ALEC

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Je suis descendu au salon. Mes parents venaient de franchir la porte, ils ne semblaient pas particulièrement de mauvaise humeur ce qui m'a légèrement rassuré. Je les ai fixé un long moment avant d'oser articuler une phrase.

-Est-ce que je peux vous parler ? Ai-je demandé, timidement.

Ils ont échangé un regard, surpris, et se sont avancés dans le salon.

-On peut s'asseoir ?

-C'est si grave que ça ? m'a interrogé ma mère en riant.

Je n'ai pas répondu et elle a effacé le sourire de son visage d'un coup.

-Alec ? Qu'est-ce qu'il se passe ?

Nous nous sommes assis sur les canapés du salon, mes parents côte-à-côte et moi en face d'eux. J'ai pris une profonde inspiration, je sentais mon coeur battre la chamade et j'avais l'impression que je pouvais m'évanouir à tout moment.

-Il faut que je vous parle de quelque chose. Quelque chose que j'aurais dû vous dire depuis longtemps...

Mes deux parents me fixaient d'un air grave et je sentais la tension s'accumuler dans la pièce. Personne n'était serein et tous les textes que j'avais récités auparavant avaient disparu de ma mémoire. Je ne savais même plus par quoi commencer alors à la place, j'ai imaginé Connor qui m'encourageait et je me suis lancé.

-C'est par rapport à moi.

-Tu as fait quelque chose de mal ? Tu sais, on fait tous des conneries quand on est jeune, a murmuré mon père. Tu vas nous faire avoir une crise cardiaque à agir ainsi.

-Non, je n'ai rien fait. C'est plutôt par rapport à comment je suis.

À ce moment, je ne savais pas encore si j'aurais besoin de dire les mots exacts ou si mes parents comprendraient assez tôt de quoi je voulais parler. Je suppose que pour certaines personnes, comme Connor par exemple, c'était facile de le comprendre, ça paraissait presque évident. Mais, moi, jamais mes parents n'auraient pu imaginer quelque chose comme cela. Cela rendait la chose bien plus compliquée à révéler.

-J'aimerais beaucoup que ça ne change rien. Que votre opinion de moi reste la même. J'ai besoin que vous preniez du recul sur ce que je vais vous dire.

-Comment veux-tu qu'on le fasse si tu ne nous dit même pas de quoi il retourne ? A dit mon père, d'une voix plus forte.

Ma mère a posé sa main sur son épaule pour le calmer un peu. Ça m'a beaucoup déstabilisé, s'il réagissait déjà comme ça alors que je n'avais même pas commencé, qu'est-ce qui allait suivre ?

-Tu sais que tu peux tout nous dire, Alec, a annoncé ma mère. Mais si tu pouvais être un peu plus explicite...

-Je ne suis pas comme tout le monde. Je suis différent. Je l'ai toujours été, d'ailleurs mais j'ai mis beaucoup de temps à le réaliser.

-Différent ? Comment ça ?

J'ai baissé les yeux et j'ai finalement déclaré la phrase la plus compliquée de toute ma vie.

-Je suis gay.

Pendant plusieurs minutes, je n'ai entendu que le silence. J'avais toujours les yeux baissés, je ne voulais pas risquer de croiser le regard de mes parents. J'avais envie de vomir, mes mains tremblaient, c'était une horreur. Je ne sais pas si j'attendais quelque chose en particulier mais c'était si confus dans mes pensées que je n'étais pas capable de réfléchir pour dire quoi que ce soit d'autre. J'avais juste envie de disparaitre.

-Alec, qu'est-ce que tu racontes ? Mon père a finalement pris la parole.

J'ai fini par relever les yeux et j'ai vu le regard choqué de mes parents. Je n'arrivais pas à y voir du jugement. Juste de la surprise. Une grosse surprise, en vérité.

-Tu plaisantes, n'est-ce pas ?

J'ai failli pouffer de rire. Comment aurais-je pu plaisanter une seule seconde sur un tel sujet ?

-Non. C'est ce que je suis. Et je vous le dis parce que je me cache depuis trop longtemps. J'estime que vous avez le droit de savoir et j'espère que vous saurez bien réagir.

-Bien réagir ? Tu te fous de nous ?

J'ai cru qu'on me poignardait en plein coeur. Ça ne s'annonçait vraiment pas bien.

-Tu ne peux pas être comme ça, tu es notre fils, a chuchoté ma mère.

Aie, ça faisait mal.

-Et pourtant, c'est la vérité. Je suis désolé de vous décevoir.

-Je n'accepte pas ce que tu dis, a dit mon père en se levant. On ne t'a pas élevé comme ça. Pour que tu deviennes un...

-Un quoi ?

-Peu importe. Reviens à la raison, Alec. Tu n'es pas comme ça, on te connait mieux que personne et ce n'est pas toi, ça.

S'ils savaient qu'ils ne connaissaient plus depuis mon adolescence.

-Si, c'est moi. C'est moi, plus que jamais. Et ça n'a rien à voir avec vous. Je suis comme ça et je ne l'ai pas choisi non plus.

-Si tu veux rester sous ce toit, tu feras des efforts.

-Qu'est-ce que tu es en train de dire ?

Ma mère était toujours assise sur le canapé, des larmes coulant sur ses joues. Mais elle ne prenait plus la parole. Elle ne me défendait pas face à lui.

-Je n'accepterais pas quelqu'un comme toi dans notre maison. Alors, soit tu te raisonnes et tu reprends tes esprits, soit tu pars.

-Et tu voudrais que j'aille où ?

-J'en ai rien à foutre ! Chez un de tes copains par exemple ! Parce que je suppose que tu t'es amusé depuis tout ce temps.

Je l'ai fixé, bouche bée. Pourquoi est-ce que j'avais l'impression qu'il insinuait que parce que j'étais gay, j'avais couché avec tous les mecs du quartier ?

-Si tu veux tout savoir, oui j'ai un copain. J'ai un copain qui m'aime et que j'aime, ai-je déclaré, en sentant la colère monter.

-Et ben, je crois que tu as choisi alors. Va le retrouver et je te préviens, ne reviens pas ici. Je ne veux pas te voir tant que tu tiens ces propos. Tu nous fais honte.

-Tu ne vas rien dire ? Ai-je lancé à ma mère, les larmes aux yeux.

-Je..., elle a regardé mon père, l'air impuissant.

-Ok, j'ai compris. Alors, je pars. Je voulais vraiment y croire, vous savez. Croire que vous pouviez m'accepter, parce que je suis votre fils, parce que vous m'aimez. Apparemment, ce n'est pas suffisant.

Je me suis dirigé vers la porte avec un petit espoir que l'un deux viendrait m'arrêter. Mais ils ne l'ont pas fait et j'ai senti un poids énorme sur ma poitrine.

-Je sais que je vous ai déçu mais vous l'avez fait aussi, ai-je finalement dit en partant de chez moi.

Je ne me rappelle plus du chemin que j'ai fait pour aller chez Connor. Je pleurais, ça c'était certain. Mais je ne me souviens de rien jusqu'à ce que j'arrive dans la chambre de mon copain et que lui et ma meilleure amie parviennent après un long moment à calmer mes pleurs.

Destinées CroiséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant