La Princesse des Monts Vertigineux

Chapitre 29. Les Marais de la Mort

Chapitre 29.

Les Marais de la Mort

Les marais de la Mort s'étendaient à présent à leurs pieds. Froids, vides et répugnants, des bulles crevaient la surface d'une eau verte et sale. Quelquefois, on apercevait des pattes gluantes qui en sortaient ou une peau écaillée qui fendait l'eau, il ne valait mieux pas rencontrer son propriétaire !

Les marais ne semblaient pas avoir de fin, s'étirant jusqu'à l'horizon.

Voilà maintenant deux heures qu'ils les survolaient, juchés sur les phénix.

Les bêtes avaient tentées plus tôt de retrouver Faliaka, elle semblait s'être bel et bien évaporée dans la nature. Pour couronner le tout, voilà qu'Angélica s'était transformée en...en quoi d'ailleurs ? Ils ne sauraient le dire...

Quoi qu'il en soit, Jenny savait que le vieillard qui habitait ces lieux détenait la réponse à toutes leurs questions, encore fallait-il repérer sa chaumière dans cette purée de poix !

La puanteur des lieux commençait à leur donner des nausées, dès qu'ils tournaient la tête, une créature noyée de brouillard apparaissait furtivement.

Une seconde après, elle n'y était plus.

- Je croyais que tu savais où on allait ! lui reprocha Laurental.

Elle contre attaqua : tu permets ! Ça fait une éternité que je ne me suis pas rendue ici, la dernière fois que je suis venue, des plaines ensoleillées remplaçaient ce marais visqueux !

- Je me souviens qu'un grand chêne s'élevait en plein milieu reprit-elle, son ombre apaisante nous enveloppait comme l'étreinte d'une mère. Des jeunes gens y venaient souvent, gravant leurs noms entrelacés sur son énorme tronc raconta t-elle, perdue dans ses pensées.

Je me plaisais à courir, les cheveux aux vents à travers les prairies verdoyantes, je m'arrêtais près des ruisseaux, j'observais le ciel d'un bleu pur, rêvant d'une autre vie...

- Tu ne m'as jamais parlé d'un tel endroit ! regretta Laurental.

Sa soeur plongea son regard dans le sien : c'était mon lieu secret ! répliqua t-elle avec nostalgie, un paradis sur terre...jusqu'à ce qu'il tourne au cauchemar.

- Que s'est-il passé ? s'enquit son frère.

Les yeux de Jenny se remplirent de larmes. Un long silence s'installa avant qu'elle prononce un seul mot.

Enfin, elle se décida à raconter : C'était une journée anormalement venteuse, une vraie tempête se déchaînait sur les plaines.

J'avais l'habitude de retrouver mes amis près d'une rivière. Nous l'avions baptisé la rivière de la Chance parce qu'elle nous avait réuni un an auparavant.

Les pans de mon manteau me cinglaient les côtes tandis que j'avançais péniblement, une main sur mon chapeau pour le retenir de s'envoler. J'avais l'impression que mes pieds pouvaient quitter la terre d'une minute à l'autre et que je me perdrais alors dans le ciel pour toujours.

Après de grands efforts, j'arrivais à la rivière de la Chance, elle allait bientôt changer à jamais de nom à mes yeux...

L'eau qui était habituellement calme s'était transformée en un torrent incontrôlable qui ravageait tout sur son passage.

Alors que je cherchais mes amis avec peine, les yeux irrités à cause des bourrasques, je perçus des éclats de rires. Le vent les trahis, je me retournais, les trouvant de plus en plus violentes, je les vis devant moi. Ils me souriaient, savourant ma surprise, puis ma peur.