Sauve-toi [Namgi]

Coffee

Namjoon avait eu du mal à dormir cette nuit-là. Il avait appelé son grand frère juste après avoir allumé toutes les lumières, mais celui-ci n'avait pas décroché.

Il avait vraiment l'impression de ne pas être seul dans la chambre, et même après avoir fouillé sous les lits et dans les placards sans trouver âme qui vive, cette même appréhension était restée aussi forte. Le rideau ressemblait à une robe et comme par hasard, Hoseok n'avait pas eu meilleure idée que de laisser ses chaussures dessous. Dans cet état-là, Namjoon savait qu'il pourrait sursauter devant chaque élément suspect.

Il rappela Jin-hyung.

Toujours aucune réponse.

C'était lui, lorsqu'il était petit, qui le prenait dans ses bras et le berçait le soir tout en chuchotant qu'il n'y avait rien dans la chambre et qu'il pouvait y retourner sans crainte. Cependant, Namjoon ne voulait pas y remettre les pieds, son frère acceptait alors de le laisser dormir avec lui. Il savait que s'il était allé voir sa mère, elle l'aurait mis à la porte en lui disant qu'il fallait vaincre la peur par la peur. Quelques mois plus tard, Jin déménagea dans sa chambre, le rassurant pour de bon.

Mais ce soir-là, il était seul – ou du moins il l'espérait. Hoseok n'était pas encore rentré, il n'avait toujours aucune idée d'où était passée cette tête de mule. Il songea à l'appeler puis se retint. Il lui avait déjà laissé un message vocal, si son colocataire décidait de ne pas répondre, c'était qu'il le boudait encore.

Ridicule.

Hoseok l'agaçait et plus il mettait de temps à rentrer, plus ça l'irritait. Namjoon se mit tout de même au lit, éteignit les lumières et serra bien fort les couvertures entre ses doigts tremblotants. A vingt ans, si ça, c'était pas pitoyable !

Il ne put néanmoins fermer l'œil que lorsqu'il fut certain d'entendre la démarche caractéristique d'un Hoseok qui veut se faire discret.

Un léger sourire écarta ses lèvres en distinguant la silhouette exagérément courbée de son colocataire. Il se détendit et, bientôt, tomba dans un rêve étrange où une licorne hululait tout en faisant la brasse pour s'échapper des griffes d'un cheval rose.

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Il y avait encore un cœur dans sa tasse de chocolat au lait, cependant, ce jour-ci, Yoongi sembla préparé. Hoseok l'observa touiller dans le liquide pour déformer le motif avant de prendre une photo de sa nouvelle création. Yoongi le lui montra et le plus jeune ne sut quoi dire ; il lui offrit alors un sourire, peut-être un peu gêné car il ne parvenait pas à comprendre l'art dans ce dessin.

— Une feuille, clarifia Yoongi tout en rétractant son portable avant de venir lécher le manche de la cuillère.

— Oh...

Hoseok voulut faire une remarque, dire quelque chose ; il ne trouvait rien à commenter. Une feuille, d'accord. Eh bien, si Yoongi voyait une feuille, lui voyait un losange : le même que la dernière fois. Ce losange-là que l'ainé avait présenté comme un œil.

Un œil, une feuille ou une mouche, on pourrait y percevoir ce que l'on voulait. Ça lui rappelait les images que son père se plaisait à leur montrer, à lui et à sa sœur. Il s'agissait de taches d'encre où chacun découvrait quelque chose de différent. Là où Hoseok voyait un papillon, son ainée s'imaginait des poumons.

— Des poumons de fumeur, comme les tiens papa : des lambeaux de poumons.

Le paternel l'avait fixée, hébété, avant de baisser les yeux. Hoseok ne pouvait s'empêcher de se sentir mal lorsque Sungyu reprochait la dépendance au tabac de leur père.