h 45. L'heure d'aller en cours.

Je rassemblai mes affaires, attrapai mon manteau et dévalai l'escalier rapidement. Je ne voulais pas être en retard, j'en avais horreur.
En courant à fière allure, j'arrivai tout juste. La prof ne fit pas de remarques et je partis au fond de la classe m'asseoir. Le cours débuta, une avalanche de mauvaises notes, comme d'habitude. Soufflant, j'entendis les autres discuter de sujets d'actualités "t'as vu la fille qui s'est fait tabasser et qui s'est barrée ...". Une vague de stress m'envahit. Savaient-ils que j'étais la fille en question? De toute manière, j'étais partie comme une flèche pour ne pas avoir à subir le regard malveillant des autres. Cette histoire faisait tout de même le tour du quartier...
"On dit que l'agresseur serait la copine du mec que la meuf draguait."
Un cri d'horreur s'échappa de ma gorge. Tout le monde s'était retourné. Je sentis le rouge me monter aux joues.

- "Que se passe-t-il mademoiselle ?"

- "Non... rien," balbutai-je.

La prof repartit de plus belle dans des explications sur la langue française.
Plongée dans diverses réflexions, la main levée, je demandai à sortir de salle prétextant des vertiges poussés. Elle ne s'y opposa pas et me désigna la porte du menton.

Descendant dans les rues de Paris, je slalommais entre les habitants. Je ne voyais plus rien... Mais je savais que non loin de là se trouvait le lycée de Maxime. Arrivant à l'accueil, je manquai de  glisser. Sur le panneau d'affichage, je remarquai qu'une journée porte ouverte y avait eu lieu 2 jours auparavant. Je tentai donc cette excuse.

- "S'il vous plait, j'ai oublié ma veste lors de la porte ouverte," dis-je essouflée.

- "Allez-y jeune fille," me dit le quadragénaire de l'entrée en ouvrant le portail.

Pénétrant dans l'enceinte du bâtiment, je ne savais où me diriger entre les couloirs jaunes, bleus, rouges. La palette de couleurs et l'absence d'indications me saoula. Une multitude de personnes présentes et pas un seul pour m'aider. Le panneau "réfectoire" m'emmena dans une salle immense aux murs jaunes poussin et aux tables alignées pointilleusement. Parmi tous ces visages méconnus, je me perdus à regarder de travers les filles qui s'habillaient de façon extravagante. Pourtant je ne connaissais rien d'elles, qui étais-je pour les juger ?
Parcourant le self suspicieusement, l'une d'elle réussi à retenir mon attention. C'était elle, la fille qui m'avait agressée. Toute resplendissante, guillerette à souhait. Un diable revêtu en sainte-nitouche.

Bonjour tristesse...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant