Mon réveil vint me tirer des affres tourmentées sur sommeil, dans lesquels je me retrouvais, une fois encore, perdue dans ce gouffre noir et sans fond, à chuter sans fin, sans que personne ne puisse jamais me tendre une main secourable. J'étais couverte de sueur et pantelante, sous la lumière tamisée du soleil déjà haut au-dessus de l'horizon, et seule dans mes draps blancs. Julian était déjà parti. Cela faisait plus de deux semaines que j'étais revenue parmi les vivants, et qu'il était aux petits soins avec moi tous les jours, et surtout tous les soirs. Nous avions pu reprendre nos ébats, et il n'avait pas eu tort sur un sujet : une sorte de nouvelle ferveur s'était emparée de notre couple depuis mon enlèvement. Je le sentais à chacune de ses caresses, à chaque fois que sa bouche venait glisser le long de la mienne, et à chaque fois qu'il entrait en moi avec vigueur et tendresse à la fois. Ces séances de jambe en l'air nocturne, en plus d'être très plaisantes, me permettaient d'épuiser mon corps afin de m'endormir sans trop de difficulté, et espérer un sommeil sans rêve. Cela ne marchait pas tout le temps... j'avais passé plusieurs nuits blanches à ressasser les événements, à tourner en rond dans ma chambre, et à craindre que les ombres silencieuses du jardin ne soient celles des silhouettes noires venues m'enlever à mon foyer, quelques semaines auparavant. Et quand le sommeil m'atteignait enfin, c'était souvent pour me faire revivre l'horreur de la captivité, le tout dans une spirale infernale de visions terrifiantes qui me jetaient hors de mon lit avec des cris, en pleine nuit.
Les marques indélébiles, ancrées à jamais dans mon esprit, commençaient à se manifester. Des crises de paniques me prenaient soudain sans que je ne sois capable d'en comprendre l'origine ou la raison, trop aveuglée par mon sentiment de contrôle pour admettre que les séquelles étaient importantes. Et, surtout, je n'avais pas encore revu les Suomens. Ni Hen'Ruay, ni Da-jee-ha, ni aucun de mes ravisseurs, fort heureusement. Mais cette attente commençait à miner mon moral, moi qui me servais de l'idée de la revanche comme d'une béquille pour aller de l'avant. Sans Hen'Ruay, les secrets des Suomens restaient lettre morte, et toute chance de découvrir l'identité précise de mes ravisseurs, ainsi que des preuves contre eux, s'évaporait.
Je décidai de me lever, et descendait manger mon petit déjeuner. J'avalai avec nonchalance ma pilule, placée, comme chaque jour, à côté du plateau sur lequel trônaient tartines, fruits, et une tasse de chocolat chaud. Tant de petites choses sur lesquelles je ne m'étais jamais attardée avant d'en être privée, et qui constituaient désormais une routine familière qui me permettaient, inconsciemment, de tenter de recoller les morceaux, de revenir à ma vie d'avant. Un mirage des plus beau, mais également des plus fourbe.
Alors que je machais presque machinalement une de mes tartines préalablement beurrées, mon téléphone vibra. Je l'attrapai au vol sans perdre une seule seconde, avant de me lever soudainement pour me jeter sous la douche. Enfin un message... Hen'Ruay avait décidé d'enfin se réveiller. Je pris bien soin de me préparer et de me faire belle. Cette fois ci, je ne me rendais pas en territoire Suomen pour être une victime prête à se faire transpercer de flèches. Cette fois ci, j'y allais en tant que journaliste, mais surtout en tant que femme qui comptait bien montrer que rien de ce qu'elle avait subi ne l'avait ébranlée. Je voulais que ceux qui m'avaient jetée plus bas que terre me voient dans toute ma force et ma détermination, qu'ils tremblent à la simple idée de la vengeance que je pouvais être en train d'ourdir. Je passai donc un long moment à choisir une tenue à la fois confortable, pas une robe donc, mais également voyante et élégante, et posai mon choix sur un petit haut noir, accompagné d'un long pantalon aux jambes amples. Je passais un long moment à me maquiller dans la glace, observant avec longueur mes traits. Ils étaient anguleux et fins, comme l'avait fait remarquer Da-jee-ha, semblable en certains points aux Suomen. Mes longs cheveux blonds étaient noués en un chignon savant comme seule moi savais les faire, bien que le savoir-faire en termes de tressage de Da-jee-ha m'avait impressionnée. Enfin, je choisissais, comme à mon habitude, de mettre en avant ma poitrine proéminente, car, comme j'aimais à dire à l'époque, si j'avais des attributs permettant de m'ouvrir des portes, il aurait été honteux de ne pas m'en servir.
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Sauvages
RomantizmIls étaient là avant, alors ils ont été conquis. Ils refusaient de se soumettre, alors ils ont été chassés. Ils étaient différents, alors ils se sont battus pour le rester. Pour nous, ils semblent être des barbares surgis d'un autre âge, refusant la...