LINGUÈRE

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Il fait noir, très noir et je tremble de froid. Je baisse les yeux et vois que je ne suis vêtue que d'une simple robe, une robe que je reconnais. C'est la robe en coton blanche que je portais quand j'accouchais de mon premier enfant. Elle est tachée d'un liquide pourpre visqueux. Je suis pieds nus et la pièce semble inondée.

J'entends des pleurs d'enfant qui emplissent la pièce. Mon enfant. J'avance essayant de le trouver.

— Mon bébé, mon bébé, mon bébé, répétais-je en hoquetant.

Mes larmes me brouillent la vue.

Mon bébé, mon enfant !

    Au fur et à mesure que j'avance, l'eau commence à monter jusqu'à atteindre mon cou mais je ne voulais pas m'arrêter, déterminée à retrouver mon enfant.
Désormais l'eau me couvre complètement mais je ne m'arrête pas et continue à nager.

    Mon enfant !

Soudain je sens quelque chose m'agripper la jambe et m'entraîner au fond de l'eau. Je me débat de toute mes forces en vain, lorsque je baisse les yeux, je ne vois qu'une main mais j'entends une voix qui me glace le sang prononcer ces paroles maudites.

Ma reine...

Une sonnerie de téléphone me délivre de ce cauchemar pour n'engouffrer dans un autre. J'ouvre les yeux et me rend compte que je m'étais assoupie sur le siège de mon bureau.
Je me redresse et regarde l'heure sur l'horloge. 2h36. Je fronce les sourcils sachant pertinemment celui qui ose m'appeler à cette heure. Je décroche le téléphone et reste silencieuse.

— Je jurerai que tu rêvais de moi, comment ça va ma reine ?

— Qu'est ce que tu veux Nasir ?

— Prendre des nouvelles de l'amour de ma vie, dit-il d'un ton amusé.

— Va en enfer.

Il rit derrière le téléphone, m'irritant d'avantage.

— Parlons de chose plus sérieuse, j'ai une urgence, j'ai une cargaison de dernière minute qui doit être réceptionné immédiatement et je voudrai que tu sois celle qui me représente.

— Tes toutous ne peuvent-ils pas s'en occuper ?

— Non, disons que je n'ai confiance qu'en toi pour ce job, tu as une heure pour arriver sur l'île de Gorée, mes hommes t'y attendent.

Il raccroche sans attendre de réponse.
Pourquoi voudrait-il que je me charge personnellement de sa cargaison ? Que prépare-t-il ?

Je vais dans ma chambre et me change. Je m'habille tout en noir, un jean, un débardeur et une veste en cuir ainsi que des chaussures montantes. J'attache mes cheuveux en queue de cheval. Je prends mon arme que je cache derrière mon dos et les clés de ma jeep wrangler de la même couleur.

Je sors de la maison au volant. Arrivée au port. J'appelle Ablaye et lui demande de me retrouver à Gorée sans se faire remarquer et de rester à l'écart.
Je trouve un gardien devant l'entrée de l'embarcadère.

— Bonsoir madame, que cherchez-vous ? me demande-t-il.

— Je voudrais traverser pour me rendre à Gorée, dis-je.

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