Joke

70 8 6
                                    



Forcer quelqu'un à faire quelque chose qu'il ne voulait pas ne servait à rien. Hoseok en était aussi conscient que ça le frustrait. On lui avait souvent dit qu'il était le genre de personne à tout vouloir tout de suite, impatient et têtu. L'abandon n'était pas dans ses cordes, il n'y pouvait rien, c'était plus fort que lui. Persister, forcer le passage, réussir.

— J'espère juste que tu t'engageras pas dans des jeux d'argent, soupira Taeha en marchant un peu plus lentement.

Hoseok lui lança un regard inquisiteur ; après tout, qu'est-ce que ça venait faire là ? Il se livrait sur ses combats intérieurs par rapport à deux amis à lui qu'elle ne connaissait pas, et elle l'interrompait pour lui affirmer ceci.

— Me regarde pas comme ça, c'est vrai !

Sa voix monta légèrement dans les aigus alors qu'elle leva ses deux petites mains toutes propres devant elle, comme pour se défendre. Hoseok n'avait pourtant rien dit, même si à cet instant-ci, son regard était bien plus parlant que sa bouche.

— Pour ton bien, compte sur moi pour t'empêcher de faire cette erreur-là.

Son ton était tellement solennel, comme si elle souhaitait réellement le protéger. Il leva les yeux au ciel et l'invita à continuer d'avancer ; s'ils tardaient davantage, ils finiraient par être en retard.

— Nan mais vraiment, je suis sérieuse là–

— Bien sûr, sifflota-t-il en pressant le pas.

Il ne savait pas pourquoi mais au fond de lui, il sentait que cette conversation allait mener à une situation un peu compliquée.

— Tu sais Hoseok, les gens comme toi, ça se marie pas bien avec l'argent.

Dommage pour elle, il était en économie et il ne comptait pas changer de cursus.

— Tu sais Taeha, soupira-t-il en s'arrêtant totalement pour se tourner vers elle, les gens comme toi, c'est pas fait pour traiter avec des malades. Personne ne comprend pourquoi t'es dans cette filière-là.

Et personne ne comprenait non plus pour lui. On cherchait des excuses : c'était son père surement banquier, c'était sa mère sans doute au foyer, c'était le grand-père peut-être financier, c'était sa grand-mère, son frère, sa sœur, ses cousins, ses oncles, ses tantes, ses poissons rouges. On cherchait, on cherchait, on ne trouvait pas. Parce que le père d'Hoseok était un simple professeur de philosophie qui avait levé un sourcil broussailleux en apprenant le choix de son fils. Pourquoi était-il là ? Lui-même, parfois, ne le savait pas.

Taeha avait recommencé à marcher avec ses talons hauts qui claquaient bien forts sur le béton de la route – surement parce que les trottoirs, c'était pour les loosers. Les voitures filaient à trente centimètres d'elle, elle semblait pourtant n'en avoir rien à faire. Le danger, le risque, lorsqu'elle serait médecin, ce serait son quotidien.

— Remonte, finit-il par lui conseiller en la tirant par le coude vers lui avant de blaguer : ce serait bête de finir dans un lit d'hôpital maintenant. Quoiqu'avec un peu de chance, ce sera le bel urgentiste qui s'occupera de toi !

Voilà comment on s'y prenait pour effacer l'expression pensive de son visage pour la remplacer par un sourire amusé.

— Arrête, je suis sûre que ça va être l'autre infirmière en chef qui me prendra en charge après, j'te jure, avec tout le respect que je lui devrais, c'est qu'une vieille chieuse insupportable. Elle et sa troupe de commères, heureusement qu'elle bosse bien sinon je prierais pour qu'elle se fasse virer pendant leurs interminables pauses café.

Sauve-toi [Namgi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant