NOAH

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-Noah ? Ai-je entendu appelé depuis la porte de ma mère.

Pourquoi j'étais resté chez moi, aujourd'hui ? Probablement parce que j'étais trop défoncé pour faire quoi que ce soit.

Je suis entré dans sa chambre. Elle me faisait pitié.

-Louise n'est pas là ?

-Non, tu te retrouves seule avec le fils camé. Pas trop déçue ?

-Tu crois que je suis heureuse de te voir dans cet état ?

-C'est toi qui l'a provoqué.

-Je ne pense pas. Déjà petit, je savais que tu aurais des ennuis plus tard. Et ce n'était pas sur ton père qu'il fallait compter pour t'éduquer.

-Tu le blâmes d'être parti mais tu n'as pas fait mieux. Tu ne t'es pas occupée de nous, tu nous a laissé seuls.

-Vous vous aviez tous les deux. C'était le principal.

-J'aurais aimé avoir une mère. J'avais perdu mon père mais toi, tu n'as jamais été vraiment là.

-J'ai fait tout ce que j'ai pu.

-Tu ne t'es jamais battue. Tu as laissé tes enfants être forcés de devenir des adultes bien trop tôt. Tu ne peux plus être étonnée si on se choisit nous au lieu de toi. S'il y a bien une chose que tu nous a appris, c'est ça.

Je ne sais pas si c'est la drogue qui m'avait encouragé à dire tout ça mais ça faisait un bien fou. Je suis sortie de sa chambre en la laissant là.

Je suis allé dehors, il fallait que je prenne l'air. Sans m'en rendre compte, j'étais en train de marcher et j'arrivais bientôt au banc où j'avais rencontré Eleanor. Elle était là et cela me réconforta. Je ne pourrais pas dire pourquoi mais j'étais complètement seul d'habitude. Alors la voir là, cela me remonta le moral un petit peu.

-Eleanor ? J'ai retenu ton prénom, cette fois.

-Noah. Ça va ?

Elle m'a lancé un regard interrogatif en regardant mes yeux. Ah oui, peut-être pas la meilleure idée de se promener dans la rue avec tant de drogue dans le sang.

-Je vais bien. Et toi ? Qu'est-ce que tu fais là ?

-Tu vas me trouver stupide...

-Tu m'as vu ? Je suis pas trop en position de te juger, là.

-T'as l'air plutôt... bien.

-Pour un mec drogué, tu veux dire ?

-Désolée.

-Je comprends. Tu sais, le corps s'habitue à tout. C'est pour ça qu'il en faut toujours plus. Je garde le contrôle, t'en fais pas.

-C'est ce qu'on dit... J'espérais te voir, en fait.

-Ah ?

-Je connais personne ici... Et Louise est avec Alec, alors...

-Je suis flatté que tu apprécies ma compagnie. Je crois que je préférerais être seul qu'avec moi-même. Enfin, techniquement, quand je suis seul, je suis avec moi.

Elle a éclaté de rire.

-Tu devrais peut-être éviter de te balader n'importe où dans cet état.

-Ouais mais je peux pas non plus rester chez moi. Je suis dans une impasse, tu vois.

-Tu veux passer à la maison ? M'a proposé Eleanor.

Elle a du se rendre compte de sa proposition car elle a rougi et s'est reprise :

-Enfin... je veux dire... on peut jouer aux jeux vidéos, par exemple ?

-J'adorerais ça, Eleanor.

On s'est souris tous les deux et je l'ai suivi.

-Tu veux manger un morceau ? M'a-t-elle demandé, une fois arrivés chez elle.

Elle habitait une superbe maison, un peu à l'écart des autres habitations. Je me suis promis de ne jamais l'inviter chez moi, c'était carrément l'opposé.

-Je veux bien si ça ne te gêne pas. Déjà que je squatte.

-Si je te propose c'est que ça ne me gêne pas.

Elle m'a passé des gâteaux, des chips et à boire.

-Tu ne prends rien ? L'ai-je questionné, en voyant que j'étais le seul à me servir.

-Non, merci.

-Qui peut résister à des chips, sérieux ? Tu es sûre ?

-Oui, a-t-elle fait, plus sèchement.

-Ok, ok.

J'ai préféré me taire et manger, sans lui poser d'autres questions. J'avais l'impression qu'il y avait beaucoup de sujets sensibles chez elle. Et je pouvais dire la même chose de moi, d'ailleurs.

-Tu connais ma soeur depuis longtemps ? Je ne vous avais jamais vues traîner ensemble avant...

-Depuis le collège mais on s'était perdues de vue. Je les ai croisés récemment, Alec et elle, à la fête de l'école.

-Oh, tu as un petit frère ou une petite soeur ?

-Un petit frère. Deux, en fait. Enzo qui a six ans et Connor qui en a quinze. Connor est très ami avec Alec, d'ailleurs...

-Ah, c'est cool ça. J'imagine qu'avoir deux garçons à la maison, ça ne doit pas toujours être évident.

-C'est sûr mais à la fin, on est content de les avoir.

-Clairement. Je ne sais pas ce que je ferais sans Lou.

-En plus c'est ta jumelle, la relation doit être encore plus forte.

-Elle l'était, en tout cas. J'ai tendance à tout gâcher avec les gens.

-Je te comprends. Ce n'est pas évident de s'intégrer. Il faut toujours se montrer au meilleur de soi-même devant les autres.

-Pas forcément. Enfin, tu n'as pas tort, je n'ai jamais trouvé quelqu'un capable de m'accepter tel que je suis. Je sais que j'ai énormément de défauts et que je foire tout ce que j'entreprends. Même si Louise m'a toujours soutenue et qu'elle le fera probablement toute sa vie, je sais que je l'ai déçue. Elle est beaucoup plus forte que moi.

-Tu ne peux pas le savoir, ça. Et tu n'es pas faible, au contraire. Tu te bats encore malgré les galères.

-Je suis défoncé la moitié du temps, si t'appelles ça se battre...

-J'ai plusieurs fois penser à mettre fin à ma vie.

Eleanor m'a regardé et a baissé la tête immédiatement. Elle ne s'attendait sûrement pas à me faire une telle révélation alors qu'on ne se connaît que très peu.

-Je... Je ne voulais pas t'avouer ça.

-Je ne te juge pas. Je peux comprendre. Ça fait de toi une personne forte, plus que n'importe qui.

Elle m'a souri timidement. 

Destinées CroiséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant