Chapitre 20 : Soan et Camille

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Nuit du mercredi 11 au jeudi 12 décembre 2029 – Sproul State Forest - Domaine Larkmîr

Le ciel nocturne s'éclaircissait tout juste, mais dans la chambre du Maître Solvmorläs, la même symphonie résonnait depuis le début de la nuit. Les à-coups frénétiques qui ébranlaient son lit, les gémissements étouffés et le heurt d'une peau contre une autre, tout laissait deviner le schéma qui se dessinait. Les mains agrippées aux hanches de Van, Kadvael se tenait à genoux derrière lui et lui administrait de puissants coups de boutoir. Le jeune chasseur s'agrippait aux draps et mordait dans l'oreiller. Cambré vers son amant, il accueillait ses gestes sans pudeur et s'engourdissait du bien-être de l'avoir en lui. Malheureusement, son corps commençait à lui faire sentir ses limites. Ses muscles fatiguaient, ses chairs malmenées s'éprouvaient et il ne voulait plus bouger, parce qu'il ne voulait pas que Kadvael le voit trembler. Question d'égo et d'habitude. Comment faire autrement ? Il ne pouvait pas le décevoir, pas après l'avoir tant provoqué et pour lui, il était élémentaire de ne pas le frustrer. Van craignait de perdre quelque chose qu'il venait tout juste d'obtenir. Quelque chose de bien.

Mais il ne savait plus combien de fois ils avaient recommencé, combien de postures ils avaient essayé, combien de baisers ils avaient échangés, sans que l'esquisse de la fatigue ne fasse tressaillir Kadvael. Il avait d'ailleurs été très compliqué de le convaincre de lâcher ses yeux, aussi Van s'imaginait mal lui prouver qu'il avait raison et qu'il aurait été préférable de le surveiller, lui et ses fantaisies masochistes. Car malgré son désir et son excitation, il se sentait sérieusement faiblir. Un engourdissement étrange rua soudain dans ses membres, il cligna des yeux mais sa vue se tâcha de couleurs criardes et une asthénie brutale acheva son corps.

Kadvael sentit Van faiblir entre ses mains. Ses gémissements s'amenuisaient, devenaient plaintifs et malgré son propre plaisir, il devina que quelque chose n'allait plus. Le vampire se retira, Van commença à tomber sur le côté mais il le rattrapa et le déposa doucement sur le dos. Ses yeux bleus s'ouvraient à peine et ne le regardaient plus. L'émoi sensuel de Kadvael retomba instantanément et l'inquiétude se fraya un chemin dans sa poitrine.

— Van ? l'appela-t-il en prenant son visage. Van, tu m'entends ?

La conscience de Van s'était subitement volatilisée, l'espace de quelques secondes, avant qu'il ne revienne à lui et n'adresse à Kadvael un pâle sourire.

— Évidemment que je t'entends.

Kadvael soupira de soulagement, puis remarqua que l'érection de Van était retombée. La sienne aussi, par la même occasion. La colère le prit et ses mâchoires se contractèrent. Il s'en voulait de n'avoir rien vu, de l'avoir mis en danger et il en voulait à Van de n'avoir jamais cessé d'insister, juste par fierté et malgré toutes ses recommandations. Il souffla encore puis poussa les mèches blondes qui collaient à son front.

— Tu dois me dire quand c'est trop pour toi.

— Tu te retiens de m'engueuler, pas vrai ? gloussa-t-il faiblement. Pas trop déçu sur la marchandise ?

Une nouvelle phrase déplacée qui éveilla les craintes de Kadvael. Van dépeignait toujours sa sexualité sous un prisme dégradant. S'il n'était pas une « pute », il était une marchandise, un chien, un consommable.

— Je suis déçu de moi, lui répondit-il calmement. J'ai manqué de prévenance.

Il jeta un œil vers la fenêtre et vit que la nuit s'était éclaircie. Kadvael alla rapidement fermer les volets, puis se rendit dans la salle d'eau faire couler un bain. Il prit Van dans ses bras et le déposa dans la baignoire chaude.

— Je vais vraiment finir par croire que je suis ton petit prince, railla le blond.

— Ne t'attends pas à ce que je te traite autrement.

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