Nouvelle ère

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Ça fait un peu plus d'un mois que l'album est sorti. Il a reçu un très bel accueil de la part des gens comme de la critique musicale. Pour dire vrai, il a encore plus de succès que ce à quoi on s'attendait. Je continue de surveiller parfois leurs réseaux sociaux et leurs vidéos YouTube ; les vues et les ventes ne font qu'augmenter. J'en suis ravie, mais à dire vrai ça me fait bizarre, j'ai du mal à réaliser que derrière tous ces chiffres et ces commentaires se cachent de véritables personnes. J'arrive à ressentir tout cet enthousiasme et toute cette réactivité de leur part mais je ne sais même pas ce que ces milliers représentent visuellement. Et je ne suis pas sûre que les autres soient plus avancés que moi sur ce point là. Dans tous les cas, le projet marche et les critiques que j'ai pu lire de la part de la presse sont plus qu'honorables.

« Sur tous les titres, soutenus par des prods habiles, on retrouve des perles d'écriture, des ping-pongs de haute volée, un souffle dingue et un humour féroce »
« On se surprend à aimer suivre ces deux potes »
« L'un des meilleurs disques de rap français de l'année »
« Au fil de ces chansons écrites comme des courts métrages, le tandem renoue avec une vertu trop souvent oubliée dans le rap français : l'humour et l'autodérision au fil de textes inventifs et d'interludes hilarants. »

Il m'arrive de leur envoyer les liens des articles par message, auxquels ils me répondent des emojis qui sourient ou des petits paragraphes sur ce qu'ils en pensent, selon l'envie.
En ce moment on ne se voit pas trop ; ils sont pris par les nombreuses interviews et tout le tralala, et je ne compte même plus le nombre d'allers-retours faits entre Caen et Paris ces dernières semaines. Ils ont cependant donné quelques interviews ici, heureusement, et celles postées sur YouTube atteignent déjà plusieurs milliers de vues.
Comme m'avait dit Orel, ils se préparent pour tous les showcases qui sont programmés et qui vont s'étendre jusqu'au printemps au moins. Je n'y ai pas encore assisté mais ils en ont déjà donné deux, un à Paris et un à Amneville. Apparemment Ablaye a très vite reçu beaucoup de demandes de la part des boîtes. Il n'y a pas de doute sur le fait que les gens continueront d'être au rendez-vous.
Cet engouement se manifeste un jour dans la vie réelle, alors que je suis à la fac. En sortant d'un bâtiment en même temps que d'autres élèves de ma classe, des vibrations secouent la poche de mon jean. C'est Gringe qui m'appelle.

« - Allô ?

- Ouais Ariane ça va ? Dis-moi, enchaîne-t-il sans attendre ma réponse, t'as pas vu mon bonnet ?

- Va falloir être un peu plus précis sur la description parce que des bonnets t'en as plein, Gringe.

- Mais si tu sais... mon bonnet rouge là, quand toi et Ablaye vous vous amusiez à m'imiter comme des débiles l'autre soir. »

Je remarque à ma droite qu'une fille, debout en face d'un garçon assis sur un banc, s'est mis à me lancer des regards curieux.

« - Ah oui, lui... pour être franche avec toi je me souviens pas vraiment de ce qu'il est devenu après, mais je suis presque sûre que c'est Ablaye qui l'avait en dernier.

- Non mais vous faites chier sans déconner, j'en avais besoin et impossible de mettre la main dessus maintenant !

- Arrête un peu, t'en as littéralement une dizaine rien que dans ton placard, je lâche en écartant avec agacement les mèches de cheveux que le vent m'envoie dans le visage. Tu vas pas me dire que tu peux pas en porter un autre aujourd'hui ?

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