Chapitre 25 : Sentences Suprêmes (partie 2)

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Ils n'eurent pas plus de chance d'en reparler le lendemain, car des oreilles indiscrètes ne manquaient de les entourer. Après avoir appris que le Directeur les faisait surveiller par Juliette - laquelle n'avait jamais fait appel aux deux amis - tous les élèves de l'école devenaient suspects. N'importe lequel d'entre eux pouvait s'avérer un espion pour le Directeur. Une fois leurs cours finis, alors qu'ils auraient pu s'isoler dans une salle de classe vide, les élèves furent conviés à une réunion extraordinaire dans la demi-heure qui suivait. Elizabeth et Andy échangèrent un regard angoissé. Nul doute que ce rassemblement concernait leurs découvertes de la veille, mais que prévoyait réellement le Directeur ? La magicienne aurait aimé se confier à Jonathan, mais elle savait pertinemment qu'il préviendrait à son tour la sombre personne.

Perdus dans la masse d'élèves qui discutait avec insouciance, les deux amis attendaient silencieusement Elias Nardeck. La mine plus sombre que jamais, ils n'avaient échangé que de rares paroles depuis le matin-même. Quand la salle fut remplie, le Directeur entra, tenant une chaine dont le bout était relié au collier de fer et de frêne d'un démon. Les élèves ne purent retenir une exclamation de surprise mêlée à de la peur, tandis que le couple diabolique ne fit qu'hausser un sourcil. Ce n'était certainement pas le premier qu'ils rencontraient.

La créature avait le dos voûté et lançait des coups d'œil méprisants à la foule d'élève. Les mains calcinées entourées de menottes de fer reliées à son cou, elle était misérable, aurait presque fait pitié à Elizabeth si elle n'avait connu l'ampleur de sa cruauté. Alors que le Directeur la traina sur l'estrade, la magicienne aperçut pour la première fois les autres silhouettes qui s'y tenaient. Il imposa le silence en levant ses mains, puis entama son discours, sans jamais lâcher la chaine du démon.

« Hier, ce démon, commença-t-il en le pointant du doigt, a pénétré nos terres et attaqués l'un de nos professeurs. » L'intéressé s'avança au bord de l'estrade et montra les griffures reçues sur son bras gauche, extrêmement semblables à celles qu'Andy avait eu sur la joue et qui avaient guéries en quelques secondes grâce à un élixir de l'infirmière. Des murmures affolés fendirent la foule silencieuse. « Cette action entrave gravement le traité de paix que nous avons signé avec le Chef des démons. Selon les règles que nous avons fixées, il nous revient de choisir la sentence appropriée pour cette créature. Son sort est entre nos mains, je serai le seul juge capable de la condamner. Avant toute chose, cette créature doit reconnaître ses torts. »

Le Directeur s'adressa au démon en l'attente d'explication. Il reçut pour toute excuse un sifflement menaçant qui fit frémir la foule, et un cracha de dégoût qui les révulsèrent. Andy et Elizabeth étaient sidérés.

« Comme vous pouvez le voir, poursuivit le Directeur sans afficher de décontenance, cette créature ne nie pas son action répréhensible. Elle ne cherche ni à se défendre, ni à accuser quelqu'un ou quelque chose d'autre, car elle se sait unique responsable et toute tentative de se faire libérer vaine. Nous seuls détenons la vérité. Alors, quelle peine devrions-nous appliquer ? La relâcher ? Vous conviendrez tout comme moi que ce n'est pas la sentence appropriée pour un coupable. Nous ne pouvons prendre le risque de le transférer à la Communauté Magique, car ses comparses pourraient en profiter pour nous attaquer, ou prendre cet exemple pour rompre le traité. Emprisonner ce démon ? L'école n'a certainement pas la structure pour emprisonner qui que ce soit... »

« Il oublie les cachots... » murmura Andy à l'oreille d'Elizabeth.

« ... ni même le temps de surveiller un tel détenu. Ceci ne nous laisse qu'une unique solution. »

Le Directeur prit une grande inspiration, chargea sa voix d'une émotion surjouée qui sonnait faux, avant de proclamer la sentence. Les professeurs se tenaient droits, tels des gardes, prêts à venir à bout de la bête si elle tentait de s'échapper.

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