52 | Besoin de toi

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Me déhanchant au rythme de « Dancing in a room » – par EZI – sous le regard désabusé de deux putes, j'attends fébrilement la fin de la cuisson d'une fournée impulsive de cookies. Ben quoi ? N'est-ce là un remède universel à tous les maux ? Je parle des pâtisseries, bien que l'idée s'applique aussi à la musique. Ainsi qu'à la danse, au bout du compte. Toujours est-il que ma mère me préparait ce type de biscuits à chaque coup de blues et désormais, c'est mon tour. Autant vous dire que ces deux dernières années, j'en ai cuisiné un nombre incalculable. Que ce soit Lys, Yun, Mia ou Noah, chacun a sa recette préférée que je prépare en fonction des besoins ou envies. Parce que parfois, j'en fais juste pour le plaisir. Mais pas ce soir.

Nom d'une pipe !

Je. Suis. Une. Idiote. À faire preuve de jalousie vis-à-vis de la relation entre Kat et Luke, qu'espérais-je, au juste ?

On se le demande, Charlie !

Merveilleux !

J'ai conscience que ma réaction est stupide. Démesurée. Déplacée. En réalité, je n'ai aucune raison d'être en colère contre lui. D'une part car il a déjà éclairci les choses au sujet de la prostituée et de l'autre, parce qu'il fait bien ce qu'il veut. Nous ne sommes rien l'un pour l'autre.

Es-tu sûre ?

Évidemment !

Sauf que ça t'est difficile.

Chut !

Charlie ?

Quoi ?

Veux-tu être avec cet homme aussi séduisant que dangereux ?

Zut et flûte !

Je prends ça pour un oui !

Hum hum.

Il y a une différence importante entre cesser de s'éloigner et envisager de former un couple, n'est-ce pas ? Que peut-il en penser, lui ? Quoi qu'il en soit, ma colère demeure – tenace – qu'importe la tournure de ma discussion intérieure ou mon bon sens. Je présume que les derniers événements auront définitivement fait vriller mon état émotionnel déjà gravement fragilisé. Enchaînant trois pirouettes en dehors impeccables, je m'arrête, affrontant l'attention persistante des deux jeunes femmes assises à table. Face à un bol de soupe vide depuis pas mal de temps, elles sont prêtes à partir travailler, demeurant hésitantes malgré l'heure tardive.

— Vous êtes en retard, souligné-je, parée d'une lamentable décontraction factice.

— Quant à toi, tu te persuades que tout va bien alors que non, réplique Lys en arquant sévèrement un sourcil me signifiant que oui, elles sont loin d'être dupes.

— Alors je danse toute seule juste au milieu de la pièce. Je vais bien, je vais bien, je vais bien, chantonné-je, leur tirant effrontément la langue.

Je ne risque guère de les tromper, leur ayant raconté mes déboires – bêtises – dès leur arrivée. Ont-elles jubilé ? Oui.

Sympa, merci !

Cela m'empêche-t-il de me complaire dans le déni ? Non.

— Vous devriez discuter, me conseille la jolie asiatique. Ces non-dits ne peuvent plus durer. Votre attirance mal refoulée ainsi que vos incessantes tensions n'ont échappées à personne.

Pu-naise.

Pinçant fortement les lèvres, j'éteins le four, l'ouvrant sans cesser de bouger en rythme.

— C'est ça ! grondé-je nerveusement, fermant la porte d'un léger coup de talon. Comme s'il était du style à avoir ce genre de conversation !

C'est autant peine perdue qu'inutile !

Après la pluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant