Pdv 009
Flashback 11 ans plus tôt
- Relève-toi m'ordonne-t-il !
Mes larmes coulent à flot sur mon visage, mes jambes tremblent, mes bras tremblent, je ne suis plus que coton, ma tête bourdonne si fort que j'ai l'impression de tanguer sans cesse. J'essaye tant bien de me relever mais à peine ais-je fait un mouvement que l'homme à côté de Morel me redonne un violent coup de pied entre les côtes qui me coupe la respiration, mon dos heurte à nouveau violemment le sol. Je sens ma vision se brouiller, je me sens partir, est-ce la fin ? Vais-je mourir sous les coups du formateur ce soir ? Je sens mes dernières forces quittaient mon corps. J'ai l'impression que mon corps n'est qu'une coquille vide. Je sens qu'on me tire par les cheveux, me relevant de force. Je peine à tenir debout tant mon corps tremble. On me parle mais je n'entends plus, je ne vois plus.
Je suis vidée.
Je sens mon souffle disparaitre, mes poumons se resserrent. De l'eau glacé est versée sur moi, je reviens soudainement sur terre, mon corps cesse de trembler, mon souffle revient, je parviens à entendre la voix de Morel et celle du formateur, j'arrive à distinguer leurs traits fâchés. On me lâche les cheveux et je retombe mollement sur le sol, mais cette fois-ci je parviens à me relever, douloureusement, difficilement, mais j'y arrive. Je leur fais face, leurs yeux noirs me scrutent et je vois Morel sourire en me voyant debout.
- Bien, tu en as mis du temps mais je suis fière de ce que tu es devenue, tu n'es plus une fille normale, tu es une machine.
Je ne réponds pas, Morel s'avance vers la sortie de la pièce, me laissant seule face au formateur, je prie de toute mes forces pour que celui-ci suive le chemin de son patron mais il ne le fait pas. Il reste en face de moi, un sourire ancré aux lèvres. Je connais se sourire. Je le connais trop bien. J'aurais sans doute préférée que l'eau ne fasse pas effet, et que je meurs dans cette cave plutôt que de devoir revivre la torture que le formateur me prépare. Je sais que Morel ne se doute pas de tout ce que je subis en son absence, une partie mais pas tout. Il ne sait pas à quel point le formateur aime me frapper quand il part, il vise toujours le ventre ...
La 009 de 11 ans ne savait pas pourquoi il tapait là, elle ne savait rien.
Je le vois s'approcher et mon état ne me permet pas d'éviter le premier coup de poing que vient recevoir mon nez, je titube, je me rattrape difficilement au mur qui m'entoure. Je sais que je ne dois pas rendre les coups ou je les recevrais deux fois plus fort. Je ne bouge pas, il se rapproche et ses poings s'abattent cette fois-ci sur mon ventre, mon estomac se tord, il frappe, encore sans s'arrêter, je ferme les yeux et oublie la douleur, j'essaye de me réfugier dans une sorte de monde parallèle. Un monde où je serais avec mes parents et une petite sœur, dans une grande maison, avec un jardin immense, il y aurait de nombreuses fleurs partout, des roses, des tulipes, maman s'occuperait minutieusement d'enlever les mauvaises herbes qui pourraient leur empêcher de se développer correctement, papa ferait griller les saucisses au barbecue et moi je ferais des tresses aux longs cheveux noirs de ma sœur. Nous serions heureux, j'aurais une famille, une vie normale. Lorsqu'un énième coup me percute le ventre je suis à nouveau projetée à la réalité. J'ouvre les yeux et le formateur cesse ses mouvements. Il recule satisfait et s'avance à son tour vers la porte. Je sens que ma lèvre saigne, fendue en deux, mon arcade aussi. Je sens comme les coups me font souffrir actuellement.
La réalité me percute en plein fouet.
Je n'ai pas de famille, je suis seule avec des monstres, je vis dans une cave, parfois dans une chambre, je ne mange que très rarement, je n'ai jamais pu gouter une saucisse. Morel me retient depuis 9 ans. Ma famille ne m'a pas retrouvée, je suis piégée à rester ici, jusqu'au jour où quelqu'un pourra venir me sauver, moi, ainsi que 001, 002, 003, 004, 005, 006, 007, 008, 010, de qui je n'ai plus de nouvelles depuis des mois. Ont-ils au moins survécu eux aussi ? J'espère que leur bourreau est clément.
Je secoue ma tête et chasse mes pensées. Je dois me concentrer sur ma propre survie. Je laisse glisser mon corps contre la paroi humide du mur. Je n'ai plus de forces, je me recroqueville en boule et tente de m'endormir. Je sais que je risque de rester éveiller de nombreuses heures avant que le sommeil ne m'emporte. Mais ce soir les coups sur mon corps ont eu raison de moi puisque je suis épuisée, je me sens faible, comme je ne l'ai jamais été, mes yeux se ferment et je rejoins très rapidement les bras de Morphée. Cette nuit ne sera sûrement pas reposante, comme toutes les nuits mes cauchemars vont me réveiller, ainsi que les cris de mes compagnons. Des semaines que je suis dans cette cave. 3 semaines et 5 jours précisément, une semaine que je n'ai pas mangé autre chose que du pain et de temps en temps du jambon.
Le réveil est brutal, ma porte claque sans retenue contre le mur, des pas qui résonnent contre le sol me réveille, je lève rapidement la tête surprise et de nombreuses courbatures font apparition, un des formateurs qui accompagne Morel est là, il m'ordonne de me lever et je m'exécute rapidement, ignorant les hurlements de douleur de mes muscles, qui n'attendent que de se détendre sous l'eau chaude, j'avance de quelques pas et l'homme me saisit les poignets qu'il attache sans aucune délicatesse avec des cordes, pas assez serrées pour que je ne parvienne pas à les enlever, je ne ferais rien. Je ne veux pas me récolter leur colère, il me tire sans ménagement vers la sortie. Quand je comprends que je sors j'ai l'impression de sortir la tête de l'eau, je vais ailleurs que dans cette foutue cave sombre.
Il avance rapidement et je dois trottiner pour suivre son rythme, il traverse de longs couloirs, j'analyse, scanne tous les détails qui pourraient m'être utile, repérant chaque couloir, chaque porte.
Nous montons des escaliers et je comprends qu'il me ramène dans une chambre, avec un vrai lit, un matelas pour dormir, de vraies toilettes et surtout mon plus grand bonheur une douche. Nous montons encore de nombreux étages et je sens mon corps faiblir à chaque pas. Nous traversons maintenant un couloir, mais ma fatigue me rattrape rapidement, j'ai du mal à mémoriser les détails qui sont importants, je me laisse presque trainer par l'homme devant moi. Il s'arrête brusquement et je manque de lui rentrer dedans, devant une porte, ma porte, celle de ma chambre. Dessus est gravé dans une plaque en or 009. Cette chambre est mon havre de paix dans ce monde de brutes sans cœur. Il tape le code de la porte qu'il ne me laisse malheureusement pas voir et celle-ci s'ouvre. Une bonne odeur de chocolat s'émane de la pièce et je me dépêche de rentrer.
Il referme la porte derrière moi sans prendre la peine de m'indiquer quoi que ce soit. Rien n'a bougé, mon lit est toujours parfaitement fait, couvert par mes draps en soie bleue. Mon bureau est toujours rempli de croquis de bâtiments, pour la plupart se sont des idées de centre, de salle de sport que je fais lorsque l'ennui me prends. Mes portes d'armoires sont toujours ouvertes laissant une vue totale sur l'ensemble de mes vêtements, ce qui attire mon attention est le plateau posé au centre de la table. Un plateau avec de la nourriture. Beaucoup. Je vais pouvoir manger, je cours presque jusqu'à ma chaise et la première chose que je mange est le gros œuf en chocolat que je vois. Je ne prends pas le temps de le savourer, je sens que ma bouche en est recouverte mais je n'y prête pas attention, je lèche mes doigts et regarde le contenu du plateau. Je m'attaque au steak posé dans une assiette, je le mange plus doucement, je savoure chacune des bouchées, j'essaye de me rappeler la dernière fois que j'avais eu le droit à un aussi bon repas, mais mes souvenirs sont trop flous. J'aspire les spaghettis et les trempent dans la sauce tomate à côté. Chaque bouchée est un cadeau, un pas vers le paradis.
Cette récompense me donne l'impression de ne pas être au centre même de l'Enfer. Le diable en personne est dans son bureau, à gérer chacun de ses pantins, nous. A l'instant même il doit sourire, imaginant dans quel état je suis, la vitesse à laquelle je mange. Mon ventre est vite rassasié et je décide de finir le plateau après une petite sieste. Avant ça je me déshabille et me dirige vers la douche. Je règle l'eau au plus chaud et entre dans la douche. Je sens l'eau brulante coulée sur mon corps, détendant mes muscles, nettoyant mes blessures, je me savonne grâce au savon à la cannelle à mes côtés, c'est mon odeur préférée, elle se répand dans mes narines, me procurant un sentiment de bonheur.
Il sera court alors je profite de chaque seconde, chaque attention portée par Morel pour moi, l'œuf en chocolat, le savon à la cannelle. Il me connait beaucoup trop bien et cela m'effraie car je ne sais pas de quoi il est capable.
La petite fille de 11 ans que je suis n'a rien d'une petite fille de 11 ans.
Morel dit que je suis une grande fille, très mature, je suis sa préférée il me le dit tout le temps.
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009
Romance[Bientôt en RÉÉCRITURE] Créée de toute pièce pour se battre, pour tuer, pour résister à tout... Presque tout. Quand 009 est contrainte d'infiltrer le Milieu, elle n'a pour mission que de transmettre des informations. Mais quand l'amitié et même l'am...