Chapitre 10 : Manipulations Magiques (partie 2)

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Sa semaine se termina le vendredi midi, pour son plus grand plaisir. Seul le changement dans l'ordre de ses cours empêchait Elizabeth de tomber dans l'ennui le plus profond après la monotonie et la banalité de sa première semaine. Elle suivait ses cours, rédigeait ses dissertations comme elle l'avait appris chez les élites, et restait avec le groupe qu'elle supportait difficilement. Elle n'osait cependant pas se plaindre – comparé à sa situation chez les élites, elle était en plein rêve.

Les jeunes étaient allés se détendre sitôt la fin des cours dans l'herbe verte à l'ombre des arbres dans une atmosphère paisible. Tous étaient plus ou moins amorphes, et aucune parole ne vint fendre l'air. Seule de la musique douce emplissait le lieu.

Quelques rayons de soleil filtraient au travers des branches. Les gouttes d'eau faisaient miroiter la surface des feuilles et brillaient telles des pierres précieuses. Le calme était paradisiaque, et Elizabeth put enfin se détendre après cette semaine passée dans l'agitation de ses pairs. Comme elle avait toujours rêvé pouvoir le faire chez les humains, la magicienne leva la main qui entraîna quelques feuilles mortes dans leur sillage. Elle agita ses longs doigts fins et fit tournoyer les feuilles en une danse improvisée. Auparavant elle aurait dû se cacher pour réaliser un tour si simple, mais aujourd'hui elle n'avait plus à le faire. Cette liberté était grisante.

La bise secouait ses longs cheveux noirs détachés et les fit ondoyer au soleil. Les branches des arbres qui la dominaient s'agitaient faiblement, et quelques feuilles de plus vinrent se poser aux côtés de la magicienne. Cette dernière se leva sans un bruit, se hissa sur une branche basse et grimpa de quelques centimètres au-dessus des autres jeunes. Quand elle jugea la hauteur parfaite, elle s'appuya contre le tronc de l'arbre et ferma les yeux pour profiter de l'instant. Le silence était complet, la musique ne parvenait plus à ses oreilles, ne grésillait plus dans son esprit maintenant libéré. Le calme était envoûtant.

Elizabeth commença à jouer avec ses pouvoirs. Elle fit s'envoler les gouttes d'eau autour d'elle et traça des images, des dessins aux formes imaginaires, s'inventa un monde, un havre de paix. L'eau dansait autour d'elle et la réconfortait par son doux bercement.

Mais sa sérénité fut troublée par l'arrivée d'une de ses professeurs. Sous les pieds de la jeune fille, la femme demanda aux jeunes où elle pouvait la trouver, les tirant de leur torpeur. Les gouttes retombèrent sur les feuilles en éclaboussures et la jeune fille sauta à terre. Les regards autour d'elle étaient étonnés – personne ne l'avait vue ou entendue partir. La professeure la toisa les lèvres pincées. Miranda Stonehart, amoureuse de la discipline, ne trouva cependant rien à redire. Même si elle enseignait l'attaque à Elizabeth, cette dernière jugea bon de lui rappeler son prénom.

« Je suis Elizabeth Tolliver.

— Le Directeur a demandé à vous voir. Suivez-moi. »

La magicienne en était étonnée – ainsi qu'inquiète. Que pouvait-il bien lui vouloir ? Un bref regard lancé à Juliette lui permit de voir qu'elle partageait ses émotions. Elle suivit néanmoins docilement la professeure jusqu'à la tour qui surplombait l'école, et revêtit un regard dur alors qu'elle passa les arches. Elizabeth ne lui faisait pas confiance, et ne se laisserait pas influencer sans se battre. Sa surprise fut encore plus grande quand elle le vit armé d'un grand sourire avenant qui n'avait rien de menaçant...

Elle était toujours sur la défensive quand elle écouta ses paroles.

« Mademoiselle Tolliver, voilà bien longtemps que nous ne nous étions vus. Nous avons maintenant tout loisir de parler plus amplement. »

Elizabeth n'aimait pas son ton mielleux. D'ordinaire ses menaces étaient toujours perceptibles au travers de sa voix faussement chaleureuse, mais ce n'était pas le cas aujourd'hui. Elle ne savait pas à quoi s'attendre, et cette sensation était encore pire que de se sentir en danger. Ainsi, elle préféra ne rien répondre.

« J'étais curieux de savoir comment se passaient vos cours. Un tel changement n'est pas anodin... Comment s'est déroulée cette semaine ? Bien, j'espère ?

— Bien mieux que chez les élites. J'ai trouvé ma place dans l'enseignement normal.

— Le rythme vous convient ? N'est-il pas trop dur pour vous de rattraper vos semaines manquantes ?

— Je suis satisfaite avec mes heures de travail. Je dois redoubler d'effort pour rattraper mon retard, mais il n'y a rien d'impossible à cela. J'ai bien plus de temps de repos que pendant l'enseignement élite, ce qui me permet de travailler au rythme où je l'entends.

— Bien, très bien. Je suis ravi de savoir que vous ne regrettez pas votre décision. Vos professeurs m'ont rapporté un comportement exemplaire et des résultats bien au-delà de leurs attentes. Tous sont ravis de votre travail. »

Elizabeth s'était figée. Elle n'avait pas pensé qu'il pouvait être en communication avec ses professeurs actuels, et se doutait que son professeur de Feu lui avait rapporté le dernier incident. Il n'en fallait pas plus pour que le Directeur fasse le lien avec elle et agisse en conséquence...

« Mon séjour chez les élites m'a appris la rigueur du travail, préféra-t-elle répondre avant toute autre réflexion. J'apprends vite, et j'ai de grandes capacités d'adaptation.

— C'est une excellente chose. Je suis ravi que vous puissiez trouver du positif dans ce court séjour. Continuez sur cette voie-là, Mademoiselle, et vous accomplirez plus que ce que vous ne pensez.

— Je ferai tout mon possible, Monsieur.

— Je ne vous retiendrai pas plus longtemps, je me doute que vous avez du travail qui vous attend, et j'ai quelques affaires urgentes dont je souhaite m'occuper. Je vous souhaite une bonne continuation et bon courage pour cette année à venir.

— Merci Monsieur. Au revoir.

— Au revoir, et portez-vous bien. »

Elizabeth descendit les marches, déboussolée. Son comportement était aux antipodes de ce qu'il avait été auparavant. C'était à ne plus rien y comprendre.

La jeune fille retrouva le groupe là où elle l'avait laissé. Juliette se précipita sur elle en la voyant revenir. Elle semblait inquiète.

« Alors, qu'est-ce qu'il te voulait ?

— Pas grand-chose... » lui répondit Elizabeth. Elle voulait éviter de lui en parler le plus possible, surtout en présence des autres jeunes. « Juste savoir si je m'étais adaptée à la vie ici...

— Ça n'a pas l'air de te faire plaisir... » remarqua Juliette. Elizabeth avait effectivement l'air soucieuse.

« C'est juste que son comportement est à l'opposé de ce qu'il était une semaine auparavant. Mais ce n'est rien, ce n'est pas la peine de s'inquiéter pour si peu. » L'Anglaise lui lança un sourire encourageant.

« On te l'avait bien dit, le Directeur se soucie de notre bien-être. Ne t'en fais pas, et reste profiter de l'après-midi avec nous. »

Elizabeth ne lui répondit que par un sourire forcé et se rassit aux côtés des jeunes. Elle savait au plus profond d'elle-même que quelque chose clochait, et se fiait plus à son instinct qu'aux paroles de ses camarades. Si eux ne pouvaient rien lui apprendre, la bibliothèque s'en chargerait pour elle. Les innombrables ouvrages qu'elle renfermait contenaient sûrement quelques informations utiles...

Ce ne fut qu'en se couchant que la jeune fille se rendit compte de l'inutilité des jeunes de son groupe. Elle n'avait rien appris d'eux en une semaine, et n'apprendrai rien de plus en les côtoyant plus longtemps. Elle n'avait aucune raison de se détacher d'eux, ce n'était pourtant pas l'envie qui lui manquait... Elle espérait juste pouvoir rencontrer quelqu'un qui pourrait lui enseigner des tours utiles.

Elizabeth profite de sa liberté... et le Directeur semble avoir changé de comportement face à elle ! Vous pensez qu'il est vraiment sincère ? Et qu'Elizabeth est un peu paranoïaque ? 

Prochaine partie : Mercredi 19 Avril (vous ne pouvez pas savoir à quel point j'ai hâte de la poster haha !)

FalkjarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant