Nolan
En vingt-huit ans, j'ai appris à garder la face malgré les situations éprouvantes. Que ce soit durant les combats illégaux, sous le regard déçu de mon père, ou même au décès de ma mère... Jamais, je n'ai ressenti une colère aussi violente, aussi profonde, que celle qui monte actuellement en moi. Pourtant, quand j'ai appris son décès, j'en ai ressenti de la haine. Mais pas comme ça, c'était de la haine mêlée à une infinie tristesse, à un fort sentiment d'injustice. Aujourd'hui, il n'y a que de la rage pure. Elle glisse dans mes veines, puissante et inéluctable.
Je ne suis pas certain d'être encore au contrôle de mon propre esprit, ni même de mon corps. Pas que Jenko y soit pour quelque chose, simplement je me laisse envahir et guider par cette fureur. Je ne suis plus attentif à l'expression de Léonard. Impossible pour mon esprit d'identifier s'il est effrayé, impressionné, ou simplement heureux que je morde enfin à l'hameçon.
Les battements de mon cœur raisonnent jusque dans mes tempes, mon rythme cardiaque n'a plus rien de maîtriser. Quant à mes mâchoires, si j'avais conscience de ce que je suis en train de faire, je serais sans doute surpris qu'aucune de mes dents ne se brise, au vu de la force avec laquelle je les serre. La rancœur que je ressens envers la personne qui m'a enlevé ma mère est bien trop profonde, bien trop ancrée en moi, pour que je parvienne à lutter alors que je me retrouve, enfin, face à elle.
Je n'ai plus rien en tête. Rien à part ce besoin oppressant de réduire à néant cet enfoiré. Un battement de cils, et me voilà debout. Un clignement plus tard, j'ai parcouru la distance qui me séparait de Léonard. Mes muscles se contractent, mon poing se ferme, je donne de l'élan à mon bras, quand soudain...
Ça commence par un subtil frisson. Un frisson de bien-être.
Non ! Je dois lui faire bouffer mes phalanges !
Ma réplique silencieuse se fait balayer par un le flot de chaleur qui se répand agréablement en moi. Une chaleur nouvelle, qui n'a plus rien à voir avec le coup de chaud que m'a procuré ma colère.
C'est comme la caresse du soleil.
Mon cœur loupe un battement, mais c'est seulement pour reprendre un rythme plus régulier. Ma respiration devient plus calme, plus mesurée, alors que je reprends le contrôle de mon esprit, et ordonne à mes muscles de se décontracter. Le frisson de bien-être se transforme en une caresse de douceur qui me submerge aussi intensément que si elle me prenait dans ses bras.
Elle...
Je la sens jusque dans la moindre parcelle de mon corps. En me concentrant, je pourrais presque la voir démonter, brique par brique, les murs de rage dans lesquels je me suis réfugié.
Aelys.
Je perçois sa force, je m'abreuve de son courage, de son amour qui m'envahit. Elle se sert de notre lien, par lequel elle a probablement senti que je perdais mon sang-froid. La puissance avec laquelle elle me fait parvenir cet élan de sérénité m'impressionne autant qu'il me fait du bien, même si, je l'avoue je m'en veux. Parce que, oui, pendant un instant j'ai tout oublié, même la raison de ma venue ici...
Même elle.
Léonard a eut bien plus de pouvoir sur moi que ce que j'aurais pu imaginer. J'ai commis une erreur, je l'ai sous-estimé. Heureusement, il n'a aucune idée de la valeur d'Aelys, ni de ce don elle est capable. Pour lui, elle n'est qu'une victime. Une victime qui a besoin qu'on l'aide. Moi, je l'ai vu, la vraie Aelys. J'ai découvert avec admiration la femme incroyable qu'elle est.
La femme qui vient de me sauver de moi-même. La femme de ma vie.
Jusqu'à maintenant, les deux seules fois où j'ai perdu le contrôle, elle n'a ressenti que ma haine. Et c'est maintenant, alors que mon visage n'est qu'à quelques centimètres de celui de Léonard, que pour la première fois, je lui envoie tout l'amour que je ressens pour elle via notre lien. Cette vague est cent fois plus intense, mille fois plus réelle, et un milliard de fois plus précieuse que les deux précédentes.
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Be my fatality...
Lobisomem« L'âme sœur, chez les lycanthropes, est un concept qui désigne une compatibilité amoureuse et sexuelle qui serait parfaite entre deux individus. L'expression a des définitions variables, mais toutes ramènent à l'idée selon laquelle ces individus on...