Chapitre 21-2

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Je savais bien que ce n'était pas la raison de sa colère, mais je voulais le provoquer. Je savais que c'était puéril mais, à ce moment-là, je ne pouvais pas m'en empêcher. Il prit ma provocation pour ce qu'elle était et choisit de ne pas y répondre. Il resta là, debout devant moi, à serrer les poings, et je vis que sa colère et sa détermination cédaient peu à peu la place à la résignation.

— C'est surtout toi qu'ils ont essayé de tuer, lui dis-je plus doucement. Depuis que tu es avec moi, tu as failli mourir trois fois en autant de jours. Il semblerait que je ne sois pas bonne pour ta santé ! essayai-je de plaisanter, mais les mots avaient un arrière-goût amer, car en les prononçant, je me rendais compte qu'ils étaient on ne peut plus vrais.

— Tu sais bien que c'est faux. C'est un coup de chance que nous nous en soyons sortis vivants cette nuit.

— Tu marques un point. Peut-être qu'ils se sont lassés de vouloir me capturer avec toi à mes côtés, car soyons francs... tu es pire qu'une sangsue ! Mais je pense que si je joue les appâts bien dociles sans personne aux alentours, ils essaieront de me capturer. Tu pourras ainsi me pister jusqu'à l'endroit où ils me détiennent et, espérons-le, les autres victimes aussi.

— Il y a beaucoup trop d'inconnues et de « si » dans ton plan. Les risques sont beaucoup trop grands, et nous ne sommes même pas sûrs que ça marchera, dit-il en me regardant tristement, toute trace de colère l'ayant momentanément déserté. Tu es unique et donc tes réactions risquent de l'être tout autant. Nous ne pouvons pas prévoir de quelle manière tu vas réagir si tu bois mon sang.

Malgré son argumentaire pertinent, je le sentais peu à peu fléchir au ton de sa voix.

A priori, ça a déjà fonctionné dans un sens, alors pourquoi pas dans l'autre ?

— Parce que tu es beaucoup plus réceptive que la normale, tu n'as pas d'animal pour te brider. En ce qui me concerne... ça risque d'être diffèrent.

— On essaye, et si ce n'est pas concluant, je te promets d'abandonner. Enfin, si tu veux ? soufflai-je, ma voix s'éteignant doucement sur la fin de ma phrase et mes yeux se rivant sur mes pieds.

D'un seul coup, je me sentais beaucoup moins sûre de moi. Et si la vraie raison de son refus était qu'il ne voulait surtout pas de liens encore plus forts entre nous deux ? Il m'avait déjà assez fait entendre que j'étais plus un boulet qu'autre chose à ses yeux. Soudainement certaine qu'il allait refuser malgré tout, le sentiment de solitude et d'abandon qui ne me quittait jamais complètement s'abattit sur moi avec la force d'un trente-huit tonnes. Je ravalai les larmes que je sentais monter et commençai à me diriger doucement vers la porte, quand je sentis des mains se poser doucement sur mes épaules.

— Je veux bien le faire à la condition que tu en connaisses toutes les implications et que l'on soit sûrs à cent pour cent que ça me permettra de te retrouver. Tu as beau être une insupportable tête de mule... je ne veux pas te perdre. Je ne veux plus jamais perdre quelqu'un, chuchota-t-il si bas que cette dernière remarque ne devait être destinée qu'à lui.

Je décidai donc, par égard pour son intimité, de ne pas la relever. S'il voulait m'en parler, il le ferait de lui-même. Il m'attira doucement à lui, mon dos contre son torse, et m'enlaça tendrement tout en laissant reposer sa tête contre la mienne.

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant