Sauve-toi [Namgi]

Butterfly

Je sais pas.

Un silence.

Je sais pas, c'était flou dans ma tête. J'avais pas réussi à dormir alors j'avais voulu finir de tailler le bâton de marche pour l'anniversaire de Jungkook mais mon grand père est arrivé avec un air grave. Des gens le suivaient. Des policiers. J'ai eu l'impression qu'une seconde était passée mais ça a dû durer une bonne dizaine de minutes quand j'ai "repris connaissance" dans le hall de la mairie. J'avais une chaise sous mes fesses et un chocolat entre les mains. Dans la tasse, on voyait des petites bulles et un nuage de lait.

Sur l'instant, j'avais l'impression d'y voir une tempête mais c'était peut-être l'agitation autour de moi qui me faisait imaginer ça.

Ça grouillait de partout.

J'avais jamais vu un endroit en telle effervescence dans le village. J'arrivais pas à comprendre ce qu'il se passait. Mes grands parents s'étaient assis à chacun de mes côtés mais j'avais l'impression d'être totalement seul.

Il y avait ta mère, Namjoon, à côté de toi. Elle était là, à l'autre bout de la pièce et elle ne cessait de me fixer. Pas un regard mauvais, juste étrange. Comme si elle non plus ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Et toi, tu regardais le plancher.

C'était difficile de se faire à l'idée qu'en l'espace d'une nuit tout pouvait basculer. Je crois que le pire, c'est quand le père de Jungkook s'est mis à supplier qu'on le laisse sortir. Il se sentait impuissant entre les quatre murs de cette grande pièce poussiéreuse. Sa femme ne pouvait même pas prononcer un mot tant elle était secouée.

C'est pas possible, c'est pas possible.

On entendait ses murmures dans toute la pièce, comme si elle criait à travers le vacarme des policiers.

Hoseok ramena ses jambes contre lui, ses mains tremblaient horriblement.

Personne n'y croyait. Jungkook n'était pas... Jungkook n'avait pas de raison de fuguer.

Jimin, peut-être ? Même si ses parents refusaient catégoriquement l'idée. Taehyung ? Je suppose que tout était possible avec lui.

Mais Jungkook ? Non.

Les parents de Jimin insistaient constamment sur la piste du kidnapping mais les enquêteurs l'avaient rapidement mise de côté : comment quelqu'un aurait pu être présent dans trois maisons différentes en une nuit sans être attrapé ? - surtout que ce n'était pas forcément très simple d'entrer dans la maison des Park - Il fallait forcément que les trois enfants se soient rejoints. Mais ils jouaient toujours entre eux donc c'était forcément eux qui avaient monté un plan. Il n'y avait donc pas de quatrième personne responsable des disparitions. Ou en tout cas, c'est ce qu'ils pensaient à ce moment-là.

Namjoon le fixa sans bouger, le souffle court et la mâchoire contractée. Sa gorge était encore sèche d'avoir trop parlé et sa tête cognait d'avoir trop pleuré.

L'affaire a directement été considérée comme critique : trois enfants en plein automne, ce n'était pas une situation agréable entre le froid et les pluies qui rendent le sol glissant voire instable - sans même parler des sangliers ou d'autres animaux sauvages. Les enquêteurs n'avaient aucune idée de la direction qu'ils avaient pu prendre. La route ? Dans quel sens ? La montagne ? De quel côté de la vallée ? Avaient-ils pris le chemin ou s'étaient-ils enfoncés au hasard ? Même si les feuilles avaient commencé à bien tomber, la forêt semblait encore opaque si bien que même les hélico ne verraient rien.

Petit à petit, des possibles pièces à conviction étaient rapportées dans la salle, mises sous plastique et posées sur des tables. Il n'y en avait pas beaucoup, généralement des feuilles, des dessins et quelques jouets. Comme s'ils allaient trouver la réponse dans ces papiers crayonnés.