Contrairement à ce à quoi je m'attendais, je n'ai pas passé la nuit à vomir mes tripes.
Ça ne veut pas dire que j'ai passé une bonne nuit.
J'ai vérifié environ toutes les demi-heures mon écran. Au cas où.
Mais rien, pas de réponse. D'ailleurs, je trouve que ça m'affecte un peu trop. Je ne sais même pas pourquoi je m'accroche déjà alors que je le connais presque pas, ce gars. J'aimerais bien que ça ne me fasse ni chaud ni froid. Mais c'est tout le contraire.Et c'est pas bon...
En bref, ma nuit fut courte.
Le jeudi matin, en sortant de mon immeuble, j'entends déjà des éclats de voix et des bruits de roues provenant d'un peu plus loin. Je sais que certains sont là. Mais ils sont beaucoup... est-ce que lui, il va y être ?
Je m'apprête à le savoir, de toute façon. Je prends tranquillement ma route habituelle, sans musique dans les oreilles, pour une fois. Sur le passage piéton, je les aperçois déjà perchés, ou en train de faire différentes figures. Je baisse la tête de peur qu'on pense que je les épies - ce qui est bien évidemment le cas, mais pas question qu'on le remarque.
Plus je m'approche, plus j'entends leur musique.
Du rap. C'est toujours du rap.
Je m'attends presque à ce qu'il n'y ait plus aucun bruit, lorsque j'arrive en face d'eux. Mais fort heureusement, je ne suis pas le centre du monde, encore moins le centre de leur attention, alors ils continuent de faire leur vie sans vraiment me remarquer.
Parle pas trop vite.
En effet, j'entends peut-être un ou deux murmures. Est-ce qu'ils parlent de moi ? Aucune idée. Je me risque à lever la tête, pour savoir si oui ou non, Orel est avec eux.
Et il est là.
Adossé à une barrière, son fidèle skate toujours aux pieds, les mains dans les poches. Il porte un sweat vert kaki et une casquette noire. Je le regarde une seconde, voire deux, puis je trace ma route en longeant le skate park.
Je ne sais pas si je dois être satisfaite de l'avoir vu, ou au contraire, mécontente. Au moins, je sais qu'il est là.J'essaie d'éviter au maximum Alice, ce qui s'avère compliqué étant donné que nous sommes dans la même classe. Je remarque bien qu'elle me dévisage, qu'elle fait milles et une messes basses quand je suis à proximité. Je me sens vraiment mal à l'aise, et je replace inconsciemment mes cheveux par dessus la marque environ toutes les trois secondes. J'ai essayé de la camoufler comme je pouvais avec du fond de teint, ce matin, même si je ne suis pas adepte de ce maquillage d'habitude. Et on ne la voit presque plus, mais voilà ; j'ai l'impression qu'on ne remarque que ça. Et puis, même en la faisant disparaître, je pense que la classe entière, à l'aide du bouche à oreille, a plus ou moins compris ce que qu'il s'était passé.
J'essaye aussi d'éviter le sujet de la veille avec les filles. Elles n'y font pas allusion, mais je les imagine très bien, hier soir, en train d'en discuter par SMS, ou même en parler rapidement lorsque j'ai le dos tourné. Je ne suis pas dupe. J'observe tellement les autres que je sais très bien comment se comportent les filles entre elles.À midi, alors que nous sommes dans la cour, Manon n'est visiblement pas du tout motivée à faire la queue au réfectoire.
- J'ai tellement pas envie d'attendre pendant une heure. En plus c'est dégueu le menu, aujourd'hui...
- Ouais, j'avoue, répond Léa.
- Ça vous dit on va au McDo ?
- Ça va être blindé, non ? Puis moi, j'ai pas de sous, intervient Léonie.
- C'est bon, j'vous paye. J'te paye aussi, Ariane ?
- Euh, non, non. T'inquiète, j'ai un peu d'argent sur moi.
- Cool. Bon bah on y va alors, lance Manon en se dirigeant sans plus attendre vers le hall principal.
Nous la suivons.
Je n'ai encore jamais mangé ailleurs qu'au pitoyable réfectoire du lycée. Ça ne me dérange pas tant que ça, d'aller ailleurs. Un peu de changement, ça ne peut me faire que du bien.
Nous marchons pendant au moins dix bonnes minutes avant d'arriver au fast-food. Sur la route, nous croisons quelques élèves que je me rappelle avoir déjà vus dans les couloirs. J'avance derrière Léonie et Manon. À côté de moi, il y a Léa. Elles discutent mais je n'interviens toujours pas, préférant fixer mes pieds en laissant mon esprit divaguer.
On finit par arriver devant le McDo qui n'est pas aussi rempli que ce que je croyais. Il y a un peu de monde, mais la file ne dépasse pas jusqu'à dehors, alors ça va.
On entre, l'odeur familière de la nourriture tout sauf saine envahit mes narines. Les filles marchent devant moi, et en analysant les clients, mon regard tombe droit sur une copine d'Alice, dont je ne connais même pas le nom, et qui est en train de croquer en tentant de rester propre dans son burger. Pas besoin de vérifier, j'entends au même moment le rire cauchemardesque d'Alice.
Enfin, cauchemardesque, seulement pour moi.
J'ai presque envie de rire tellement la situation me dépasse.
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Sous Influence
FanfictionLe déménagement dans cette ville pluvieuse signifiait pour moi le début d'une vie ennuyante, monotone, et solitaire. Seulement, je n'étais pas au courant de quelles rencontres j'allais bien pouvoir faire ici. Je n'aurais jamais cru me laisser empor...