Chapitre 7-1

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*Mise à jour le 24.10.23*


Je ne sais à quel moment l'horreur relâcha son emprise sur mon cerveau. Il n'avait pas dû s'écouler beaucoup de temps car, à l'instant où je reprenais mes esprits et m'obligeai à arrêter de gémir, Jude fit irruption dans la grotte l'arc à la main. Il s'arrêta brutalement et se figea face au spectacle apparut devant ses yeux.

— Merde !

La surprise mêlée de tristesse de sa voix me surprit. Je le connaissais depuis peu, mais il m'avait plutôt semblé mordant et sarcastique. C'est pour cela que lorsqu'il baissa les yeux vers moi, je m'attendis à du dégoût et de la condescendance, et non à cette lueur d'inquiétude qui traversa son regard sombre. Il fit mine de s'avancer vers moi, lorsque je l'en empêchai d'un brusque geste de la main, avant de rendre le contenu de mon estomac. Là c'était sûr, j'allais avoir droit au regard dégoûté et à la remarque assortie.

D'une main tremblante, je m'essuyai maladroitement la bouche, avant de me relever. À mon grand étonnement, il vint m'aider et me prit par le bras pour me soutenir.

— Ça va aller ?

Pour toute réponse, je lui fis un signe de tête peu assuré, me dégageai de sa prise et posai à nouveau les yeux sur le cadavre. Car autant appeler un chat un chat. Mon cerveau avait beau avoir voulu empêcher la prise de conscience, elle avait belle et bien eu lieu. Maintenant, j'avais besoin de comprendre ce que je voyais. Ce que l'on peut expliquer paraît toujours moins effrayant, enfin en théorie. Malgré mes bonnes résolutions, je ne pus empêcher mon regard de dériver loin de l'horrible spectacle, pour finalement finir par fixer mes pieds.

Le sol de la grotte était recouvert d'un mélange de terre et de sable. Le corps reposait dans le coin gauche de l'ouverture, sur une sorte de petite plateforme naturelle qui ne devait pas faire plus de deux mètres carrés. Il gisait sur le dos, ou plutôt devrais-je dire elle, car il s'agissait incontestablement d'une femme. Ce qui tendait de plus en plus à prouver que j'avais retrouvé l'infortunée propriétaire du pull qui avait dû connaître une mort tout sauf douce.

Les traces de son tourment étaient encore perceptibles dans ses yeux voilés, écarquillés, et ses traits figés d'horreur, les blessures béantes présentes sur tout son corps, ajoutaient encore à l'atrocité de la scène.

Manquant une nouvelle fois de rendre mon déjeuner, je me retournai et me forçai à respirer profondément. Et c'est là que cela me frappa ! Trop choquée par la découverte du corps, je n'y avais pas prêté attention, mais la compulsion qui me poussait vers cette étrange « odeur » avait disparu. Le plus étrange était qu'il n'y avait pas d'odeur... du tout ! Cette femme était morte de toute évidence depuis un petit moment et son corps ne dégageait aucune des puanteurs propres à la décomposition. Je n'y connaissais pas grand-chose en cadavre, mais il me sembla évident que celui-ci aurait dû sentir à des lieues à la ronde et inviter ainsi tous les charognards du coin ? Malgré l'absence d'effluves nauséabondes, j'éprouvai néanmoins le besoin de sortir. J'avais l'impression d'étouffer dans cette caverne sombre et humide. Ce n'est qu'une fois à l'air libre que je parvins à rassembler mes esprits.

— Pourquoi ça ne sent rien ? demandai-je d'une voix mal assurée à Jude qui m'avait suivie. Pas que je m'en plaigne, mais...

Je me tus subitement, me rendant compte qu'à l'instant présent, ce n'était vraiment pas le plus important.

— C'est normal, me répondit-il néanmoins. Martha était une métamorphe assez puissante et possédait un don qui lui était propre : celui de pouvoir masquer complètement son odeur. Il semblerait que son don persiste même dans la mort... Magique !

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant