Just One Day

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Des images de ce jour-là revenaient lorsqu'il fermait les yeux, il n'arrivait pas à oublier, même après tant de temps. Il avait beau essayer de toutes ses forces d'éliminer ces souvenirs-là, ils restaient, ils s'accrochaient même et Namjoon n'en pouvait plus.

Il sentait cependant ce sentiment s'amenuir peu à peu, s'évanouir lentement mais ne jamais disparaître complètement. Toujours présent, mêlé à l'incompréhension, à la culpabilité, à la désillusion. Toujours là, dans un coin de ses pensées, à travers un élément de ses rêves, comme le fil conducteur de ses cauchemars. Namjoon posait un pied devant l'autre, se blâmait chaque matin de n'avoir rien fait et se répétait chaque soir qu'il n'aurait rien pu faire.

A ce moment-là, Namjoon n'avait rien vu venir.

Et la structure branlante sur laquelle il se tenait ne cessait de vibrer, prête à se briser sous son poids, prête à l'engloutir dans ses ruines. Y repenser, se ressasser cette scène encore et encore sans rien pouvoir modifier, ce n'était qu'une torture qu'il s'infligeait. Le moindre détail, insignifiant même, aurait pu changer le futur. Peut-être que s'il avait fait autre chose, si seulement il avait agi autrement, rien ne serait arrivé. Mais Namjoon n'avait rien fait, il avait laissé la vie décider pour lui, il l'avait laissée le guider, il l'avait laissée l'abrutir et l'endormir, puis l'engloutir.

Il se sentait si inutile.

Le soleil tapait sur le carreau, signe d'un été déjà bien entamé. Une rentrée bien proche. Bien trop proche. A cette simple pensée, il referma ses paupières et s'effondra encore un peu plus, éreinté par la chaleur et par cette fatalité. Une porte claqua dans son dos – le sortant légèrement de sa somnolence – suivi d'un Yah 'Joon ! qu'il ne connaissait que trop bien.

Et les mots s'enchainèrent de cette voix aiguë et criarde. Parce que oui, ce n'était plus un colocataire qu'il avait sous les yeux mais une larve, une larve qui végétait sur ce bureau, et s'il pouvait bien le lâcher ce malheureux, il n'allait pas s'envoler enfin ! Encore un peu et la salive serait visible, et on avait clairement pas besoin de cirage naturel, surtout que c'était dégueulasse. Bientôt ce pauvre bureau serait irrémédiablement marqué, porterait les stigmates de ce corps flasque et somnolent, ce machin humain qu'on prendrait toutes les peines du monde à déloger et il faudrait en racheter une table comme ça parce qu'on bossait dessus et devrait-il vraiment lui rappeler qu'ils n'étaient qu'étudiants et que c'était vraiment pas le moment de faire des dépenses inutiles ? Bon sang mais avait-il au moins bougé un peu ? Parce que le sport c'était important et que non, Nam', il n'allait pas arrêter de répéter ça. Oui, il n'était pas sa mère mais parfois il se le demandait franchement. Et puis c'était quoi ce bazar qui-

— Ferme-la, crétin, soupira Namjoon en enfouissant un peu plus sa tête dans ses bras.

Toujours cette énergie épuisante à n'importe quelle heure de la journée, Namjoon le reconnaissait bien là. Il ne savait pas s'il devait s'en réjouir ou non car ce flot de mots lui donnait déjà mal à la tête.

Le nouveau venu cligna des yeux deux ou trois fois avant de rouvrir la bouche avec une mine vexée.

— Toujours aussi sympa à ce que je vois. Enfin bon, qu'est ce que j'espérais venant de toi ?

Ce murmure persifflant n'atteint pas Namjoon, il était au dessus de ça, Hoseok l'avait bien compris. Il flottait même ! Toujours plus haut, toujours plus léger et il fallait batailler pour le faire redescendre à la douce réalité. Mais lui était là pour ça, oui Nam', songea-t-il, voici sa mission la plus secrète qu'il ne divulguera pas même au prix de mille tortures. On avait des principes ou on en avait pas. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas sans lui, on se le demandait bien, hein ? Hoseok arrêta ses divagations en baladant ses yeux avant d'inspirer plusieurs fois en faisant le maximum de bruit possible et de grimacer.

Sauve-toi [Namgi]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant