Chapitre 51: La trahison

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Mercredi 25 décembre 2029- Sproul State Forest – Domaine Larkmîr

De retour au domaine Larkmîr, le petit groupe se réunit dans l'antique salon du rez-de-chaussée qui, d'ordinaire, servait aux réceptions. Sous les immenses croisées d'ogive, à la lumière des candélabres, Alassane était acculé. La guérisseuse l'avait rapidement ausculté mais le jeune homme n'avait gardé aucune trace de son séjour chez les lycans. À présent, il était assis dans un fauteuil face aux comités de juges que constituaient ses anciens amis. Hortense le dardait d'un regard accusateur, les bras croisés sous sa poitrine opulente, Kadvael plissait deux yeux suspicieux, enfin Éléonore se rongeait l'ongle du pouce. Loin derrière eux, Van fouillait dans un casier à bouteilles.

— Merci d'être venu me chercher, leur dit Alassane.

— Comment ça s'est passé ? demanda sèchement Hortense. Comment t'ont-ils trouvé ?

— Quand je suis parti hier, ma voiture a été arrêtée à moins de deux kilomètres du domaine. Je pense qu'ils attendaient que je sorte. C'est Halfred qui leur a dit, pour moi, je l'ai vu à chez les lycans. Il est parti avant que vous n'arriviez.

— Je me fiche d'Halfred. Pourquoi es-tu parti ?

Alassane blêmit.

— Quoi ? Ben... je te l'ai dit, je me sentais mal.

— Arrête de nous baratiner, s'impatienta la brune. Nous savons que c'est toi qui as ouvert les volets derrière Kadvael. Tu as tenté de l'assassiner.

Le regard d'Alassane s'élargit et sa poitrine se contracta si fort qu'il lui sembla qu'elle se recroquevillait. La peur noua son ventre, il bafouilla :

— Non, non... pourquoi, enfin... pourquoi ? Hortense, qu'est-ce qui se passe ?

Ses yeux larges et suppliants se plantèrent dans ceux de son amante en quête d'un soutien qui ne venait pas et la belle brune sentit sa fermeté faiblir. Elle se détourna, le cœur serré. Le pli que pinçaient ses lèvres n'échappa pas à Kadvael. Pour la première fois depuis des années, il voyait de la détresse et des larmes s'accumuler derrière ses yeux.

— Ne la regarde pas, lui dit-il immédiatement. C'est moi qui pose les questions, maintenant.

Kadvael glissa une main dans sa poche et en sortit la fameuse photo où figurait le garçon blond. Il la remit à Alassane. Ce dernier l'observa d'un œil hagard, empli d'incrédulité.

— Le petit gars dans le fond, c'est toi ?

Oui, c'était lui et la panique le gagna si vite que sa voix trembla comme un vibrato.

— Non, mentit-il. Non, je ne comprends pas.

Ses yeux larmoyants quittèrent la stature inquiétante de Kadvael pour glisser vers Hortense, mais cette dernière lui tournait le dos. Le Maître Solvmorläs se pencha vers lui, posant les mains sur les accoudoirs du fauteuil et, terrifié, Alassane s'enfonça dans le dossier comme un lapin au fond de son terrier. Les yeux inquisiteurs de Kadvael se plantèrent dans les prunelles du jeune vampire et il fouilla sans vergogne les recoins les plus intimes de ses émotions. La terreur, la culpabilité et la colère, gris, noir, cyan. Leurs prunelles se rencontrèrent et elle éclata.

La haine.

Elle fut si nette, si abrupte, que Kadvael se retira, stupéfié. Alassane le détestait.

— Qu'est-ce que tu vois ? demanda Hortense.

— Il me hait...

— Non, non ! (Il se tourna vers son amante.) Non, c'est faux ! C'est faux ! Je te le jure, Hortense, mon amour ! Je te promets, je n'ai rien fait, il ment !

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