Elias - 5

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Je suis arrivée au travail désespérée, le poids de ce qui venait de se passer m'écrasant de l'intérieur. Chaque pas me semblait plus lourd que le précédent, chaque respiration une lutte pour ne pas éclater en sanglots. Mon corps portait les marques de la violence d'Elias, mais c'était la peur et l'humiliation qui m'étaient les plus insupportables. Il m'avait battue et violée, et maintenant, il avait découvert mon plan et anéanti la seule preuve que j'avais contre lui. Je n'avais plus rien pour me défendre. Pire encore, il était chez moi, m'attendant, et je savais que la nuit qui m'attendait serait encore plus terrible.

En entrant dans le bâtiment, j'essayai de composer mon visage pour masquer la terreur qui me rongeait. Le fond de teint que j'avais appliqué à la hâte dissimulait à peine les bleus, et je savais que mes collègues remarqueraient quelque chose de bizarre. En franchissant la porte, Christine, qui était de service avec moi ce soir, leva les yeux et son expression changea immédiatement en une horreur choquée.

- Sarah ! Qu'est-ce qui t'est arrivé au visage ? s'exclama-t-elle en se précipitant vers moi.

Je sentis mes yeux se remplir de larmes, mais je les retins de toutes mes forces. Je ne pouvais pas me permettre de craquer maintenant. Chaque fibre de mon être était tendue alors que je cherchais désespérément une explication plausible. Mais mon esprit était vide, engourdi par la peur et l'épuisement. Christine me prit doucement par le bras, m'entraînant vers une petite salle de repos à l'écart des regards curieux.

- Sarah, parle-moi. Que s'est-il passé ? demanda-t-elle, sa voix pleine d'inquiétude.

Je baissai les yeux, évitant son regard insistant. La vérité était trop terrible à dire. Comment pouvais-je expliquer ce que j'avais enduré sans attirer encore plus de problèmes ? Mais Christine ne me laissait pas le choix. Son inquiétude et sa compassion étaient évidentes, et elle ne voulait pas me laisser seule avec ma douleur.

- Je suis tombée, dis-je finalement, ma voix tremblante. J'ai trébuché et je me suis cognée contre une table.

Christine fronça les sourcils, manifestement sceptique.

- Sarah, si tu as des problèmes, tu peux m'en parler, tu le sais, n'est-ce pas ? murmura-t-elle doucement.

Je hochai la tête, incapable de parler. Les mots restaient coincés dans ma gorge, un nœud de peur et de honte. J'avais envie de tout lui dire, de lui demander de l'aide, mais la peur de la réaction d'Elias m'en empêchait. Il était une menace trop grande, et je ne pouvais pas risquer de le provoquer encore plus.

Christine soupira à nouveau, me regardant avec une profonde compassion.

- Écoute, repose-toi un peu avant de commencer ton service. Je vais te couvrir, d'accord ? Va dans la salle de repos et essaie de te calmer. Si tu as besoin de quoi que ce soit, viens me voir.

Je la remerciai d'un faible sourire, mes lèvres tremblantes. Je savais qu'elle essayait de m'aider, mais la réalité de ma situation était bien trop complexe pour être résolue par quelques heures de repos. Néanmoins, je me dirigeai vers la salle de repos, espérant trouver un moment de répit.

Quelques minutes plus tard, Christine entra avec une tasse de thé fumant. Elle s'assit à côté de moi et me tendit la tasse.

- Tiens, bois ça. Ça te fera du bien.

Je pris la tasse, appréciant la chaleur qui se diffusait dans mes mains tremblantes. Christine me regardait avec insistance, ses yeux pleins de compassion et de détermination.

- Sarah, est-ce que tout ça n'a rien à voir avec Elias ? demanda-t-elle soudainement.

Je me raidis, surprise par la question directe. J'évitai son regard, fixant plutôt le thé dans ma tasse. Je savais qu'elle attendait une réponse, mais je ne pouvais pas admettre la vérité. Pas ici, pas maintenant.

- C'est compliqué, Christine, murmurai-je finalement. Vraiment compliqué.

Christine hocha la tête, comprenant plus que je ne lui disais. Elle soupira et, sans un mot, sortit un trousseau de clés de sa poche. Elle les posa doucement sur la table devant moi.

- Écoute, Sarah, va chez moi. Prends ces clés et réfugie-toi là-bas. Je te rejoindrai à la fin du service.

Je levai les yeux, choquée par son offre. Mon instinct était de protester, de dire que je devais rester et travailler, que je ne pouvais pas abandonner mes responsabilités.

- Christine, je ne peux pas... Je dois être ici. C'est mon travail, dis-je faiblement.

Christine secoua la tête, son regard déterminé ne laissant aucune place à la discussion.

- Je vais m'arranger avec Estelle et Arthur. Ils comprendront. Et franchement, dans l'état où est ton visage, tu ne peux pas travailler. Personne ne peut te demander ça. C'est une situation spéciale. Fais moi confiance.

Je savais qu'elle avait raison. Je regardai les clés, puis Christine, la gratitude et la confusion se mêlant en moi.

- Merci, dis-je finalement, les larmes me montant aux yeux. Je ne sais pas comment te remercier.

Christine posa une main réconfortante sur mon épaule.

- Tu n'as pas à me remercier, Sarah. Tu es comme une sœur pour moi. Va chez moi, repose-toi, et on trouvera une solution ensemble.

Je pris les clés, sentant un poids se soulever légèrement de mes épaules. Je savais que ce n'était qu'un répit temporaire, mais c'était un début. Je me levai, tentant de retrouver un semblant de calme.

- Merci, Christine. Vraiment, merci.

Elle me serra brièvement dans ses bras avant de me laisser partir. Je me dirigeai vers la sortie, mon esprit encore engourdi par la peur mais aussi allégé par l'espoir ténu que Christine m'avait donné. J'avais maintenant un refuge, un endroit où je pouvais me cacher, réfléchir et peut-être trouver une solution. La route serait longue et difficile, mais au moins je n'étais plus seule.

Les Passions de Sarah - Tome IOù les histoires vivent. Découvrez maintenant