Chapitre 32-2

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Je fis ce qu'il me demandait sans argumenter et restai près d'Adam durant toute la durée de sa métamorphose. Dire que cela me parut long et douloureux serait un euphémisme. J'avais l'impression d'être branchée sur une prise secteur et que des milliers de fourmis essayaient de sortir de dessous ma peau. Quand ce fut enfin terminé, je me frottai les bras pour enlever les derniers fourmillements résiduels et tendis une main à Adam pour l'aider à se relever malgré ses tremblements. À ce moment, l'odeur de Jude m'enveloppa et il me dépassa sans me regarder pour aller s'accroupir auprès d'Adam.

— C'est bon. À présent qu'il est sous sa forme humaine, il me laissera de nouveau l'approcher. Tu en as assez fait ! Je vais m'en occuper.

— C'est quoi ton problème ? Tu n'aimes pas les panthères, le provoquai-je volontairement.

Son ton froid et impersonnel m'avait mis en rogne et je voulais le faire réagir.

— Non, bien qu'en tant que métamorphe oiseau je ne porte pas particulièrement les félins dans mon cœur. En particulier ceux qui sont assez gros et assez bêtes pour essayer de me bouffer, lança-t-il d'un ton venimeux accompagné d'un regard noir en direction de Féline, par-dessus mon épaule.

Ce qui lui valut un feulement agressif de la part de l'intéressée.

— Non, ce qui me dérange c'est que tu ne m'en aies pas parlé quand je t'ai posé la question. Si tu ne me fais toujours pas confiance après tout ce qu'il s'est passé, alors... autant garder nos distances l'un envers l'autre.

Il me tourna le dos et aida un Adam tout tremblant et en guenilles à se relever doucement. Je restais un moment silencieuse à contempler son dos, tout en me disant qu'il avait raison et que j'aurais dû lui en parler ; lorsque sa rebuffade face à ma question sur sa blessure me revint subitement en mémoire, ravivant ma colère qui vint très rapidement remplacer la culpabilité.

— Tu as parfaitement raison. Autant garder nos distances, puisque toi non plus tu ne me fais pas confiance. Tu me reproches de ne pas répondre à tes questions, mais tu ne réponds pas aux miennes non plus. Tu es donc mal placé pour te plaindre.

— Je n'ai pas répondu à ta question, car cela ne te concerne en rien. Alors que dans ton cas, c'est complètement différent, et tu le sais !

— Non, je n'en sais rien du tout ! Et je ne vois pas en quoi mon lien avec Féline te regarde d'ailleurs, lui criai-je avec colère. Tu as raison, sortons vite de cette forêt et restons-en là.

Ça me faisait mal au cœur, mais j'étais tellement en colère, que pour l'instant je m'en foutais. Nous retraversâmes donc les bois en direction de la ferme à une allure de grabataires, sans croiser personne et sans prononcer un seul mot. Féline me suivait et me laissait à mes idées moroses. Celles-ci devaient être trop humaines pour qu'elle puisse les appréhender. Néanmoins, lorsque nous arrivâmes en vue de la ferme, je commençai à m'inquiéter de ce qu'elle allait devenir. Je ne pouvais décemment pas la ramener avec moi à l'appartement. Elle était un peu trop grosse pour passer pour un chat. Mon inquiétude monta d'un cran quand je me rendis compte, en sondant ses pensées, qu'elle non plus ne savait pas trop où aller.

Féline. Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant