Sauvages

Emilie

-Je suis pas certaine que lui en parler soit la meilleure idée du siècle. Fit remarque Sang, mais j'étais décidée. 

-J'ai déjà tenté de lui cacher des choses en pensant que c'était pour son bien. Rétorquai-je. Ça ne s'est pas bien fini. Et de toute manière, elle a le droit de savoir. Elle... doit le savoir. Elle a perdu toute sa famille dans cet attentat, alors si nous avons une piste pour en trouver les coupables après tant d'années... ce devrait être la première personne au courant. 

-Elle, mais pas Santoni? Tu nous ferais pas un peu de favoritisme? 

-Santoni est déjà persuadé que sa théorie est la bonne. Il ne croira jamais aux éléments que tu as apportés. Ils sont trop... trop...

-Irrationnels? 

-Voilà. 

-Je ne suis pas sûre que ta copine trouve ça bien plus rationnel de savoir que si toute sa famille a été tuée, c'est à cause des folies grandiloquentes d'un mec qui pense pouvoir devenir immortel. 

-Je ne dis pas l'inverse. Mais c'est une piste, et si je dois l'explorer, je veux qu'elle le sache. Je refuse du lui cacher des choses, Sang. 

La grande femme ne dit rien, mais son regard était éloquent. Elle pensait qu'il fallait parfois mieux cacher certaines choses plutôt que de les dire et de risquer une mauvaise réaction. J'aurai été d'accord avec cela avant d'avoir perdu Nokomis pour lui avoir tant menti. Je ne voulais plus jamais avoir à vivre cela; c'était la raison pour laquelle j'avais décidé de la mettre au courant de la piste que nous avions dégottée avec Sang au plus tôt. Elle n'était revenue que la veille, mais nous avions assez attendu. Une rencontre devait être organisée avec Marc Lange. Et elle devait savoir que cet homme était lié à ceux qui avaient tant fait souffrir son peuple. Je pris une grande inspiration en observant le dos de la femme de ma vie, occupée aux fourneaux à nous préparer le repas de midi. Da-jee-ha et Santoni n'étaient même pas réveillés, et nous étions toutes deux épuisées après notre longue nuit. Ce n'était pas le meilleur moment, probablement. Mais je ne voulais pas repousser cela plus longtemps.

-Mi amor. L'appelais-je après m'être approchée.

-Hm? 

-Il y a quelque chose que je dois t'avouer. 

Ses sourcils se froncèrent immédiatement. Ma tournure de phrase pouvait porter à confusion, il était vrai. Je soupirai, et m'emplis de courage en admirant le tablier qu'elle portait si bien. Thomas m'avait dit un jour que j'avais un étrange kink avec les tabliers, et je l'avais remballé. Mais il avait probablement raison, finalement. 

-Rien de grave, ne t'en fais pas. Soupirai-je en m'adossant au bar, tout proche d'elle. Enfin... il s'agit de te mettre au courant de ce que nous avons découvert au sujet des traditionalistes. Et... de certaines personnes mal intentionnées qui les aident. 

-Oui, ça n'a rien de nouveau. Déclara-t-elle sans la moindre hésitation. C'est plutôt connu dans le monde suomen.

Je restai quelque peu abasourdie par cette réaction.

-T-tu veux dire que tout le monde sait que les Taa'kangow'a traitent avec des criminels non suomen?

-Bien sûr. Enfin, pas tout le monde le sait, bien sûr... ça ferait mauvaise presse. Mais ils doivent bien trouver leurs armes quelque part. Et comme c'est pas le grand amour entre les Chu'nu ehn, les mafias suomen quoi, et les Taa'kangow'a... eh bah ils ont pas vraiment d'autre choix que de se tourner vers des kowos. Même si ça leur plait pas plus que ça. 

-J'avais... oublié que tu avais été membre d'une Chu'nu ehn. Murmurai-je, en me rappelant la description qu'avait faite Pietro du tatouage qu'elle portait au visage. Tu ne m'en as jamais parlé.