Chapitre 14 - Des reproches et des excuses (partie 1)

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Nouveau chapitre ! Il s'agit d'un flashback qui prend place juste après le précédent (chapitre 6). Il a son importance pour l'intrigue, j'ai absolument adoré l'écrire et approfondir un peu plus la relation entre Ambroise et Lizzie ! Et il est plus long que prévu 😂  je le découpe donc en deux parties. Bonne lecture :)


Trois ans plus tôt



Lizzie ne retournerait jamais voir Ambroise.

Elle se l'était juré.

La vision du corps du baron de Mésille qui s'effondrait au sol la hantait — elle aurait voulu effacer à jamais cette image de son esprit.

Ce qu'Ambroise avait fait était impardonnable. Lui mentir ainsi. La manipuler ainsi. Il ne lui avait même pas accordé la danse qu'il lui avait promis. Dès qu'elle avait été en état de bouger, elle avait regagné la sécurité de la Pension Royale. Tout son corps était perclus de souffrances et des ecchymoses constellaient son corps. Elle avait passé deux jours et deux nuits absolument détestables dans la chambre d'Ambroise. Elle ne lui avait pas adressé la parole, malgré ses tentatives pour engager la discussion lorsqu'il venait prendre de ses nouvelles. Il ne dormait pas dans la pièce — c'eût été inconvenant, et Lizzie devait avouer qu'elle jubilait presque de le priver de son lit.

La veille, grimaçante de douleur, elle s'était éclipsée sans un mot, avant la visite matinale de son mentor. Hébétée comme elle l'était, elle avait mis plusieurs heures à se rendre compte que la bague de saphir ornait toujours son doigt. Elle l'avait enlevée avant que quiconque ne s'en aperçoive, et l'avait glissée dans la poche de son jupon.

Ce matin, Ambroise s'était présenté à la Pension alors qu'elle sortait du réfectoire. La foule des élèves s'était instinctivement écartée de son uniforme, et elle n'avait pas pu l'ignorer. Il lui avait annoncé que, puisqu'elle allait mieux, il l'attendait à la tombée de la nuit pour reprendre leurs séances habituelles. Elle avait répondu d'un hochement de tête. Elle avait décidé qu'elle resterait muette jusqu'à ce qu'il s'excuse. Mais il n'était pas de ceux qui s'excusaient. Alors, après avoir ruminé sa rage, elle avait changé de stratégie. Elle n'irait plus le voir.

Le lendemain, épuisée par une nuit peuplée de cauchemars et par son corps courbaturé qui la faisait souffrir au moindre mouvement, elle s'octroya le luxe de dormir plutôt que de se rendre à sa leçon matinale avec Percival van Klaes. Elle suivait ses cours depuis quelques mois. On — qui que soit ce on — avait décrété qu'elle devait apprendre le wallend. Le percepteur était d'un ennui mortel, et Lizzie n'était pas d'humeur à affronter sa voix monocorde.

La journée tirait à sa fin ; les classes étaient terminées, et les pensionnaires avaient un temps libre avant le souper. Il faisait trop froid et trop pluvieux pour profiter des jardins, et le flot des jeunes élèves se dirigea vers la salle commune. À cette heure, elle rejoignait d'ordinaire Ambroise. Mais aujourd'hui, la nuit tombait, et elle avait prit la résolution de ne plus jamais emprunter le chemin qui menait à leur lieu de rendez-vous.

Le souvenir du théâtre désaffecté l'emplissait désormais de crainte.

À la fin d'une leçon d'histoire dispensée par madame Constance, Lizzie demeura un instant à sa place. Pour la première fois depuis longtemps, elle n'avait pas besoin de se presser. De quitter la chaleur de la Pension pour se glisser dans la nuit glacée de l'automne. Elle dissimula le sourire qui s'esquissait sur ses lèvres.

Adélaïde se planta devant elle en fronçant les sourcils.

— Tu ne vas pas voir tes précepteurs, Lizzie ?

La Lame des Bas-Royaumes / 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant