Après la pluie

6 | Mépris et frustration

À quel moment as-tu cru pouvoir me donner des ordres ?!

C'est toi qui lui a menti sur ton statut, Charlie ! Assume maintenant.

Certes.

Ravalant mépris et frustration, j'obtempère avec une évidente mauvaise volonté assortie d'un regard assassin, croisant les bras sous ma poitrine.

— Qu'est-ce que c'est ? s'intéresse-t-il, désignant la pochette que j'ai malencontreusement ramené vers l'avant.

Tes faits d'armes, mon cher. Je dois les étudier avant notre rencontre. Officielle, j'entends.

— Rien vous concernant, sifflé-je entre mes dents serrées.

Menteuse !

Hum hum.

— Désormais tout ce qui se passe ici me concerne, ma belle, articule-t-il lentement, me toisant froidement.

Ouais ouais. Tu sauras bientôt que je suis hors hiérarchie. N'obéissant qu'au diable.

— Et je me pose des questions sur toi.

J'imagine !

— Vraiment ? minaudé-je, faisant virevolter mes cils dans une moue illustrant mon effronterie retrouvée.

Ses paumes se plaquent violemment – de part et d'autre de moi – contre les portes de l'ascenseur que je viens de quitter, m'obligeant à reculer jusqu'à les heurter sans retenir un hoquet effrayé.

Non mais t'es sadique ou quoi ?!

C'est probablement autre chose que la douceur qui l'a hissé jusqu'à ce poste, Charlie !

Pouvons-nous garder l'humour pour plus tard ?

Je suis ornée des marques d'une agression, néanmoins cela ne l'empêche guère de me dominer physiquement, le visage dépouillé de la moindre trace d'émotion. Autrement dit il donne le ton, me faisant comprendre que ce petit jeu a assez duré.

— Parle-moi de cette omerta t'entourant, commande-t-il d'une voix neutre.

— Vous me faites peur, exhalé-je à la place, perdant le contrôle de ma respiration.

— Réponds, rétorque-t-il sèchement. Tiens ta place et cela ira bien pour toi.

Pour toute réaction mes lèvres se pincent et mes sourcils se froncent.

En tout cas bravo, tu sais parler aux femmes, j'approuve ! Je suppose que tu n'es pas marié ?

— Bon, gronde-t-il. Puisque tu as perdu ta repartie, je vais t'exposer ma théorie.

Pu-naise. Tu as deviné, c'est ça ?!

— Tu es la seule se permettant d'être une peste insolente, commence-t-il, plantant un regard glacial dans le mien. Les autres se contentent d'étaler leurs atouts, rien qui sorte de l'ordinaire.

Ce n'était nullement dans mes habitudes mais tiens-toi prêt, je n'ai guère prévu d'arrêter.

— Et même si je sais que Peter Alvarez prend soin de ses putes, j'ai remarqué à quel point tu es bien logée.

Oh. Nom. De. Dieu.

— Étant donné qu'en prime personne n'a voulu me donner la moindre information à ton sujet, j'en déduis que tu es la putain attitrée de son neveu, conclut-il comme s'il détenait la vérité.

Ah. Je suppose que tu ne vas pas être déçu.

Je suis toutefois obligée de reconnaître que sa réflexion est parfaitement plausible. Cependant...