Chapitre 15: Qu'un cauchemar

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Pdv 009

Il y a 10 ans, quelques mois avant la mort de Morel...


J'essaye tant bien que mal d'ouvrir les yeux, mais mon corps est épuisé. Je ne sais pas si j'aurais au moins la force de me lever lorsqu'on viendra me chercher. Si l'on vient me chercher...

1 semaine que je suis enfermée dans ma cellule, 1 semaine à ne manger qu'une tranche de pain par jour. Je me sens faible, bien plus que je ne l'ai jamais été. Ça m'apprendra à contester les ordres.

Le froid n'aide pas mon corps à vaincre cette fatigue, j'ai du mal à bouger mes doigts gelés.

Le sol dur de la pièce a engendré bon nombre de courbatures à mes muscles, mais encore une fois je me tais, j'avale ma douleur, je la garde pour moi. Car je ne dois jamais rien montrer. C'est comme ça que je suis obligée de fonctionner. Montrer ses sentiments est une faiblesse, car cela donne le pouvoir à l'autre de te détruire. Alors quand on viendra me chercher je ferais comme si cela n'était qu'un cauchemar, je me lèverais et je sortirai d'ici.

Le bruit de la serrure de la porte qui s'actionne me remet sur terre, j'ouvre les yeux et tourne légèrement la tête. Pour mon plus grand malheur il ne s'agit pas de Monsieur Morel, mais de Jacques, un formateur, celui qui s'occupe de me surveiller. C'est un des plus gros connards que cette planète n'a jamais porté.

Il avance vers moi, le sourire aux lèvres. Ses cheveux gris habituellement bien coiffés sont aujourd'hui en désordre, et il ne porte pas sa tenue habituelle, il porte un de ses costumes qui coûte une fortune. Je comprends vite qu'il ne doit pas être ici.

Il n'a pas reçu l'ordre de venir et il ne vient sûrement pas me rendre une visite de courtoisie. Par ce qu'il ne rigole pas lui. Il ne m'a jamais apprécié et c'est réciproque.

- Alors ma jolie, tu n'as pas l'air de faire la maline là tout de suite, tu m'as plutôt l'air en piteux état même.

Mon souffle se saccade de colère, et je puise dans mes forces pour me redresser, j'ai le corps gelé et chaque mouvement me fait un peu plus souffrir. Je grogne de douleur et de colère, mais je relève la tête pour tomber dans ses yeux bleus, qui autre fois, petite, m'impressionner tant.

- Tu sais ce qu'on dit dans la salle des formateurs ?

- Non, tu ne peux pas vu que tu n'y es pas. On dit que tu deviendras la meilleure. Mais moi, je ne suis pas d'accord. Une femme ne peut pas obtenir autant de pouvoir. Maintenant tu es une femme n'est-ce pas. Comme tu grandis, je te revois toute petite, dans les bras de Monsieur Morel. Une petite fille inoffensive, mais tu ne l'es plus. Et maintenant tu te crois grande, tu crois avoir assez de pouvoir pour désobéir aux ordres. Mais sache qu'une femme n'est rien sans un homme, tu n'es rien. Tu ne seras là que pour combler les désirs des hommes, tout au long de ta vie 009. Jamais tu ne gagneras assez d'importance pour faire partie de notre monde. Tu ne seras jamais autres choses qu'une machine à baiser ou une mère pondeuse pour nous tous.

- Va-te-faire-foutre.

Je ne comprends que la moitié de ce qu'il me raconte, pourtant je sais qu'il n'est pas venu rire.

Être entouré tout le temps de personne plus âgées que soit, de vivre dans un monde comme celui de Morel demande une grande maturité. Alors non, 12 ans ce n'est pas vieux. Mais cela fait longtemps que je ne suis plus une petite fille.

Alors j'utilise encore les quelques forces qu'il me reste pour me relever, je m'appui sur mes paumes de mains et je me redresse. Mes jambes tremblent mais j'en fait abstraction.

009Où les histoires vivent. Découvrez maintenant