8 | Te mentir.

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Comme d'habitude, elles m'ont bien eue. J'ignore si je parle des endorphines ou des filles, par contre. Probablement les deux. À la fin de cette heure de footing – pourtant débutée en traînant les pieds – « Dance. Dance. Dance. » – de Lykke Li – m'entraîne dans son rythme, et c'est en sautillant joyeusement que je franchis l'une des portes à l'arrière du quartier général du diable, mon naturel retrouvé.

— Qu'est-ce que tu écoutes pour être de si bonne humeur ? s'exclame Mia, attrapant mon casque pour l'enfiler.

— Hé ! protesté-je faussement avant de danser en marche arrière, suivant le tempo de la mélodie qu'elle a désormais dans les oreilles.

— Je ne pourrais pas te dire ce que je veux dire, chantonné-je, souriante. Mais je peux danser, danser, danser. Alors quand je trébuche, regarde le rythme...

— Des paroles faites pour toi ! me coupe joyeusement Lys.

C'est une implacable vérité d'affirmer que je suis – plutôt – gauche. Donc je réprime un ricanement, préférant lui tirer la langue, accentuant mes mouvements, bras levés, virevoltant jusqu'à en avoir la tête qui tourne.

— Mes hanches mentent car en réalité je suis timide, timide, timide. Alors quand je trébuche, regarde le sol...

Je vacille dans un rire, plaquant mon dos contre le mur afin de reprendre mon souffle, amusée. Nous sommes toutes les quatre transpirantes et le teint éclatant. Aucune âme croisée dans la rue cette dernière heure ne pourrait se douter d'où nous venons ni ce que nous vivons. Surtout elles. Ces femmes aussi magnifiques que courageuses à la gentillesse incroyable.

— Mesdemoiselles, vous tombez bien, affirme placidement la voix de Luke, brisant la légèreté de l'instant.

Ma tête pivotant dans sa direction alors que mon sourire se fane brutalement, je pourrais presque jurer que cette réaction lui en fait esquisser un. À ses côtés, Peter me scrute d'un regard sévère me faisant penser...

Vous faites la paire !

J'ai tôt fait de me redresser, récupérant mon casque pour le glisser autour de mon cou, jaugeant les deux hommes s'avançant vers nous tels les maîtres des lieux qu'ils sont. Instinctivement, je me place derrière Yun, comme si j'avais le souhait de disparaître. Je l'ai, c'est clair. Cependant ce n'est aucunement le mètre soixante de la jeune asiatique qui va faire des miracles, entendons-nous bien.

— Monsieur Alvarez, chuchotent les filles d'une seule voix afin de le saluer avec tout le respect lui étant dû.

Ou la crainte qu'il inspire, plutôt. Peur. Frayeur. Terreur. Effroi. Choisissez, c'est cadeau. Quoi qu'il en soit, elles ont aussi baissé les yeux en signe de soumission, donc je m'empresse de faire de même. D'autant que l'attention de Luke a vrillée dans ma direction, notant vraisemblablement mon décalage – pas si – flagrant.

Tu ne rates rien, ma parole !

Cela t'étonne, Charlie ?

Non.

Mordant l'intérieur de ma joue, je m'oblige à fixer mes baskets plutôt que de le provoquer davantage, mais en vain. Nos iris s'accrochent irrémédiablement, l'âpreté des siens provoquant un raté de mon pouls autant que de mon souffle.

Pu-naise.

— Tu sembles être plus en forme, souligne-t-il d'une voix neutre, contournant les autres sans leur prêter attention.

Il se tient si près que je recule, trébuche, basculant contre le mur tandis qu'il réprime – très mal – un rire vaniteux.

Nodocéphale !

Après la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant