Chapitre 27-1

7.7K 989 48
                                    


N'ayant pas d'autres choix, je me forçai à bouger. Aria comptait sur moi, je ne pouvais pas craquer maintenant, il fallait que je me reprenne. Un peu comme une automate, je me baissai pour ramasser le fusil et tâtonnai pour enlever le cran de sureté. On n'est jamais trop prudent... surtout après ce qui venait de m'arriver ! Quelque chose essaya de remonter, du fond de ma conscience, mais je l'en empêchai. Tout me paraissait flou, comme irréel, alors que j'allai m'assurer qu'Aria allait bien et qu'elle n'avait pas assisté à toute la scène. À son regard épouvanté lorsqu'elle vit le sang qui me recouvrait, je compris que non, sinon elle n'aurait pas été surprise.

— Où était Adam la dernière fois que tu l'as entendu ? lui demandai-je d'une voix qui me parut étrange.

— Dans la cellule d'à côté. Au début, il me parlait, mais le méchant garde l'a fait taire, alors après... il tapait doucement sur le mur pour me faire savoir qu'il était là et me rassurer, me raconta-t-elle d'une petite voix pleine de larmes contenues. J'espère qu'il va bien !

Elle me jetait des regards à la fois interrogateurs et apeurés, mais qu'aurais-je bien pu lui dire ? Et comment allais-je la faire sortir de là sans qu'elle voie le cadavre ?

— Aria, j'aimerais que tu ailles m'attendre dans le couloir avec Féline pendant que j'inspecte les autres cellules. Tu veux bien ? lui demandai-je gentiment.

Elle hocha la tête et me suivit docilement. Je pris bien garde à faire écran entre elle et le reste de l'antichambre lorsque nous sortîmes et lui fis passer rapidement la porte, avant d'y retourner seule pour contrôler les autres cellules. Malheureusement, elles étaient toutes vides ! C'est donc la mort dans l'âme et en évitant de regarder et de penser au corps qui gisait à quelques mètres de moi, que je rejoignis les autres.

— Désolée, Aria... mais il n'y avait personne d'autre que toi, lui annonçai-je en douceur alors que je m'accroupissais pour être à son niveau. Je vais te conduire en lieu sûr, la police est à l'extérieur. Tu seras en sécurité avec eux et ensuite je reviendrai chercher Adam. S'il se trouve encore ici, je le trouverai, promis.

Elle acquiesça d'un signe de tête tremblant, ses yeux exorbités fixés sur moi. Nous rebroussâmes chemin jusqu'à l'ascenseur sans croiser personne. C'est alors que ma connexion télépathique avec Féline se rétablit brutalement et que mon état de choc se dissipa aussi vite qu'il était venu. Je me retrouvai assise par terre devant la porte de l'ascenseur sans même trouver la force d'appuyer sur le bouton. Dans ma tête, « je l'ai tué, je l'ai tué, je l'ai tué » tournait en boucle et ne semblait pas vouloir s'arrêter, même si je savais que techniquement, c'était Féline qui l'avait achevé. D'un côté, j'étais horrifiée par ce qu'on avait fait, et de l'autre j'en étais satisfaite, heureuse d'être encore en vie et relativement intacte. Ce salaud n'avait eu que ce qu'il méritait. Au fond, c'était cette dernière pensée qui me terrifiait le plus.

« Nous l'avons tué toute les deux, petite sœur. Il voulait te faire du mal, nous l'avons tué. Je suis fière d'avoir pu t'aider à le faire et ça ne devrait pas te déranger. »

Dans l'esprit de Féline, son seul regret était d'avoir gâché de la si bonne viande. C'était idiot de tuer sans manger sa proie, encore un truc d'humain !

Curieusement son analyse « animale » de la situation ne m'aida pas vraiment. Je finis quand même par me relever et commençai à ressentir tout ce que mon état de choc m'avait caché. Vu les sensations que mon corps m'envoyait, je devais être plutôt mal en point. Je préférai ne pas y penser pour le moment et nous montâmes toutes les trois dans l'ascenseur, qu'Aria avait eu la présence d'esprit d'appeler pendant ma petite prise de conscience. Tout le long de la montée, quelque chose d'important chercha à faire surface dans mon esprit, mais sans y parvenir. C'était là, au bord de ma conscience, mais ça ne voulait pas émerger. Lorsque la cabine s'arrêta, cela me revint comme un flash... La caméra ! Dans un réflexe, j'empêchai la porte de s'ouvrir en maintenant le bouton d'étage appuyé.

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant