-L'anxiété, c'est beaucoup plus que de la simple peur pour moi. C'est une appréhension permanente, comme si c'était dans le fond et que ça ne vous laissait jamais vraiment tranquille. Une fois que ce sentiment a une prise sur toi, j'ai l'impression qu'il ne s'en va jamais réellement. C'est insidieux, ça peut revenir à tout moment même quand tu croyais t'en être débarrassé pour de bon. Ça te met à terre quand tu croyais être plus forte que ça. Et les gens ne le comprennent pas vraiment. À vrai dire, moi-même, je ne le comprends pas vraiment.
Je relevais la tête. Les personnes assises autour de moi me regardaient, d'un air si compréhensif que j'aurais pu en pleurer. Après avoir parlé à Eleanor, cette dernière m'avait convaincu d'aller voir un psychologue. Et après avoir fait des recherches, j'étais tombée sur un groupe de parole, accessible à tout le monde, pour qui en avait besoin. J'avais passé la majeure partie de l'heure à écouter des histoires et des problèmes en tout genre en passant par les addictions, la dépression ou diverses maladies mentales. Je n'avais pas voulu prendre la parole immédiatement, cela me gênait un petit peu, je n'avais pas l'habitude de me confier à autant de personnes sur ce genre de sujet. Mais je m'étais finalement lancé et les mots semblaient sortir naturellement, sans effort, sans les avoir préparé dans ma tête avant. Au final, ce n'était pas si compliqué que je l'aurais imaginé. Et cela me faisait du bien. J'avais parlé de mon anxiété, de comment j'avais envie de me faire du mal à certains moments, de mon refuge dans l'alcool, aussi. J'avais mentionné tout cela à un groupe d'inconnus et cela me semblait surréaliste. Mais étonnamment, personne n'avait l'air de me juger. Et comment auraient-ils pu ? Ils avaient chacun leurs propres problèmes.
-Il y a des thérapies cognitivo-comportementales très efficaces et assez courtes pour traiter l'anxiété et ce genre de problématiques, est intervenue la psychologue qui animait la séance. Cela pourrait être quelque chose que tu pourrais essayer. En tout cas, je te trouve très courageuse d'arriver à aborder ce sujet compliqué devant tout le monde. Et je trouve que tu exprimes très bien ce que tu ressens.
J'ai souri timidement.
En sortant de la séance, je respirais l'air frais dehors. Je m'imaginais mentalement où je me trouvais il y a quelques mois de cela. Et tout ce qui avait changé depuis. Je ne m'étais jamais considérée comme quelqu'un de chanceux dans la vie auparavant. Force était de constater qu'aujourd'hui je ne pensais plus ainsi. La chance avait tourné ? Peut-être. Ou peut-être que j'avais juste appris à guérir de mes blessures et, avec l'aide de quelques personnes, j'avais évolué. Je me sentais beaucoup mieux, j'apprenais petit à petit à m'aimer et à accepter mon passé. Mon frère allait bien, il était amoureux d'une fille incroyable et même d'une amie. Mon meilleur ami était en paix avec lui-même, enfin. J'avais trouvé un homme qui me respectait et qui m'aimait telle que j'étais. Et surtout, qui me poussait à devenir meilleure chaque jour. Alors, si je devais remercier la chance pour tout cela, je le ferais avec joie.
-Coucou mon coeur, m'a lancé Robin en débarquant devant moi.
Il avait promis de me rejoindre pour aller manger avec moi, après la session de groupe.
-Comment ça a été ? M'a-t-il demandé.
-C'était assez libérateur. Tu devrais essayer.
Il a éclaté de rire.
-Un date groupe de parole ? Tu me vends du rêve, là...
J'ai rigolé à mon tour en réfléchissant à l'ironie de la situation. Des êtres malmenés par la vie, brisés, qui s'étaient retrouvés et étaient tombés amoureux. Il y avait de quoi en rire. Qui sait ce que cela allait donner ? Pour l'instant, j'étais plutôt optimiste.
-Je suis fier de toi, a dit Robin.
Ces paroles ont instantanément réchauffé mon coeur.
-Merci. Faire ta rencontre m'a fait tellement de bien, je crois que c'est la meilleure chose qui me soit arrivé dans la vie.
-Arrête tu vas me faire pleurer. Qui l'aurait cru, hein ?
-Mon barman préféré, j'aurais pu m'en douter.
-Ah oui ?
-Je t'ai trouvé incroyablement sexy dès la première fois où je t'ai vu.
Il a rigolé en m'embrassant.
-Je t'aime, Robin.
-Moi aussi, je t'aime.
Après avoir mangé, nous nous sommes promenés dans un petit parc où nous avons discuté jusqu'à ce que la nuit tombe. Il s'est soudain allongé dans l'herbe et m'a regardé. D'un air amoureux qui fit fondre tout mon être. Alors, je l'ai imité, ignorant l'humidité de l'herbe et l'air frais en cette soirée.
-Tu crois que c'est de la chance ? Tout ce qui nous arrive ? Ai-je soudain demandé en le fixant, droit dans les yeux.
-Non. Je crois que c'est le destin, a-t-il murmuré en regardant les étoiles.
-T'y crois à toutes ces conneries ? On l'emmerde le destin.
-Tout ce que je sais c'est que la plus belle fille que je connais est dans mes bras en ce moment et si c'est grâce au destin, je le remercie du plus profond de mon cœur.
J'ai souri, m'imprégnant des paroles qu'il venait de prononcer. J'ai, à mon tour, regardé les étoiles. Le destin, je ne sais pas. De la chance, j'en ai certainement eu un peu. Mais je pense que si tout ça nous est arrivé, c'est parce qu'on s'est battus pour cela. On n'a pas abandonné et on a tout donné. Malgré les problèmes, malgré les difficultés. On y est arrivé. On l'a fait. Je crois que c'est ce qui me rend le plus fière. Pour la première fois de ma vie, je suis fière de moi et j'ai confiance en l'avenir. Et je crois que c'est ce que j'ai accompli de plus grand dans ma vie.
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Destinées Croisées
Ficțiune adolescenți«Tu crois que c'est de la chance ? Tout ce qui nous arrive ? a demandé la fille, allongée sur le dos dans l'herbe à côté de son ami. -Non. Je crois que c'est le destin, a murmuré le jeune homme en regardant les étoiles. -T'y crois à toutes ces conne...