Fake ?

Scène 44

- Rion ne vient pas ce soir ? demanda Sad d'un air innocent.

- Bien sûr que si, répondit Maelys. Il sera à peine en retard parce qu'il a un rendez-vous important. Mais il viendra.

Le sourire de Nihilys était éloquent. Elle ne fit néanmoins aucun commentaire.

- En parlant de lui, ajouta l'agent pour changer de sujet. Est-ce qu'il t'a parlé des directives d'Ismael concernant le fake vous concernant ?

- Rion m'a juste dit qu'on ne démentait pas et qu'on restait sur nos positions.

- Et bien... Oui, c'est à peu près ça. Mais la dernière fois que je l'ai vu, soit il y a moins de deux heures, il parlait plutôt d'officialiser, de passer d'une relation secrète à une relation avérée. Toujours dans le but de faire parler. Mais nous verrons cela avec lui, parce qu'il est le mieux placé pour parler de ce qu'il veut.

Maelys fit la moue.

- Pour ce que ça change... Mais bon... d'ici une bonne semaine, ça ne tiendra plus.

Sad qui suivait distraitement la conversation, un peu agacé, tiqua à cette dernière assertion.

- Pourquoi ? demanda-t-il.

- Parce que si tu commences à collectionner les... comment tu as dit ? Les premiers rôles féminins et les mannequins tendance du moment dès que tu ne seras officiellement plus marié, il y a peu de chance pour que ça ne se sache pas, d'une part, et que l'hypothèse de notre couple tienne encore, d'autre part. Je ne connais pas beaucoup de filles qui ne se vanteraient pas de s'être envoyées en l'air avec toi.

- Ha... Ça... murmura-t-il avec un petit sourire. Je ne vais pas non plus sauter sur tout ce qui bouge dès le divorce annoncé... Et puis les histoires de tromperie, ça fait toujours son petit effet.

Les deux femmes eurent exactement la même réaction. Petit froncement de sourcils puis gêne et elles détournèrent le regard. Pour Nihilys, c'était de la surprise, parce qu'elle pensait qu'il y avait un peu plus que ça entre eux deux. Mais pour Maelys, ce n'était qu'une confirmation, et elle ne regrettait pas du tout d'avoir été sage la dernière nuit qu'ils avaient passée ensemble.

- Bon, et bien pourquoi pas ? conclut Maelys en se laissant absorber par le paysage qui défilait par la fenêtre. On a même déjà convenu de tout le scénario ensemble, de la rencontre aux disputes. Mais il abuse un peu quand même.

- On est vraiment obligé de continuer ça ? enchérit Sad. Il l'a son buzz... Ça me gonfle, tout ça...

- Je comprends que ça te gonfle, mais on ne va pas revenir là-dessus, répondit Nihilys. Tu as accepté un rôle, tu le joues jusqu'au bout, quelles que soient les exigences du metteur en scène.

Maelys hocha vaguement la tête.

- On verra ce qu'il a à en dire, dit-elle finalement. Et si tu ne veux pas, je t'appuierai. C'est vrai qu'on a déjà fait pas mal.

- Oui... soupira-t-il. On verra...

Il se laissa glisser jusqu'à son épaule et ferma les yeux. Ça lui avait manqué. C'était si doux.

- J'aimerais qu'on me fiche la paix jusqu'au procès... murmura-t-il.

Elle glissa une main autour de ses épaules et caressa doucement son bras en le serrant contre elle. Sa robe se portant sans soutien-gorge à cause de son décolleté plongeant, c'était un peu gênant, mais avec lui, elle n'en était plus à cela près.

- Ça se comprend. Tu es stressé ?

- Ouais... C'est le pire rôle de ma vie...

Elle se pencha sur lui et lui déposa un baiser sur le front. Ce qu'elle n'avait pas prévu c'est qu'en faisant cela, tordue comme elle l'était dans cette pose, elle lui mit littéralement un sein dans la figure. Elle s'écarta avec un léger pardon, cachant son embarras.

- Je suis désolée, dit-elle en rajustant sa robe comme si de rien était. Est-ce que je peux faire quelque chose pour t'aider ? Te changer les idées ?

- Tu t'en sors pas mal, je trouve, fit-il en se retenant de rire.

- Arrête de te moquer ! ordonna-t-elle en le chatouillant.

- Je me moque pas, rit-il. C'est vrai ! C'était très efficace. En une seconde, j'ai tout oublié. Très jolie robe, ma douce.

Elle rit aussi, attendrie.

- Merci. Si je suis une femme amoureuse, il faut que je fasse des folies pour te plaire, sinon ce n'est pas crédible.

- J'espère quand même que tu ne comptes pas refaire ça devant les photographes, se moqua-t-il.

Elle serra des dents et l'attaqua à nouveau, sourcils froncés.

- Je vais te faire passer l'envie de te moquer de moi ! gronda-t-elle.

- Pardon, pardon. Très jolie robe, très jolie robe... fit-il hilare en cherchant à attraper ses mains.

Nihilys les regardait chahuter le sourire aux lèvres.

- Allez, mon jeune couple, arrêtez de vous chamailler et réajustez vos tenues, nous sommes arrivés. Oh ! Rion est déjà là ! ajouta-t-elle en collant son nez à la vitre. Je croyais que...

Ni Maelys ni Sad n'entendirent la fin de sa phrase parce qu'elle était déjà sortie profitant du bouchon qui bloquait la voiture. Maelys la vit faire mine de passer devant son agent sans le voir. Rion la remarqua tout de suite et lui emboita le pas pour la rattraper.

- Ils sont incroyables ces deux là, fit-elle en réajustant sa robe.

- Ouais... L'horreur... soupira-t-il les yeux rivés sur la jeune femme. Non, mais t'as vu le petit jeu d'ado pré pubère ? Elle a passé la journée à se préparer pour la soirée, la totale. Et elle m'a dit : "ne m'attends pas ce soir, je rentrerai de mon côté"... Je te jure...

- De vrais gamins, approuva Maelys avec une pointe d'amusement. C'est marrant, parce que... c'est exactement ce que j'ai dit à Rion.

Elle lui sourit. Il se demanda si elle insinuait bien ce qu'il avait cru comprendre qu'elle insinuait...

- Tu les encourages ? demanda-t-il prudemment.

- Oui, c'est sûr. Moi, je trouve cool qu'ils s'entendent bien.

Il n'avait pas relevé. Maelys laissa tomber, ça ne servait à rien d'insister.

- Jusqu'au jour où tu te retrouves à devoir te coltiner un manager dépressif... marmonna-t-il.