Chapitre 28

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Nous sommes au bar depuis une quinzaine de minutes. Lou et moi attendons notre énième commande.

Bryan et Léo rient entre eux, tandis qu'Asher semble installé sur un sofa avec ce même type blond. Nos regards se sont croisés quelques fois, mais aucun sourire ou coup d'œil enjôleur ce soir.

Mon verre apparaît enfin sous mes yeux. Néanmoins, il m'est aussi vite retiré d'une main rapide.

- Alors comme ça, on se saoule ?

Je fronce les sourcils, pas très rationnelle après avoir bu tout cet alcool. Quand mon regard se pose enfin sur mon interlocuteur, je marque un écart entre lui et moi. C'est le même type que sur la piste de danse, il n'a pas dû retenir la leçon.

Il porte mon verre jusqu'à ses lèvres pour en avaler une gorgée.

En prenant aussitôt conscience qu'Asher n'est pas loin, je braque discrètement mon regard vers lui. Heureusement, il ne semble pas l'avoir remarqué pour le moment.

- Tu ferais mieux de foutre le camp.

Il fait tourner mon verre, où plutôt son verre désormais, entre ses doigts disgracieux.

- Je n'ai pas peur de ton copain, ma jolie.

Je fronce les sourcils.

- Ce n'est pas mon copain.

Il affiche à présent un rictus malsain. Je poursuis :

- Je t'ai demandé de partir.

Lou qui n'en rate pas une miette, se tient prête à réagir s'il en arrive aux contacts. Mon amie tapote soudainement mon épaule en me désignant Asher qui avance dans notre direction.

Il se plante à proximité du type avant de lui ordonner :

- Dégage.

Son timbre de voix est terne, presque alarmant.

Tous les deux ne tardent pas à se faire face.

- À part les menaces, tu es capable de mieux ?

Je sais incontestablement, que si le type se risque à la confrontation, la soirée encourt une fin d'une toute autre ambiance.

Asher préfère rester silencieux, faisant comprendre par la même occasion que les menaces permettent une mise en garde et que ce qui vient ensuite ne lui plairait surement pas.

- Tu veux que je dégage hein ?

Malgré la musique qui bat encore son plein, ses dires sont clairs.

Asher est au maximum de sa patience, tandis que le type qui s'était assis se relève de son tabouret avant de rester immobile devant Asher.

- C'est ce que je viens de dire.

Ses poings sont contractés, son ton est glaçant.

Dynamiquement, le type s'avance suffisamment proche de moi pour que sa bouche ne soit plus qu'à quelques centimètres de la mienne. Son souffle empeste l'alcool. Prise au dépourvu, je ne peux rien faire que de lui faire face sans me laisser abattre. Le torse d'Asher se soulève au rythme de sa respiration anormalement rapide.

Les lèvres du type s'étirent un peu plus, il se rapproche encore. Je ne suis pas rassurée, ma poitrine touchant pratiquement son buste.

Les phalanges d'Asher sont devenues blanches, je sais qu'il fait preuve d'une retenue sans failles pour l'instant.

De sa voix vaseuse, le type me quémande :

- Laisse-toi faire...

Je serre les dents pour me consigner de renoncer à tenter une quelconque prise de défense. Ses doigts insolents remontent de mon poignet à mon avant-bras, avant que je ne refoule son geste d'un revers de main.

Bryan, Lou et Léo se tiennent derrière Asher, sachant que quelque chose se trame.

- Tu te saoules, mais tu ne veux pas me baiser ?

Je le regarde hargneusement.

Il continue de me défier.

- Et ça...

Il attrape brutalement ma nuque pour me conduire bien plus proche de sa bouche.

- Ça ne te plaît pas ?

Je préfère fermer les yeux en essayant de le chasser de toutes mes forces.

Promptement, tout le poids qui me faisait front s'envole. Je rouvre les paupières en sachant sans l'ombre d'un doute ce qu'il se passe.

Lou s'exclame :

- Asher, il a compris !

Rien à faire, il enchaîne coups par coups, sans interruption. Bryan et Léo tentent de l'arrêter, en vain.

- Hailey, il t'écoutera probablement mieux que nous.

Je m'avance vers eux, les coups raisonnants contre la mâchoire du type.

Lou m'avertit :

- Si tu n'essaies pas d'intervenir, ça va finir à l'hosto ou en taule.

Je plante mon regard dans le sien.

- Il ne m'écoutera pas.

Lou indique :

- Essaie. Autrement, ça risque de mal finir...

Je tente le tout pour le tout en me baissant à sa hauteur. Au-dessus du type, il envoie ses poings un peu plus fermement à chaque fois.

- Asher...

Je fais en sorte de capter son attention, sans issue.

Je tente d'immobiliser l'un de ses bras cette fois.

- Asher, arrête, c'est bon.

Il est pris d'une fureur à laquelle je n'avais jamais été mesuré.

D'anciens souvenirs remontent à la surface. Calmer un ami en colère, ça m'était déjà arrivé par le passé, mais ce jour-là j'étais avec Mya. Cette fois, je dois placer mes espoirs dans le fait qu'il m'écoutera moi. Uniquement moi.

En constatant qu'il ne s'arrête pas, je perds mes moyens, larmes aux yeux.

- Il ne s'arrête pas Lou, bordel !

Elle se sent, elle aussi, impuissante. J'essaie encore, cette fois en prenant son visage en coupe.

- Asher, regarde-moi !

Il croise mon regard.

- Stop.

Son poing se suspend au-dessus de l'arcade du type. Il laisse ses bras retomber le long de son corps.

- Asher ?

Je tente de cerner son agressivité, douteuse.

Il ancre progressivement son regard au mien, avant de se rendre compte qu'il a était ravagé par une brutalité indéfectible. Il se relève doucement, d'abord sur un genou, puis l'autre avant de se redresser intégralement. Il tient péniblement debout, sans tanguer.

Sur le coup de l'agitation, je n'ai pas remarqué que certaines larmes ont franchi la barrière que je leur avais imposée depuis un long moment.

Il nous dépasse précipitamment, abandonnant le corps immobile de son défouloir, qui respire laborieusement.

Attire-moiOù les histoires vivent. Découvrez maintenant