Chapitre 22-2

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— Apparemment, ça t'aide de me toucher, commentai-je inutilement.

— Oui. Dès que nos peaux sont entrées en contact... ça a été de nouveau le silence.

— Oui, répondis-je rêveusement. Ça aussi, c'est nouveau pour moi... Le silence. D'habitude, c'est plus comme une sorte de bruit de fond continuel, c'est ce que je ressens constamment. J'en ai tellement l'habitude que je n'y fais même plus attention. Mais le silence ça, c'est nouveau... reposant mais déconcertant à sa manière, et je pense que c'est grâce à toi, d'une certaine façon.

— Comment ça ? me demanda-t-il d'un ton soupçonneux, en prenant bien garde de ne pas me lâcher la main.

— Depuis que j'ai bu ton sang, tous mes sens sont amplifiés et mes perceptions aussi. Mais j'ai aussi constaté que mes défenses sont beaucoup plus fortes, sûrement un contrecoup de ta manie du contrôle, raillai-je sans pouvoir m'en empêcher. Le bon côté des choses, c'est qu'il n'y a donc pas de raison que tu n'y parviennes pas par toi-même très rapidement.

— Pour ça, il faudrait que tu m'expliques comment faire.

J'entrepris donc de lui expliquer comment fermer progressivement son esprit aux agressions extérieures, et il arriva assez rapidement à un niveau plus qu'acceptable en si peu de temps. Néanmoins, cela lui demanda beaucoup d'efforts, raison pour laquelle il avait encore sa main dans la mienne à la fin de ce petit exercice, et ça n'avait pas l'air de lui faire plaisir. Ce mec était un obsédé du contrôle, et avoir besoin de conseils, qui plus est venant de moi, pour pouvoir se contrôler, ça le mettait hors de lui. Il se dégagea brutalement de ma main et alla d'un pas rageur jusque dans la cuisine où il but un verre d'eau. Sûrement pour se calmer les nerfs.

Je le suivis plus posément et me rendis compte que mon bruit de fond habituel était en train de revenir progressivement. Adieu le silence... J'étais à la fois déçue et soulagée, car cela voulait dire que ce n'était que momentané et que ce que l'on redoutait le plus ne s'était apparemment pas produit. Tout à coup un peu plus légère, mais un peu moins patiente face à l'attitude de Jude, je le rejoignis dans la cuisine.

— Ça va, lui dis-je d'un ton excédé. Ce que tu redoutais le plus ne s'est apparemment pas produit. Tu ne seras pas enchaîné à moi pour l'éternité. Alors tu peux te détendre, persifflai-je tout de même un peu vexée par sa réaction.

— Qu'est-ce que tu en sais ? Ça me semble déjà plus qu'intime comme connexion si je dois te tenir la main pour ne pas avoir la migraine, grinça-t-il entre ses dents d'une voix acide.

— Bienvenue dans mon monde, lui lançai-je froidement.

Pour toute réponse il me foudroya du regard et commença à faire des allers-retours d'un pas rageur, tandis qu'il se massait les tempes d'un air excédé.

— Arrête de faire l'enfant ! Moi je vis avec depuis mes sept ans et je n'en suis pas morte. De plus, c'est apparemment transitoire, car j'ai eu droit à un échantillon de tes sens et de ton « super-contrôle » pendant quelques dizaines de minutes, et c'est déjà en train de s'estomper, alors tu peux te détendre.

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant