Scène 69

2.3K 153 24
                                    


Sad n'avait tellement pas envisagé que cette situation puisse se produire qu'il se retrouva incapable de réagir. Même si cette apathie était aussi en grande partie due à l'alcool.

Maelys se rapprocha de lui et lui tendit la main.

- Ne reste pas là, tu vas te couper, lui dit-elle avec douceur.

Il regarda son geste, les yeux grands ouverts, puis leva sa main au ralenti pour serrer ses doigts dans les siens. Il se leva, affichant toujours la même surprise avant de l'attirer à lui sans prévenir pour la serrer fort.

- Tu es là, souffla-t-il avec douleur.

Elle répondit à son étreinte, plus douce, inquiète.

- Tu ne donnais plus de nouvelles... dit-elle comme pour s'excuser. Tu me manques.

- Oui... Je...

Il s'écarta et se détourna légèrement pour ne pas affronter son regard.

- Je ne voulais pas te déranger... Et puis... j'ai été pas mal... occupé...

Il avait l'air de ne plus savoir où se mettre et pour se donner une contenance, commença à rassembler les morceaux de verre brisés.

Maelys s'écarta des bris de verre et le regarda.

- Tu es très occupé, et j'imagine que ça doit être très dur, ce contrat que tu as accepté. Pourtant tu as quand même le temps d'aller t'enivrer en boite, de t'afficher avec des filles dans les magazines et de provoquer des bagarres... Et pas d'envoyer un sms. Tu sais, fit-elle avec tristesse, je ne suis pas idiote. Pourtant je n'arrive pas à comprendre... Je me dis que tu essaies de te débarrasser de moi, Sad, et j'ai l'impression... c'est bête... Mais j'ai l'impression que tu n'as pas les couilles de me le dire en face.

- Non ! s'offusqua-t-il. Bien sûr que non ! C'est juste que... Aïe !

Il laissa retomber les morceaux de verre avec lesquels il venait de se couper. L'actrice se rapprocha de lui et lui tendit un mouchoir pour qu'il essuie le sang.

- On ne t'a jamais dit de ne pas ramasser le verre cassé avec les doigts ? gronda-t-elle. Je vais chercher de quoi m'occuper de ça. Va te désinfecter.

Elle disparut à la cuisine. Sad avisa la bouteille de whisky, mais supposa qu'elle ne parlait pas de ça, alors il se rendit dans la salle de bain pour se laver les mains. Une fois ceci fait et à bout de force, il se laissa tomber tout habillé dans son lit. Cette soirée était trop éprouvante pour lui. S'il avait su, il n'aurait pas autant bu... Il aurait peut-être eu les idées plus claires...

Maelys ramassa le verre avec une pelle et nettoya les dégâts. Les mains propres, elle retrouva Sad dans sa chambre et s'assit à côté de lui.

- Qu'est-ce qui ne va pas ? demanda-t-elle. Parle-moi.

- Rien... souffla-t-il. Je ne m'attendais juste pas à te voir ici.

Il soupira.

- Tu me trouves pathétique, n'est-ce pas ? fit-il en tournant la tête vers elle.

- Je suis inquiète. J'ai un peu mal aussi... J'ai l'impression que tu me prends pour une idiote... Peut-être que je devrais avoir plus confiance en toi et simplement attendre que... que tu m'appelles ?

Elle fit la moue.

- Tu en dis quoi ?

- Je ne te prends pas pour une idiote, souffla-t-il.

Sad se sentait perdu. S'il était honnête avec elle, s'il lui livrait ses sentiments, c'est lui qu'elle traiterait d'idiot. Il ne savait même pas ce qu'il voulait. Tant qu'elle était loin, il pouvait fuir la réalité. Mais aujourd'hui, elle était là, et elle lui demandait des comptes. Et elle avait de quoi.

- Je ne sais plus vraiment où j'en suis, conclut-il. Tu me manques, mais si je t'appelle, je vais être désagréable. Alors, j'essaie d'oublier...

Elle hocha la tête et s'allongea à côté de lui.

- Est-ce que tu m'en veux parce que je t'ai parlé d'amour ? demanda-t-elle.

- Non. Ça n'a rien à voir.

Ça n'avait rien à voir, puisque c'était ces sentiments à lui qui l'avait fait fuir. Il soupira. Il était égoïste. Il agissait pour se protéger sans penser à ce qu'elle pouvait ressentir.

- Qu'est-ce que tu en penses, toi ? murmura-t-il. On en est où, là ?

- Je pense qu'on en est à un tournant. Pour moi, tout allait bien, tout allait franchement bien. Je pensais que ça devenait sérieux entre nous, qu'on pouvait compter l'un sur l'autre, qu'on pouvait être honnête et tout se dire. Mais je suis allée peut-être plus vite que toi... je ne sais pas, et le fait est qu'une crise s'est déclenchée et que tu as choisi de ne pas en parler et de tout prendre sur toi, alors... je me trompais. Mais pour moi, les choses sont claires, je t'aime, et je veux protéger ce qu'on vit tous les deux.

Sad sentit son cœur et sa gorge se serrer. L'alcool ouvrit les vannes et il se mit à pleurer tandis qu'il la serrait fort contre lui. Qu'est-ce qu'il était en train de faire au juste ? Tout détruire alors que tout allait bien ? Que tout était parfait ? Est-ce que ça avait plus de sens que son expérience avec Anna ? Il n'arrivait plus à réfléchir. L'alcool et la douleur embrumaient ses pensées. Il ne voulait plus réfléchir. Il ne voulait plus... Juste... Elle était là, tout près de lui et là, c'était tout ce qui comptait, non ?

Maelys lui caressa les cheveux. Elle le berça longuement contre lui et embrassa son front.

- Je ne peux pas rester, souffla-t-elle. Je bosse demain, et je dois rentrer au plus vite. Mais... est-ce que tu veux que je revienne demain soir ?

Il la serra plus fort, avant de murmurer, comme un gosse.

- Reste. Jusqu'à ce que je m'endorme. C'est moi qui viendrai. Laisse-moi un peu de temps.

- D'accord. Je reste. Dors, mon ange... Dors.

Elle continua à le bercer et effleura ses lèvres d'un baiser. Épuisé, il se laissa sombrer dans le sommeil. Demain, il y verrait plus clair. Oui... Demain...

Fake ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant