Un éternel recommencement

Chapitre 12 - Harry

En entrant chez moi, je dépose mes copies à corriger sur mon bureau, avant de me diriger d'un pas rapide vers le bar à côté de la cheminée. J'ai passé l'après-midi perdu dans mes pensées. J'ai le sentiment que mes élèves se sont rendus compte de quelque chose, mais je n'ai pas réussi à me sortir de la tête ce que j'ai appris ce midi.

Alors mon fils est gay ? Il préfère les hommes ?

Comment n'ai-je pas pu m'en apercevoir plus tôt ? Ce n'est pourtant pas le genre de chose que l'on peut aisément cacher. Albus a bien dû me laisser quelques indices, mais visiblement, je n'ai pas su les voir. Ou alors, je ne voulais pas les voir.

Les onze premières années de ma vie, je les ai passées chez les moldus, et le fait d'être homosexuel n'y est pas très bien vu. Surtout chez les Dursley !

Je me souviens d'un jour où avec l'oncle Vernon, nous avons croisés un couple gay dans un supermarché. Ses propos à leur encontre n'avaient pas été tendres. Mais je crois que ce qui me surprend le plus dans ce souvenir, c'est le fait que j'étais avec eux au supermarché. Ça doit être la seule et unique fois que j'ai dû aller avec eux. Ou alors, j'étais encore trop jeune pour qu'ils me laissent seuls à la maison.

Je me secoue légèrement avant d'avaler mon whisky d'une traite, me repassant encore et encore ma conversation avec Malefoy, ressentant encore cette parcelle de jalousie à son encontre. Parce que, de toute évidence, lui était au courant pour l'homosexualité de son fils. Ce qui me prouve à quel point il a su être proche de son fils, contrairement à moi.

Pour ma défense, disons que je n'ai pas trop eu le choix. Dès la naissance de James, Ginny se l'ai approprié comme son petit trésor. J'avais le droit de le prendre dans mes bras, mais uniquement en de rares occasions. Lorsqu'Albus est arrivé, je m'étais déjà plus ou moins éloigné de ma famille. Ne passant que de rares fois chez moi, et j'avais rarement l'occasion de voir mes fils.

C'est alors que le comportement de mon ex-femme me saute aux yeux. Seize ans après les faits, je vois enfin à quel point elle a rejeté cet enfant. Comment est-ce que ça ne m'a pas sauté aux yeux avant ?

Albus est le seul de nos trois enfants à ne pas avoir été nourri au sein. À l'époque, Ginny m'avait dit que c'était parce qu'elle n'avait pas assez de lait, pourtant elle prenait des potions pour arrêter les montées de lait. Chose un peu paradoxale si vous voulez mon avis.

Mon second n'était presque jamais pris dans les bras, restant le plus souvent dans son transat ou dans son parc de jeu. Les rares fois où Ginny le prenait dans ses bras c'était pour lui changer la couche. Pas plus, pas moins. Si je me souviens bien, à partir du moment où il a su être propre, il n'a plus jamais connu la chaleur des bras maternels. Pas étonnant qu'il ce soit tourné vers les hommes avec une enfance pareille.

Je secoue de nouveau la tête, affligé par les pensées qui me tournent en tête. C'est complètement stupide ce que je dis. Ce n'est pas parce qu'il n'a pas été aimé par sa mère qu'il est homosexuel. C'est juste qu'il est comme ça. Point final !

J'en viens alors à me demander ce qui peut l'attirer dans un corps masculin au point de vouloir coucher avec. Parce que même si je n'ai rien vu ce midi, d'après les mots de Malefoy, c'est bien ce qu'il était en train de faire. Le rougissement sur les joues de mon ennemi de toujours en prononçant le mot « sexe » était assez parlant pour lui.

C'est vrai que mon expérience personnelle est plus que limitée. Durant les premières années de ma vie dans le monde sorcier, j'ai passé plus de temps à combattre Voldemort qu'à courir après la gueuse. Et après, disons que je me suis laissé embarquer dans une histoire sans vraiment penser aux conséquences. J'étais tellement soulagé d'avoir enfin vaincu l'autre taré mégalomane que je suis tombé dans les premiers bras qui ce sont ouverts devant moi.