Lowell accompagne mes mouvements au rythme de « Lone Wolf » pendant que j'occulte le reste.
Relevé. Et deux puis piqué.
Pour être plus précise, le reste, c'est Luke. Je n'avais pas prévu qu'il soit présent dans la salle de sport du sous-sol à une heure si matinale, voyez-vous.
N'y a-t-il aucune femme dans ton lit cette fois non plus ?
Non plus, oui. Car cela fait un mois qu'il donne l'impression de n'y avoir emmené personne et cette idée me trouble. Depuis les pancakes, en fait. Notre altercation au sujet de Noah. La gifle que je lui ai mise sans qu'il ne réagisse. Ma colère. Peur. Douleur. Son inexplicable pas de côté ainsi que mes incontrôlables larmes.
Poser et quatrième, six, tourner poser...
Autant de temps passé à le fuir comme s'il était la peste faite homme. Sortant d'une pièce quand il y entre, quittant la table au moment où il s'y installe, braquant mes yeux dans la direction opposée de celle où il se trouve dans le cas où je n'ai nul autre choix que de devoir demeurer en sa présence. J'agis ainsi car mon instinct de survie me hurle de rester à distance, mon pouls étant incertain lorsque par hasard nos iris s'accrochent. Mon estomac se noue, mes poumons oubliant inexplicablement comment fonctionner.
Quelle est ta bonne raison de m'éviter, toi ?
Car contrairement aux jours ayant suivi son arrivée, on ne peut pas dire qu'il ait cherché à m'approcher non plus. Néanmoins les ordres de Peter étant ce qu'ils sont, il continue à me donner des cours de tir deux fois par semaine avec un professionnalisme irréprochable, sans le moindre contact ni l'ombre d'un mot hors sujet. Je porte à chaque fois une culotte, cela dit. Quoi qu'il en soit, j'arrive désormais à contenir ma panique ainsi que la violence des images me submergeant toujours lors de la détonation. L'exercice se complique pendant les leçons de self-défense que le nouveau petit frère du diable me prodigue à la même fréquence. Ici même, dans cette pièce que nous partageons pour la première fois sans y être obligé. Quand ses mains se posent sur moi et que je dois réprimer l'incontrôlable frisson glissant le long de ma colonne vertébrale. Que mes joues chauffent au-delà du raisonnable et de l'effort fourni. Donc à la fin de la séance je tourne précipitamment les talons, honteuse de mes réactions physiques tandis qu'il n'est toujours que cette masse d'indifférence en toutes circonstances.
Relevé. Et deux puis piqué.
Lorsque je suis entrée et l'ai trouvé en train de se déchaîner sur le sac de frappe avec une violence inouïe, j'ai pensé à faire immédiatement demi-tour en retenant mon souffle. Mais. Pas. Ce. Matin. Concentré, des écouteurs sur les oreilles, il n'a d'ailleurs pas réalisé ma présence tandis que je posais mon enceinte et mon IPod sur le sol, m'approchant de la barre afin de m'échauffer. Le pouls déraisonnable, je n'ai pu me retenir de l'observer attentivement à travers le miroir. Peut-être à cause de l'incroyable rapidité de ses gestes, mais il s'agit probablement d'autre chose, si je suis honnête. Couvert de sueur, son visage fermé et les sourcils froncés, il était – séduisant – effrayant.
As-tu des émotions refoulées, toi aussi ?
Finalement j'ai retiré mon survêtement pour ne garder que mon justaucorps noir, rassemblant mes cheveux en un chignon haut noué grâce à mon ruban avant de lancer la chanson à un volume élevé, comme si j'étais aussi seule que ce que j'avais prévu en rejoignant le sous-sol à six heures du matin. C'est à ce moment qu'il m'a remarquée mais j'ai feint l'indifférence, concentrée, commençant à danser en mêlant les mouvements classiques de mon enfance aux modernes inculqués par Mia lors de nos sessions sportives. J'ai l'esprit ailleurs, de toute façon. Cette fois, même son regard braqué sur moi après qu'il se soit arrêté pour m'observer ne pourra réussir à me faire vaciller. Car je danse pour une bonne raison, voyez-vous. Et il n'y a qu'elle qui compte. Alors j'enchaîne les gestes, laissant mes émotions me submerger tout en oubliant le reste. Lui. À la fin je m'allonge brièvement sur le sol pour reprendre mon souffle, puis me redresse, essuyant la larme échappée sur ma joue à la seconde où nos yeux se croisent. Clignant des paupières, je me détourne immédiatement, enfile mes vêtements et récupère mes affaires, sortant silencieusement sous son attention persistante.
VOUS LISEZ
Après la pluie
DragosteAyant vécu une enfance teintée de galères, Charlie n'a nullement ménagé ses efforts afin de mettre sa vie sur les rails de la sérénité. Aspirant à un futur fait de bonheurs simples, elle voit son rêve voler en éclats d'un seul coup de téléphone. « D...